À moins de trois mois des J.O. de Londres, les fragrances cultes se mettent à la muscu. Nouveau gimmick de la parfumerie masculine, les eaux de sport ne s’adressent pourtant pas qu’aux accros des abdos.

Il devait bien se douter que cela arriverait un jour : dans la vie de ce que les marques appellent un  » pilier  » – soit un jus qui après avoir cartonné à sa sortie devient un longseller – il y a souvent une version jour – l’original -, une version nuit – sous-titrée  » intense  » – et une version sport, plus fraîche, plus casual, disons. D’ailleurs, le sport, il aime plutôt ça, Justin Timberlake. Descendre les pistes de snowboard à fond de train, swinguer sans contrainte sur son propre terrain de golf, il connaît. En revanche, prendre la pose, façon Mister tee-shirt mouillé qui se secoue les cheveux et dégaine ses abdos en sortant d’une piscine à débordement, ce n’était pas franchement son idée du shoot parfait. Trop premier degré sans doute. Qu’à cela ne tienne : pour la nouvelle campagne de Play Sport, la maison Givenchy s’est rabattue sur un autre cliché du genre, exploité aussi par Dior et Hugo Boss cette année : celui du beau gosse au volant d’une voiture de sport. Chez Chanel comme chez Issey Miyake, les nouveaux spots vantent plutôt des performances, des vraies, rouleaux de vague et planches de surf à la clé. The winning attitude, en somme.

 » En parfumerie, masculine en particulier, tout est extrêmement codé « , confirme Patrick Guedj, directeur artistique de Kenzo Parfums qui vient aussi de lancer une édition sport de son classique, Kenzo Homme. Si la maison a misé sur le visage viril et le corps bien musclé de l’acteur français Nicolas Cazalé, ce n’est pas dans la peau d’un dieu du stade qu’il s’illustre, mais en jouant au babyfoot avec une bande de potes, les pieds dans les vagues ou en participant à une régate de voiliers télécommandés.  » Quoi qu’on en dise, le sport est rarement dans les gènes des marques de luxe, de toute façon, justifie Patrick Guedj. Et certainement pas chez Kenzo. Ç’aurait été une absurdité d’imaginer une eau de sport qui se prenne au sérieux. Il fallait garder un lien, mais décalé, sans prendre trop de risques pour autant. Un mec, c’est très conservateur. Sa virilité ne doit en rien être mise en cause. En ça, le babyfoot était un excellent choix : je vous mets au défi d’en installer un dans une pièce remplie de gars sans qu’ils finissent tous par y jouer. « 

Côté fragrance, aussi, nul besoin d’aller chercher midi à quatorze heures.  » L’eau de sport, c’est une nouvelle manière d’approcher la parfumerie masculine, reconnaît François Demachy, en charge du développement olfactif chez LVMH. Ce qui se cache derrière cette appellation imaginée par les services marketing, c’est certainement l’idée d’une odeur fraîche qui le reste longtemps. Les hommes aiment ce qui réveille, ce qui dynamise. Ils veulent sentir le propre. Parce que c’est rassurant, régressif, attachant.  » En toile de fond de tous ces jus, on retrouve donc souvent des muscs blancs, des notes hespéridées – citron, bergamote, orange, mandarine… – qui prennent corps grâce à des bois ou des épices, parmi lesquels le cèdre et le gingembre tiennent bien la corde en ce moment. Avec, aussi, pour un coup de frais encore plus littéral, un soupçon de menthe qui glace littéralement la peau.

La filiation olfactive avec le parfum  » père  » ? Un petit plus, souvent subliminal d’ailleurs, qui n’a rien d’obligatoire. Si le prénom est  » sport « , c’est bien le nom de famille qui prime. Et qui fait vendre.

PAR ISABELLE WILLOT

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