Dani, l’ex-égérie des sixties et Etienne Daho, le petit Prince d’Oran, sont de retour, comme deux boomerangs. Amis, complices, partenaires, ils ont accepté pour Weekend Le Vif/L’Express de se prêter au jeu des interviews croisées.

CD  » Tout dépend du contexte « , chez Distrisound. Dani sera en concert début 2004 au Botanique, à Bruxelles. Tél. : 02 218 37 32.

Dani, la caméléone

Mannequin en vogue dans les glorieuses sixties, copine de stars (les Delon), actrice chez Truffaut ou Chabrol, patronne de club, amoureuse des roses, noctambule par vocation et chanteuse à l’occasion, Dani a fait un come-back très remarqué en 2001 en reprenant le  » Comme un boomerang « , de Gainsbourg, avec Etienne Daho. Son nouvel album  » Tout dépend du contexte « , en partie réalisé avec son ami Etienne, contient plusieurs titres accrocheurs où la voix de Dani la fumeuse fait de jolis ronds sur des mélodies attachantes. Chez Dani û Daniele Graule née à Castres le 1er octobre 1944 û il n’y a pas de fumée sans feu…

Weekend Le Vif/L’Express : Daho vous a-t-il sauvé la vie ?

Dani : C’est un visionnaire Etienne, c’est toujours bateau de dire que c’est le petit ou le grand frère qu’on aurait aimé avoir, mais lui a été le grand frère qui m’a remise sur la planète musique !  » Comme un boomerang  » est tombé à un moment où il fallait que je fasse quelque chose, pour ma tête surtout. Il a récupéré cette chanson sur une étagère et il voulait au départ que je la chante toute seule, mais comme dans les maisons de disques, on ne signe pas avec quelqu’un de mon âge à moins qu’il n’ait une carrière… Et je n’ai pas de carrière, j’ai des rendez-vous d’amour avec des gens qui ont des chansons, des roses ou des films.

Quelle est votre définition de l’intimité ?

Chaque fois que je suis confrontée à un échec, j’essaie de savoir pourquoi. Un chagrin ou canaliser sa vie de femme, cela fait partie d’un processus très intime.

A quoi peut bien servir un disque ?

Un disque est fait pour rendre la vie un peu légère… Il doit susciter des images, des cartes postales, des sensations… Je l’ai fait léger parce que si on est bien dans la vie, on fait de la musique. J’ai envie de vivre des moments incroyables, ma mission sur la Terre est d’amener un peu de légèreté et, je ne sais pas si on peut dire cela à mon âge, un peu de fraîcheur.

Dans la vie de tous les jours, vous faites-vous votre religion ?

Je crois en Dieu, je prie beaucoup, je médite. Je viens d’une famille catholique. Chacun fait ce qu’il veut avec son propre Dieu. Mais moi, j’en ai besoin ! Besoin de m’échapper. Le travail sur la respiration aussi, amène beaucoup de sérénité ! On est avec les étoiles ! Besoin de thérapie ? Je me vois très mal aller chez quelqu’un lui raconter ma vie. J’essaie de trouver toute seule : le moment arrive toujours pour s’expliquer sur quelque chose !

Votre voix, c’est aussi le résultat des nuits dehors. Vous avez beaucoup vécu en noctambule !

Je n’ai plus que rarement le goût de la nuit, tel que j’ai pu l’avoir : sur le fil du rasoir ! Cela peut basculer. On a le neurone ou la case qui se met en route la nuit et qui fait qu’on croit pouvoir tout faire ! Qui vous dit que je ne le referai pas ? J’aurais bien aimé voler à Etienne une chanson qui est sur son nouvel album et qui s’appelle  » Le Jour et la nuit  » et qui est absolument magnifique ! J’ai tout essayé mais ça n’a pas marché !

Etes-vous capable d’autodérision ?

Oui, tout à fait ! ( Dani chantonne un titre de Chamfort.)  » Le Flash-back d’un has been super…  » J’adore Chamfort, c’est un ami. On est tellement heureux de se retrouver dans des situations comme celles-là. Alain est un mélodiste magnifique : j’ai eu la chance qu’il accepte de faire un titre sur mon disque ( » Reine d’Autriche « ).

Daho définit les relations amoureuses comme un rapport bourreau/victime !

Peut-être pas à ce point-là, mais comme je ne suis que dans la passion, c’est forcément terrible ! Je ne sais pas si c’est une question d’être sage, raisonnable, mais quand j’aime les gens, j’ai tout le temps envie d’être avec eux ! Je ne peux pas me maîtriser sur un élan de générosité… Mes fils ont un regard de garçons sur leur mère et là, ils commencent à comprendre que ce travail musical est autre chose que des paillettes, que ce n’est pas du superflu. Parfois, mes fils sont cruels. Ils sont fiers, mais ils ne le montrent pas trop. Quand je dis à ma mère  » Je prépare un disque, je vais chanter « , elle me dit  » A part ça, qu’est-ce que tu fais ? » ( rires).

Quel a été le moment le plus sombre de votre vie ? Quand vous avez décidé, par exemple, de vous libérer de l’héroïne à laquelle vous étiez très dépendante ?

L’héroïne, c’est arrivé au travers de quelqu’un dont j’étais amoureuse et cela s’est installé entre nous. Pendant trois ans. J’ai eu la chance d’avoir des enfants à ce moment-là. J’étais protégée, les gens qui m’ont aidée alors sont toujours dans ma vie et j’ai tout fait pour regagner leur confiance… Pour en sortir, je n’ai pas eu le choix. Ou j’allais en unité psychiatrique à Sainte-Anne à Paris, ou je faisais une dépression nerveuse en prenant des cachets toute ma vie. J’ai décidé alors de créer un magasin de roses, dont je m’occupe toujours aujourd’hui.

Comment consommer la vie ?

Pour ce disque, j’ai rencontré des gens qui sont dans le désir, dans l’amour. Ce qui se passe maintenant est donc une émotion très forte, très violente, que je suis obligée de repartager. Cela me fait même plaisir de parler de ces chansons-là, même d’aller à la télévision. Prendre plein pot ce qui vient, c’est ce que j’essaie de faire.

Vaniteuse ?

Je ne crois pas. Mais je suis fière d’avoir fait ce disque, c’est un exploit pour moi ! Je ne pensais pas faire une carrière de chanteuse maintenant, non.

Qui sont vos héros, vos amis ?

Les Stones, quand on allait à Londres, on les croisait, c’était leurs débuts, puis à Nelcotte, la Côte d’Azur, Bianca, Jane, je n’ai pas eu des rendez-vous artistiques avec eux. Une fois Ron Wood a essayé de me faire des chansons, mais j’étais sans contrat. Des gens magnifiques.

La question perso : qu’évoque  » Comme un boomerang  » première période ?

En 1974, Pompidou étant mort, la France a annulé sa participation à l’Eurovision. Un an après, quand on me la re-propose, je demande à Serge de faire la chanson et il me dit :  » Cela fait dix ans que j’ai fait France Gall avec ô Poupée de cire  » en 1965, allez banco !  » On s’est fait l’Eurovision. Donc j’allais rue de Verneuil, il y avait Kate, Jane, Charlotte bébé, les chiens. Toute une époque… n

Propos recueillis par Philippe Cornet n

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