Lorsque, en janvier 2006, François Demachy, parfumeur émérite, est entré chez LVMH pour y diriger le développement olfactif, son nom n’était connu que des initiés. Né à Grasse (où son pharmacien de père fabriquait déjà une eau de Cologne maison), comme encore nombre de parfumeurs de sa génération, il avait en effet passé les vingt-neuf années précédentes chez Chanel. On lui doit, en binôme avec Jacques Polge, la plupart des succès de la marque, et quelques autres, tel le cultissime Diva pour Ungaro. Chez LVMH, tout en restant parfumeur, François Demachy est aussi une sorte de superdirecteur artistique ayant le nez et la haute main sur toutes les fragrances des diverses marques du groupe (Guerlain, Kenzo, Givenchy, Acqua di Parma, Loewe, Pucci, Fendi). Cette année, chez Dior, il a signé Midnight Poison, qui a fait l’événement en septembre dernier, avec Eva Green pour égérie, la nouvelle version de Fahrenheit, dite Fahrenheit 32, et une eau de toilette épurée de J’adore. Il a également revisité la mythique Eau sauvage, baptisée Eau sauvage Fraîcheur cuir, et créé une nouvelle eau de Cologne Dior Homme. Et, pour fêter les dix ans de John Galliano à la tête de la création chez Dior, il a composé  » La collection particulière « , un trio de fragrances inédites lovées dans des flacons d’exception (dans notre édition du 7 décembre prochain, nous reviendrons sur ce prestigieux opus).

En quoi consiste exactement votre mission en tant que directeur du développement olfactif chez LVMH ?

J’y apporte mes trente-cinq ans de métier et l’ambition de faire en sorte que nos marques soient immédiatement identifiées au nec plus ultra de la parfumerie. On a beaucoup travaillé l’image. Il est temps que l’olfactif suive et ceci grâce, notamment, à des matières premières de très haute qualité ! L’idée, par exemple chez Dior, c’est de hisser la maison de parfums au niveau de luxe qu’elle a atteint en couture. Actuellement, certains jus du marché ne comptent pas pour plus de 5 % du prix de revient. Pas de ça chez nous ! Si l’une de nos clientes achète un parfum de 70 euros, elle est en droit de recevoir la juste valeur. Mais Dior, c’est seulement la partie visible de l’iceberg. J’assiste aussi à toutes les réunions de création chez Givenchy, Guerlain ou Kenzo, avec leurs fournisseurs, leurs parfumeurs, leurs équipes de marketing, et je m’intéresse de très près à Fendi, Acqua di Parma et Pucci, trois de nos marques italiennes.

On dit que vous ne pouvez créer un parfum qu’en pensant à une femme… L’odeur, c’est un principe féminin. Les fleurs fabriquent des arômes séducteurs pour attirer les insectes et les rouler dans le pollen ! Pour moi, la composition est beaucoup plus facile lorsque j’ai une image de femme dans la tête (ou celle de l’homme qui lui plaira). Diva, je vous avoue l’avoir créé pour la femme que j’aimais alors, bien davantage que pour Emanuel Ungaro… Pour être plus clair, je pense qu’il y a des matières qui s’identifient à des carnations, à des sourires. Le patchouli, ça fait des vagues, comme les formes de Monica Bellucci !

Propos recueillis par Maïté Turonnet

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