Plus qu’une griffe de mode, Filippa K se conçoit davantage comme une philosophie de vie qui prône l’harmonie entre simplicité et raffinement. Weekend a découvert, en avant- première, la toute nouvelle collection hiver 07-08 aux accents futuristes. Reportage exclusif à Stockholm.

Capitale de la Suède, Stockholm cultive le goût des contrastes. Sa beauté naît de cette opposition entre un ciel gris et des façades colorées, des bâtiments anciens et une déco ultramoderne, un climat glacial et une jeunesse chaleureuse. Tout y est spacieux, propre, verdoyant et paisible. La ville regorge aussi de superbes boutiques et de lieux tendance. La griffe de mode suédoise Filippa K y est bien établie. Que ce soit dans le Harrod’s local (NK) ou les rues piétonnes huppées, elle s’est imposée par son élégance discrète. Privilégiant le confort, Filippa K propose aussi une ligne  » Ease  » dans une boutique pilote. Les murs en bois clair et une gigantesque toile, composée de plantes, suscitent d’emblée un sentiment de bien-être conforté par les rayonnages, les pulls, joggings, tenues de yoga et autres produits de bain naturels.

Fondée en 1993 par Filippa Knutsson, la griffe Filippa K décline à la fois des lignes féminine et masculine. Les collections été 2007 ont été placées sous le signe du Bauhaus et plus précisément de l’un de ses pionniers, Mies van der Rohe (1886-1969), dont l’architecture et le mobilier moderne et minimaliste épousent la philosophie de Filippa K : pureté des lignes, simplicité sensuelle des formes et des matières, sens du détail graphique, élégance intemporelle. Quant aux collections hiver 07-08, elles sont teintées par l’ambiance futuriste du film de Stanley Kubrick,  » 2001 : L’Odyssée de l’espace  » (1968) et par les sculptures graphiques de Lars Englund. Weekend a fait le voyage de Stockholm, pour découvrir, en exclusivité, ces tenues hivernales à haute valeur créative ajoutée.

Zoom sur un hiver futuriste

L’AlbaNova abrite le Centre de physique, d’astronomie et de biotechnologie de l’Université de Stockholm. A l’intérieur, l’ambiance est surchauffée. Toute la jeunesse branchée semble s’y être donné rendez-vous pour la présentation des collections hiver 07-08 signées Filippa K. Le champagne n’a pas fini de couler, que la musique de  » 2001 : L’Odyssée de l’espace  » est lancée. Des silhouettes argentées – cosmonautes d’une nouvelle espèce – font leur entrée. La femme de demain ose des robes ultracourtes avec des vestes sobres et des chaussures vernies à hauts talons. Ton sur ton (blanc, noir, kaki, gris, bleu nuit) ou imprimée de rectangles, elle affiche des touches high-tech ou des volumes bombés. Les tailles sont droites, légèrement évasées ou soulignées par de fines ceintures. Même si les robes sont mini-mini, elles arborent des cols fermés ou roulés. Rectangulaires ou ornées de lanières, les coupes se veulent simples et féminines. La sophistication apparaît dans les détails (dos nu, col en V, poches) et les matières sont de saison : laine fine, coton doux, jersey et viscose. Que ce soit pour les jeans (en denim foncé stretch) ou les pantalons unis, la taille haute est de mise.

Nullement insensibles aux codes masculins, les tops se muent aussi en espionnes. Tailleurs-pantalons, vestons ou cabans ont piqué des éléments (les boutons, par exemple) à la garde-robe militaire. Les hommes, eux, s’amusent avec les couleurs. Un peu de framboise par-ci, une touche de vert gris par-là, une ceinture rouge sur un pantalon gris et des cagoules trendy accentuent une audace distinguée. Le costume classique, anthracite ou orné de rayures tennis, se porte avec une chemise à jabots. Droits ou asymétriques, pulls et gilets ont des poches arrière. Les vestes streetwear sont à capuches, alors que la version habillée s’enrichit de morceaux de tissus rabattus. Symbole de paix, le blanc est très présent (à épingler : de superbes parkas).

Dans le secret des collections

A Stockholm, Filippa K a son siège à quelques pas d’un quartier semi-bobo, qui s’étire le long des quais. Au 65, Söder Mälarstrand, un ancien entrepôt a été reconverti en bureaux-lofts. Avec sa queue-de-cheval blonde, ses yeux bleus pétillants, son large sourire, son teint de pêche et son pull marin, la directrice de création Filippa Knutsson ressemble à une toute jeune fille. Son physique nordique tranche avec son parcours multiculturel. Elle n’a que 2 ans lorsque ses parents divorcent et que sa mère l’emmène à Londres. Une fois majeure, elle revient en Suède.  » Je suis issue d’une famille plutôt internationale, confie-t-elle. Ce brassage de langues et ce manque de racines sont très inspirants. Ils me permettent de voir les choses de diverses façons.  » Ainsi, la production provient du Portugal, d’Italie et de Hong Kong. Côté vie privée, Filippa Knutsson élève ses enfants à Stockholm, mais garde un pied-à-terre à Paris.  » En Suède, j’apprécie l’ouverture d’esprit, la nature et l’envie d’aller de l’avant. Mais j’ai aussi besoin de puiser mon énergie dans le chaos d’une ville mouvementée. A l’instar de mes vêtements, je suis toujours en quête d’équilibre.  »

