Barbara Witkowska Journaliste

Sobriété et élégance ou fantaisie colorée. Telles sont les deux tendances qui dominent les collections de chemises de la mode masculine automne-hiver 04-05.

Carnet d’adresses en page 122.

Chez les grands noms de la couture souffle l’esprit  » néominimaliste « . Une très grande simplicité est de rigueur. Les coupes sont irréprochables, les matières nobles conjuguent cotons, popelines ou voiles de coton de très belle qualité. A cette base sobre et dépouillée se greffent des petites touches de fantaisie et des détails sophistiqués. Hedi Slimane pour Dior, par exemple, préfère des tout petits cols pour une allure plus singulière. Il introduit, aussi, des cols inversés : pliés vers l’intérieur. Une petite abeille brodée, symbole de Dior, se pose sur de nombreux modèles et les inscrit dans la prestigieuse tradition de la maison. Les coupes sont très cintrées au niveau de la taille. Les manches, rétrécies au niveau des épaules, épousent étroitement les bras, tout en les serrant légèrement. Etonnamment, ce concept, qui est aussi adopté par les joueurs de tennis, donne plus d’aisance aux mouvements. Les coloris ? Le blanc joue les vedettes, mais les rayures reviennent en force. Elégantissimes, elles optent pour différentes largeurs, se déclinent en bordeaux, gris ou noir et s’accompagnent, parfois, d’une fine rayure en pointillé.

Chez Louis Vuitton, les volumes sont légèrement plus amples. Pour la journée, une chemise blanche animée d’une élégante rayure grise sera parfaite. Le soir, on opte pour le comble de l’élégance traditionnelle : la chemise immaculée, inspirée d’une chemise de smoking. Elle intègre un subtil plastron, s’accessoirise d’une lavallière et d’une grosse ceinture en cuir matelassé. Détail très raffiné, les boutons pressions sont en acier brossé. Givenchy interprète chez l’homme le concept de  » twist « , un style intemporel et très sélect, agrémenté d’un discret clin d’£il fantaisiste. Le tissu est renforcé au niveau de la rangée des boutons pour former une  » cravate « , fondue dans la matière. La chemise rouge vif se porte avec une écharpe argentée et soyeuse, savamment drapée sur la poitrine. Ce détail glamour contraste avec élégance avec la tenue sportive. Dans la collection  » ville « , Ermenegildo Zegna multiplie les rayures. Nouvelles et exclusives, elles sont très marquées et très colorées. Les harmonies osent les associations de marron, de bordeaux, de rouge et d’orange ou encore de gris, de grège, de bleu et de turquoise. Raffinement italien oblige, les cols sont très ouverts et les poignets sont souvent mousquetaire, à porter avec des boutons de manchette. Plus cintrée, la ligne  » Z  » de Zegna privilégie les cotons unis ou à micro dessins ou encore des rayures jacquard à l’aspect velours. Le tout décliné dans des coloris affirmés, le rouge, le turquoise, le marron, le noir et le blanc.

Fantaisies de créateurs

Pour casser la morosité hivernale, les créateurs les plus pointus rivalisent d’imagination et d’ingéniosité pour donner du punch à leurs collections avec des imprimés audacieux et des couleurs qui ne passent vraiment pas inaperçues. La palme de l’originalité revient à Versace, griffe show of et glamour par excellence. Des imprimés psychédéliques et des patchworks vibrants rappellent les années 1960 et 1970. Les matières sont lisses, satinées et  » coulantes « , à effet légèrement laqué, pour plus de confort et de sensualité. Portée en solo, la chemise est accessoirisée d’un foulard coordonné. Accompagnée de pulls, gilets ou manteaux, elle se permet les associations les plus fantaisistes. Les couleurs vives virevoltent et les imprimés s’entrechoquent. Les ensembles créent des effets visuels vraiment peu banals. Timides, s’abstenir ! Dolce & Gabbana, le duo d’enfants terribles italiens, interprète le style  » flower power « , revisité en version IIIe millénaire, plus épurée et plus sophistiquée. Fleurs généreuses, motifs cachemire ou branchages subtils s’épanouissent sur des fonds noirs. Les palettes chromatiques bleues, beiges, roses, pourpres ou marrons jouent les ambiances très masculines. Glissées à l’intérieur des pantalons en toile ou en velours, les chemises dessinent des silhouettes confortables et décontractées. En version plus chic, on ajoute une cravate unie et une veste assez cintrée en velours lisse. Pour des occasions plus  » fun « , on adopte des cocktails chromatiques plus vifs et plus lumineux, on enfile par-dessus un blouson à capuchon parsemé de motifs graphiques et on accompagne le tout d’un jeans baggy.

