Depuis ses célébrissimes  » Monologues du vagin « , elle est une sorte de nouvelle Eve. Dans sa deuxième pièce,  » Un corps parfait « , Miss Ensler dénonce notre penchant pour une apparence  » zéro défauts « . Au lieu de s’aimer, les femmes sont braquées sur leurs imperfections et prêtes à tout pour les effacer.

Etre féministe, c’est…

Souvent mal interprété, or les femmes ont droit à leurs corps, leurs désirs, leurs opinions et l’égalité au travail. Elles doivent apprendre à s’aimer comme elles sont. La vie féminine est sacrée et doit être honorée, car ses valeurs sont importantes.

Qu’est-ce qui vous révolte ?

La passivité des peuples, qui permettent qu’on fasse des choses en leur nom. Cette non-résistance m’attriste. A force de vouloir toujours plus, on crée plus de violence.

Qu’est-ce qui vous émerveille ?

Les gens qui ont été témoins ou victimes de violence et qui refusent de basculer dans la haine, car ils préfèrent en faire quelque chose de beau.

Le xxie siècle sera-t-il féminin ?

Ça vaudrait mieux, sinon ce sera la fin de la civilisation ! Les femmes sont plus communicatives et compassionnelles. Elles désirent nourrir leur famille, stopper la violence et protéger l’environnement. La Terre est féminine, puisque c’est notre mère à tous.

L’héroïne qui vous ressemble.

Jeanne d’Arc, parce qu’elle est à l’écoute de ses visions et qu’elle les suit jusqu’au bout.

La poésie c’est…

Métaphysique. Elle m’aide à vivre. En allant au fond de l’âme, elle contribue à me sortir de la dualité. La poésie se trouve partout : dans la beauté de Paris, les petits gestes, la façon de se toucher… On loupe tant de choses à cause de la course à la consommation !

Pourquoi l’humour est-il essentiel ?

Sinon, mes écrits seraient didactiques. Il est vital de rire des autres et surtout de soi.

Vos  » Monologues  » ont-ils libéré les femmes ?

Le simple fait de pouvoir parler du vagin est déjà une vérité sur soi. Il n’a pas libéré les femmes, mais leur parole. Je suis émue par celles qui m’ont parlé de leur viol ou de leurs simulations. Certaines n’ont jamais connu d’orgasme.

Vous dénoncez la violence faite aux femmes, mais  » Un corps parfait  » n’aborde-t-il pas celle qu’elles se font à elles-mêmes ?

Les femmes sont effectivement complices de ce malheur qu’est le corset invisible. Au lieu de regarder le monde, elles fixent leur corps. Elles y consacrent tant de temps et d’efforts. Cette pièce leur dit :  » Aimez votre corps, il n’a rien de cassé . »

L’amour est-il le meilleur chirurgien esthétique ?

J’ai horreur de ce fantasme. L’amour ne peut pas mener au bonheur absolu. Le meilleur remède ? Apprendre à vivre par soi-même, sans compter sur l’arrivée du prince charmant. Rien ne peut être réparé tant qu’on n’a pas conscience qu’on existe.

Que voyez-vous dans le miroir ?

La société nous encourage à nous mirer de façon narcissique, or il y a des choses plus importantes que ça. Je n’ai pas changé au point de vouloir m’y regarder pendant des heures.

Qu’y a-t-il de beau en vous ?

Je suis heureuse sur le plan psychique. Quant au plan physique, il fait partie d’un  » package  » à prendre ou à laisser ( rires).

 » Un corps parfait « , par Eve Ensler, Denoël & D’ailleurs, 135 pages.

Propos recueillis par Kerenn Elkaïm

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