Leurs vedettes de cinéma sont total glamour, leurs chansons sont belles à pleurer, leurs divinités sont partout… même sur les shampoings et les porte-clés. La fièvre indienne rayonne jusqu’à nous. Un bonheur simple comme bonjour.

(1) http://pschuler.club.fr/Cinema/Bollywood-Boulevard.htm

(2) www.limonastudio.com

« Si vous croyez à l’amour, alors ce cinéma est pour vous !  » avance un fan de Bollywood sur son site Web (1). Bollywood ? L’appellation officielle de la méga-industrie cinématographique indienne centralisée à Bombay. Près de 1 000 longs-métrages en sortent chaque année, principalement des romances fleur bleue mâtinées d’infâmes vengeances, tournées sous le mode de la comédie musicale. Une sorte de  » Dallas  » chorégraphié en sari et turban sauce Mahabarata qui s’achève par un rassurant happy end. Un genre pour le moins folklorique qui séduit de plus en plus les urban people occidentaux au point de susciter une véritable indiamania, chic et décalée. Inconnues chez nous du grand public, il y a un an encore (à moins d’être un téléspectateur assidu de la BBC, grand diffuseur du genre), les productions  » bollywoodiennes  » conquièrent une nouvelle frange de spectateurs. Cinémathèques, chaînes de télévision (Arte, par exemple) et festivals n’hésitent plus à leur ouvrir leurs grilles pour des rétrospectives fleuves. Les exploitants de salle parient sur des versions calibrées pour le public européen et nord-américain comme  » Coup de foudre à Bollywood  » (avec l’ex-miss monde Aishwarya Rai),  » One Dollar Curry  » ou encore  » New York Masala  » de Nikkhil Advani qui sortira prochainement sur nos écrans. C’est aussi par la bande que le phénomène a gagné du terrain, comme la réédition en DVD de  » The Party « , la comédie psychédélique de Blake Edwards où Peter Sellers incarne Hrundi V. Bakshi, un comédien indien de troisième zone qui sème le désastre dans une soirée mondaine.

 » Mes enfants et moi sommes complètement accros à « La Famille indienne », une magnifique saga bollywoodienne qui dure des heures, s’amuse Béatrice Ardisson, la célèbre illustratrice sonore française, conceptrice de  » La Musique de Paris dernière  » et de  » Kong « .  » Le plus jeune de mes enfants, qui a 8 ans, connaît le nom de tous les personnages par c£ur et peut regarder le DVD en boucle trois fois de suite !  » L’Inde et Béatrice Ardisson, c’est d’abord une histoire de c£ur. Elle s’y est fiancée au Lake Palace d’Udaipur avec l’animateur-producteur Thierry Ardisson. Chargée de créer, il y a trois ans, l’ambiance sonore d’un bar d’hôtel, tendance hindi, à Paris, la jeune femme découvre un univers musical insoupçonné.  » Pour moi la musique indienne, c’était Ravi Shankar, point « , dit-elle, citant le fameux cithariste introspectif. Le contraire des chansons populaires indiennes, romantiques, tumultueuses, tout en violons et ch£urs sucrés, l’opposé de Panjabi MC avec ses mélanges de soul, de rap et d’airs traditionnels hindous. Une plongée qui lui donnera l’envie de poursuivre l’aventure avec  » Indomania « , sorti récemment chez Naïve, soit 18 titres karmiques, tamisés dans un track-listing initial de 75 heures. Dans le style léger et dansant de la Parisienne, on y trouve des reprises surprenantes ( » mission : impossible  » par DJ Hi I One,  » Trust in Me  » û oui, la chanson du  » Livre de la jungle  » û par Susheela Raman), des perles folklo ( » Thoda Reshyam Lagta Hai « ) ou dance ( » Husan « , utilisée pour la pub de la Peugeot 206).

Toujours plus kitsch…

D’autres compilations et galettes made in India se fraient désormais une place dans les bacs, signées Talvin Singh ou Panjabi MC, deux représentants du banghra, du nom d’un courant électro world indo-britannique. Dans un tout autre genre, le Français Pascal of Bollywood a trouvé son public d’inconditionnels de Paris à Goa. A 41 ans, celui qui chante et vocalise en hindi des classiques de la variet’ indienne (apprises phonétiquement) cartonne depuis sa première grande tournée à Bombay. Article en Une du  » Times of India « , télé en prime-time, le chanteur paré de sa chemise fleurie, de sa ceinture chromée et de ses chaussures de Madras en peau de poisson, est devenu du jour au lendemain une star au pays de Gandhi. Et s’auréole d’un joli succès d’estime de ce côté-ci du Gange. Son premier CD homonyme a été enregistré sous la direction musicale de Pyarelal, le Maurice Jarre indien, maître incontesté de la musique de films dont il a composé plus de 500 thèmes.

A l’image de son cinéma survitaminé, de ses chansons kitsch et théâtralisées, l’Inde est aussi un grand producteur de signes et codes visuels sur-signifiants. Un parfum d’exotisme entêtant qui, des shampoings à l’encens, du mascara aux crèmes de jour, des cassettes vidéo aux romansphotos, se décline dans les rayons des boutiques hindi à grand renfort d’images divinatoires et de beautés sophistiquées. Une esthétique à part entière qui a donné l’idée à Sarah, documentariste à France 3 et Sophie, iconographe, passionnées par l’Inde, de créer Limona Studio pour proposer à des particuliers des portraits personnalisés à la mode Bollywood (2). De vraies fausses affiches de publicité et de cinéma de 70 x 100 cm, peintes à la main dans les ateliers de Bombay et réalisées à partir de petites photos û femme, enfant, copains, mari û fournis par les clients. Quatre fois par an les deux complices embarquent à Roissy avec une dizaine de commandes dans leur valise.  » Il y a dix ans, il y avait encore une vingtaine de petites fabriques du genre dans la ville, il n’en reste plus que deux, explique Sarah. La seule frustration pour les peintres, c’est le format des affiches. Ils sont habitués à des dimensions nettement plus importantes. Leur lieu d’expression c’est la rue.  » La prochaine commande du duo a de quoi les combler : une toile géante de six mètres sur neuf pour la ville de Lille. L’émotion en Cinémascope, c’est toujours comme ça à Bollywood !

Antoine Moreno

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content