En réussissant à respecter son patrimoine historique tout en privilégiant l’architecture et le design contemporains, Helsinki se profile désormais comme une ville résolument trendy et tournée vers l’avenir. Balade inspirée dans la capitale finlandaise.

Carnet de voyage en page 85.

Plus d’un million de saunas pour un peu plus de cinq millions d’habitants, 188 000 lacs et 200 000 îles, la Finlande est un territoire énorme placé sous le signe de l’eau et de la forêt, de la capitale Helsinki jusqu’au fin fond de la Laponie, passé le cercle polaire. Helsinki dont on a beaucoup parlé tout au long du mois d’août puisque s’y sont déroulés les dixièmes Championnats mondiaux d’athlétisme. Pourtant, cette année, un autre événement d’importance marque également le visage de la  » Fille de la Baltique « . En effet, 2005 a été décrétée officiellement  » Année du design  » dans tout le pays. Et ce n’est pas étonnant quand on sait que la Finlande a vu naître de toutes grosses pointures de l’architecture et du design telles que l’incontournable Alvar Aalto à qui l’on doit, entre autres, le fameux vase Savoy, en forme de lac, et quantité de meubles et objets qui continuent à embellir notre quotidien. Le secret de la longévité de ses créations ? Aller à l’essentiel, afin de se fondre le plus possible dans le paysage. Pas de place ici pour l’esbroufe et le baroque ! La nouvelle génération de créateurs assure brillamment la relève en cherchant en permanence à concilier souci de réalité, de fonctionnalité et élan de nouveauté. Un défi d’envergure qui permet à la Finlande de se hisser au top de la recherche esthétique contemporaine. Une merveilleuse occasion pour découvrir une ville qui a toujours privilégié l’esthétique et l’innovation.

Au premier regard, Helsinki peut sembler un peu froide lorsque l’on s’y promène pour la première fois. En effet, les grands boulevards et avenues rectilignes donnent à la ville un caractère très  » carré « . Mais il suffit d’y passer un long week-end pour succomber au charme certain de ses ambiances différentes, à la limite de la contradiction. Comme toute la Finlande en général, la capitale vit en parfaite harmonie avec la nature. Partout, des collines rocheuses, des sentiers arborés et des parcs invitent le promeneur à faire le plein d’air iodé puisque Helsinki est située sur les bords de la mer Baltique. On peut d’ailleurs emprunter des bateaux pour se rendre sur l’une des innombrables petites îles qui parsèment l’archipel ou prendre l’un des gigantesques ferries qui assurent la traversée vers Tallinn, en Estonie, ou Stockholm, en Suède. La ville a d’ailleurs été fondée en 1550 par le roi de Suède Gustav Vasa pour concurrencer Tallinn au niveau commercial.

