« I l n’y a pas de mode si elle ne descend pas dans la rue « , disait Gabrielle Chanel. à l’évidence, les créateurs qui ont gardé à l’esprit cette belle leçon d’humilité partent avec une longueur d’avance dans la révolution de velours qui chiffonne actuellement l’empire du vêtement. Miuccia Prada fait sans aucun doute partie de ces happy few. Dès la fin des années 70, et alors que les grands noms de la maroquinerie ne jurent que par le cuir, c’est en effet en pariant sur le Nylon qu’elle permet à l’entreprise fondée par son grand-père en 1913 de rafler la mise ( lire son interview en pages 84 à 87). Ce qui assure aujourd’hui encore la pérennité de la griffe transalpine ? Un juste dosage entre un classicisme de bon aloi et un zeste d’insolence, qui injecte du glamour dans un look Deschiens ou glisse une socquette dans une sandale à talon – un des fashion statements de la saison ( lire en pages 120 à 123). Une façon de rester connecté à la réalité. Le vrai défi à relever aujourd’hui par la planète luxe.

Car quand un univers évoluant en vase clos est victime de ses propres excès, il est condamné à disparaître ou à se métamorphoser. éjectée de son piédestal par un séisme financier dont on redoute encore les secousses secondaires, la mode n’a donc pas d’autre choix que de s’adapter pour subsister. Première mesure de survie déjà mise en place par un (star) système en voie d’extinction : retrouver sa raison d’être initiale. à savoir, créer des vêtements que  » les gens « , cette masse d’acheteurs anonymes trop longtemps méprisée par les hautes sphères du luxe, auront envie de se mettre sur le dos. Et donc d’acheter.

Que ce soit en son nom propre ou pour Vuitton, dont il assure la direction artistique, Marc Jacobs ( lire son interview en pages 64 à 67) devrait ainsi franchir haut la main les obstacles que la crise a glissés sur les podiums. Car, en trame de sa réussite cousue d’or – grâce à lui, les résultats de la griffe au Monogram doublent tous les cinq ans -, on retrouve un fil rouge : ne pas laisser s’effilocher le lien entre ceux qui font la mode et ceux qui la portent. Au point que le street style ( lire en page 50 à 56) est devenu une des sources d’inspiration principales du styliste américain. Dans son vestiaire printemps-été 2010, comme chez bon nombre de créateurs, des couleurs sorbet, des imprimés mixés, du jeans décalé ( lire en pages 26 à 48). Et du (très) mini. Comme si la rue lui avait murmuré  » la vie est trop short pour se prendre la tête « . Message reçu.

Delphine Kindermans, Rédactrice en chef

« éjectée de son piédestal par le séisme financier, la mode n’a pas d’autre choix que de s’adapter pour subsister. »

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