Paul Smith est le chantre de l’élégance britannique, classe et classique, pimentée d’une pointe d’humour. La célèbre rayure multicolore, exploitée chez la femme et chez l’homme, déclinée dans toutes les largeurs et dans toutes les couleurs, était sa marque de fabrique exclusive. Jusqu’au jour où toute la concurrence s’en est emparée et l’a abondamment  » pillée « . Jamais à court d’idées, Paul Smith invente une nouvelle rayure. Elle est tout simplement noire et se pose sur les poignets d’une chemise blanche ou encore sur les manches d’une chemise bleu ciel. Chic et simple, voilà un détail qui fait la différence. Par ailleurs, le créateur londonien interprète à sa façon des figures classiques de carreaux et d’imprimés psychédéliques. Les modèles, animés de couleurs fraîches, ont des coupes confortables, pas trop cintrées, peuvent aussi se glisser sous un blouson en jeans ou sous une veste en cuir. Chez C’N’C, la nouvelle ligne de Costume National, le modèle phare arbore un col inspiré de la tunique Mao. La chemise blanche a pour seul décor des lignes noires continues ou pointillées, imprimées à la façon d’un plastron.

Les basiques revisités

Chez les jeunes créateurs, la chemise joue le premier rôle dans la garde-robe masculine. Le Parisien Vincent Dufresne est passionné par la couleur et par l’art contemporain. Dans sa boutique et sous la griffe Charles Dufresne, il propose une collection très ciblée de chemises à cinq boutons, de tuniques et de tee-shirt, le tout en coton mercerisé de très belle qualité. La matière ressemble à de la maille très fine et offre beaucoup d’aisance et de confort. Les formes ? Elles vont à l’essentiel et laissent s’exprimer la couleur, car la couleur  » rassemble les gens « . Il y a les classiques, le noir et le blanc. Le gris métal, l’ébène, le mastic et le bleu marin ont été revisités par le pinceau de Vincent Dufresne. Des couleurs plus vives, plus inhabituelles, tels le pourpre, le vert acide ou le violet font leur apparition au fil des saisons. Cet hiver, un rose strident donnera du pep aux costumes gris anthracite. Ce style  » basique urbain  » s’adapte à toutes les situations. Pour la journée, une chemise grise ou blanche, accompagnée d’une veste  » lookée  » et cintrée est parfaite pour une allure très chic. Le soir, on choisit une couleur vive, le pourpre par exemple. Elle sera du plus bel effet sur un pantalon clair et souple.

Jeroen Van Tuyl, accorde, dans ses collections de prêt-à-porter, une attention particulière à la chemise. Le jeune Néerlandais s’adresse, avant tout, à un homme jeune, tourné vers le futur, ne dédaignant pas pour autant une pointe de romantisme et de nostalgie. Ses coupes sont cintrées, près du corps, idéales à porter au-dessus d’un pantalon. Si les tissus classiques et naturels se taillent la part du lion, Jeroen Van Tuyl n’hésite pas à flirter avec des matières technologiques, pour obtenir des touchers inédits ainsi que des surfaces plus lisses et satinées, voire métallisées. Le blanc et le noir restent des valeurs incontournables de toutes les collections. Côté plus fantaisie, notons la présence, pour cet hiver, de roses très pâles et d’un turquoise vif.

Les indémodables

Ralph Lauren joue la carte de l’élégance masculine chic, classique et solidement ancrée dans la tradition. Les chemises sont blanches ou de couleurs pastel (dont un vert clair et doux), unies ou rythmées de fines rayures. Les cols, souvent percés, sont reliés, en dessous de la cravate par une pince, pour une allure plutôt habillée. En version plus décontractée, on remplace la cravate par un n£ud pap’ fantaisie. Chez Façonnable, les chemises sont taillées, près du corps, en popeline ou en twill de coton. Pour cet hiver, une très vaste palette de rayures, de petits ou de grands carreaux sont à l’honneur. A noter, aussi, une multitude de motifs tissés exclusifs, déclinés dans des coloris métallisés très raffinés.

Barbara Witkowska

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