En 1748, des stratèges suédois décidèrent d’y aménager une forteresse et les membres de la garnison, qui faisaient partie de l’intelligentsia, contribuèrent à en faire un centre intellectuel et économique. En 1809, vaincue par la puissante Russie, la Suède lui cède la Finlande. La ville, ravagée par un gigantesque incendie l’année précédente, est entièrement reconstruite sous la houlette d’urbanistes russes dont Carl Ludwig Engel à qui l’on doit la place du Sénat et le plan très géométrique du centre de la ville. L’acteur réalisateur américain Warren Beatty l’a d’ailleurs choisie pour servir de décor à son film  » Reds « , censé se dérouler à Saint-Pétersbourg. En plein c£ur de la ville également, la gare d’Helsinki mérite vraiment le détour. En effet, cet énorme bâtiment dans le plus pur style romantique national a été construit, entre 1909 et 1916, par le célèbre architecte finlandais Eliel Saarinen. C’est ici que l’on prend conscience de la modernité de la ville. En effet, à deux pas de ce patrimoine historique, on a osé ériger une impressionnante tour de verre abritant le groupe de presse Sanoma et le Kiasma, musée d’Art contemporain. Tout droit sorti de l’imagination fertile de l’architecte américain Steven Holl, cet étrange bâtiment réalisé en métal étincelant attire le regard de loin. Inauguré en 1998, le Kiasma (carrefour en grec) est un lieu de rencontre et d’échange où l’on peut découvrir de magnifiques collections d’art contemporain de 1960 à nos jours. Elles comprennent naturellement les £uvres de nombre d’artistes finlandais mais aussi de grands noms de designers et créateurs internationaux. Au total, pas moins de 4 000 pièces y sont exposées. A l’intérieur, tout est blanc pour que les créations artistiques soient idéalement mises en valeur. Et des fenêtres à la découpe originale baignent les lieux de lumière naturelle. Si l’art contemporain vous laisse de marbre, prenez malgré tout le temps de pénétrer dans le hall, vous y trouverez une cafétéria, une salle de lecture, un théâtre et des ordinateurs connectés à l’Internet. Les passionnés de design, eux, se doivent de visiter le musée du Design ou musée des Arts décoratifs. La collection permanente permet de découvrir les principales pièces du design finlandais de 1880 à nos jours avec des £uvres de Walter Jung, Eliel Saarinen, Alvar et Aino Aalto,… Encore plus pointu, le Design Forum Finland est un espace de promotion pour les jeunes designers nationaux. Au rez-de-chaussée, une surface de 350 m2 accueille les créations des jeunes pousses du design et de la création. Au sous-sol, un large espace est entièrement consacré à l’organisation d’expositions expérimentales et avant-gardistes. Au shop du musée, situé à côté de la cafétéria, on trouve une belle sélection d’objets au look et à la fonction très bien étudiées, dans le plus pur style de la création scandinave.

Design mondial

A proximité du port, le très chic quartier de l’Esplanade accueille les plus grandes marques de design et les stylistes les plus pointus présentent leurs créations. Il ne faut pas manquer de s’immerger dans l’univers de Marimekko, une enseigne qui fait ici figure d’institution. Dans les années 1960 et 1970 les tissus Marimekko ont séduit les aficionados de la branchitude de la planète entière avec leurs tissus ornés de grandes fleurs stylisées et très colorées. Même Jackie Kennedy est parue en couverture du magazine « Sports Illustrated » portant une robe bain de soleil rose griffée Marimekko. Au fil des ans, le succès s’est estompé à l’échelle internationale mais pas au niveau local. En 1991, la marque a été reprise par Kirsti Paakkanen, une énergique femme d’affaires, qui met tout en £uvre pour que Marimekko retrouve son lustre d’antan. En adoptant une politique de promotion de la créativité et en s’adjoignant les services de six designers de talent (Ritva Falla, Jukka Rintala, Jaanna Parkkila, Mika Piirainen, Naoto Niidome et Matti Seppänen), Marimekko renoue avec le succès et ouvre des points de vente un peu partout dans le monde. Rien que sur l’Esplanade, l’enseigne compte trois magasins dont un flagshipstore. Tout aussi culte, l’enseigne de verrerie et d’art de la table Iittala qui englobe les marques Arabia et BodaNova est également présente sur l’Esplanade. La philosophie de la maison ? Apporter une petite touche d’esthétique et d’élégance à la vie quotidienne. Pari réussi puisque depuis la création du département porcelaine et verrerie en 1881, Iittala a produit, entre autres, le vase Savoy d’Alvar Aalto et le service de vaisselle Teema de Kaj Franck qui est même exposé au célèbre musée d’Art moderne de New York (MoMa).

Un peu en dehors de la ville, dans l’ancienne zone industrielle de Ruoholahti, un énorme bâtiment en brique en forme de U interpelle. C’est  » The Cable Factory « , une ancienne usine de câbles Nokia – autre fleuron du design finlandais – transformée en centre culturel. Voué à la démolition, cet entrepôt a été sauvé in extremis pour être entièrement rénové. A l’origine squatté par des artistes, il s’est officialisé et abrite désormais trois musées (de la Restauration, de l’Hôtellerie et de la photographie), huit galeries, des compagnies théâtrales et musicales, une centaine de studios et d’ateliers d’artistes ainsi que le centre culturel français. Il ne faut pas hésiter à s’y balader pour découvir les expositions gratuites et ressentir les vibrations de la vie culturelle et artistique de la jeune génération des habitants d’Helsinki.

Serge Lvoff

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