La mode vibre en Filippa Knutsson depuis longtemps. Propriétaire d’une chaîne de magasins, son père l’initie aux ficelles du métier. Puis, petit à petit, la jeune femme forge son style :  » Ma touche suédoise se situe dans les lignes pures, simples et clean. Cette façon d’être scandinave prône des vêtements portables et fonctionnels. Dénuées de romantisme, mes collections ont toujours une pointe d’originalité.  » De nature intuitive, la directrice de création réussit la symbiose entre continuité et nouveauté. Fidèle à sa philosophie, elle rend les basics attrayants. Les matières et les finitions garantissent l’aisance et l’élégance.  » Nous nous adressons à des gens qui recherchent plus un design qu’un logo. Ils aiment notre style classique, aux accents contemporains. La sensualité se situe surtout dans ce qu’on cache.  » Ne se considérant pas comme un  » big boss « , Filippa Knutsson privilégie le travail d’équipe.  » Même si Filippa K est mon bébé, il est important de lui laisser une certaine liberté.  » Chaque collection naît donc d’une interaction entre la directrice de création et les créateurs de mode : Asa Sternerhag pour la Femme et Rasmus Wingardh pour l’Homme

Chargée de la collection féminine, Asa Sternerhag (34 ans) £uvre depuis sept ans déjà dans la maison. Douce et mutine, elle est pourtant très déterminée dans ses choix. Pas étonnant qu’ils soient essentiellement guidés par son envie de jouer avec les contrastes.  » La féminité se traduit par le fait d’oser les mélanges : matières douces/fermes, brillant/mat, dépouillé/éléments décoratifs, masculin/ féminin, explique- t-elle. Il en résulte une belle tension, à l’image de la femme. A la fois sensuelle, délicate et forte, elle arbore plusieurs facettes.  »

Toutes ces facettes se retrouvent d’ailleurs dans la collection hiver 07-08, dont la simplicité est rehaussée de pièces travaillées.  » Cette collection se veut unie, tout en exaltant une expression puissante dans les détails. Le futur est dilué dans un blanc d’une grande pureté, accompagné de touches métallisées (les boutons), brillantes et contemporaines. Il émane une certaine fraîcheur des lignes droites et graphiques, et des plis qui donnent un effet boule.  » La déferlante de petites robes, elle, répond à un désir bien féminin.  » Nous offrons aux femmes une garde-robe complète (dont la lingerie), ainsi que des accessoires (sacs fourre-tout en tissu argenté, chaussures laquées colorées et fines ceintures) qui apportent un plus à la simplicité.  »

Asa Sternerhag et Rasmus Wingardh sont très complices. Même si les lignes Femme et Homme sont indépendantes, elles s’avèrent harmonieuses. Avec son look de bad boy – cheveux en brosse, barbe, bague  » tête de mort  » -, le créateur affiche un air décalé, qui se retrouve dans la version masculine de Filippa K.  » Lorsque je suis arrivé, cette ligne n’était pas identifiée et elle manquait de sens, souligne-t-il. Je lui ai insufflé un mélange de streetwear, de fashion et de coupes taillées et structurées. L’apposition de ces oppositions donne lieu à une certaine sophistication.  »

Avec ses coupes innovantes et ses touches inattendues – dont ses coloris joyeux -, Rasmus Wingardh s’amuse à  » repousser les limites vestimentaires de l’homme « . Basiques et costumes se veulent portables, tout en restant originaux. Les codes classiques sont brisés par un mélange de structures et de matières (tweed et flanelle dans une même pièce), par une union moderne (une veste classe sur un jeans foncé, smoking funky) et par des pointes d’origami. La magie fonctionne et confirme l’élégance.  » Chaque saison nous force à nous réinventer, tout en préservant notre identité.  »

En Belgique aussi…

Le label suédois continue, en effet, à grandir, à se déployer dans le monde entier… y compris en Belgique.  » J’aime ce pays qui bouge beaucoup et qui incarne un mélange du nord et du sud de l’Europe.  » A Anvers, Filippa K vient d’inaugurer un nouvel espace de 200 m2 répartis sur deux étages pour accueillir la collection Femme (vêtements, chaussures, sacs et autres accessoires). La toute première boutique anversoise, elle, sera désormais entièrement réservée à la collection Homme. Des ouvertures sont aussi prévues à Bruxelles, Gand et Knokke.

Carnet d’adresses en page 78.

Kerenn Elkaïm

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