L’ARTISTE
Helmut Stallaerts est né à Bruxelles en 1982, où il vit et travaille encore aujourd’hui. Ce jeune artiste belgo-allemand a d’abord étudié la peinture à Sint-Lukas à Bruxelles, avant de poursuivre sa formation à l’Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf. Depuis, avec un talent et une maîtrise confondants de maturité, il s’est largement ouvert à d’autres moyens d’expression comme la sculpture, la photographie et la vidéo. Un élargissement de son champ d’action qui lui permet de développer plus précisément sa pensée, très dense. Mille-feuille de références philosophiques (Foucault, Althusser, Steiner, Deleuze) l’£uvre d’Helmut Stallaerts pose un constat amer, un peu triste et sans concession sur la société capitaliste. Le monde qu’il dépeint se rapproche de celui d’un James Ensor ou d’un George Grosz où les hommes, réduits à l’état de marionnettes, se débattent maladroitement avec leur existence. L’atmosphère générale peut aussi évoquer Kafka ou Radiohead, groupe fétiche de l’artiste. Souvent mis en scène dans une structure géométrique évoquant la perspective théâtrale développée par Giotto lors de la première Renaissance, ses personnages semblent prisonniers d’une mascarade à laquelle ils n’ont d’autre choix que de participer. Un miroir à peine grossissant de notre époque chahutée qu’Helmut Stallaerts nous tend sans cynisme. Avec compassion, plutôt. Ce qui est pire, finalement.
L’EXPO
Première exposition personnelle de l’artiste à Bruxelles, Stage croque les hommes comme les acteurs d’une inéluctable tragédie. Prenons trois £uvres-phares pour comprendre. La série de photographies intitulée Die Auflösung (la dissolution), (3.) d’abord, a été réalisée dans les murs froids et impersonnels de la Bibliothèque royale de Belgique à Bruxelles. Un décor sur mesure pour les étranges anonymes que l’on y surprend. Le visage recouvert d’un masque couleur chair, ils incarnent la standardisation et la perte d’individualité. Un thème cher à Stallaerts que l’on retrouve également dans la peinture intitulée King’s Clothes (les habits du roi) (2.) . Sur une table, différents personnages dépeints comme des images d’Epinal du prêtre, du businessman, etcà avancent également sans visage, manière pour l’artiste de signifier la primauté de la fonction sur l’individu. On retiendra enfin la terrible vidéo Profile (1.). Soit un plan fixe sur une opération chirurgicale en cours. Soudain, le médecin stoppe son action. Relève la tête. Se met à rire bêtement. De plus en plus fort. Jusqu’à ce que son rire se transforme en cri angoissant. Deux voix de sopranos prennent ensuite le relais à la faveur d’un kyrie à pleurer. Glaçant. Implacable. A l’image de la démarche de cet artiste à suivre de très très près.
Helmut Stallaerts : Stage , à la galerie Baronian-Francey, 2, rue Isidore Verheyden, à 1050 Bruxelles.
Jusqu’au 15 juillet prochain. Tél. : 02 512 92 95. www.baronianfrancey.com
Chaque mois, Le Vif Weekend vous propose un décryptage d’exposition. Parce que l’art contemporain est souvent taxé d’hermétisme, nous vous donnons les clés de lecture pour passer les portes des galeries et apprécier le meilleur de l’art vivant.
Baudouin Galler
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