La couleur des sentiments

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Isabelle Willot

Vous êtes-vous jamais demandé quelles couleurs avaient vos souvenirs? On sait qu’en la matière, le cerveau humain est loin d’être fidèle.

Alors que j’étais en reportage place du Tertre, à Montmartre, pour un article de ce magazine, j’ai soudain repensé au petit tableau que mon père m’avait ramené d’un séjour à Paris lorsque j’étais enfant. Dans ma mémoire, la fleur aux contours floutés qu’il représentait s’est parée de tons rouges et verts un peu délavés, à la manière de ces filtres Instagram qui font paraître la vie plus belle. C’est ce procédé utilisé par Jean-Pierre Jeunet lors du tournage du Fabuleux destin d’Amélie Poulain, il y a vingt ans, qui rend ce « film doudou » si intemporel puisqu’il a les nuances des instants, même un peu tristes parfois, que l’on ne veut pas oublier.

Des couleurs, Violette Serrat, en a aussi plein ses souvenirs, comme elle nous le révèle dans ces pages. Dès la maternelle, la jeune directrice de la création maquillage de Guerlain a joué du crayon pour surmonter ses craintes. A la manière d’Amélie, elle s’est raconté des histoires remplies d’arcs-en-ciel, rêvant de voir apparaître le rouge des chaussures de Dorothy sur la bouche des mamans à la sortie de l’école. Le pouvoir enchanteur du make-up, cette autodidacte mordue de pigments y croit, elle qui nous pousse à tout oser puisque dans son art rien ne dure.

L’éphémère a du bon, surtout par ces temps de fêtes qui s’invitent à nouveau en pointillé. Il ne tiendra sans doute qu’à peu de choses – une virgule espiègle dessinée au coin des yeux, un cadeau qui fait mouche, un mot doux murmuré à l’oreille – pour qu’elles nous rendent un jour nostalgiques de cette étrange époque, sertie de la couleur de l’émotion.

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