Des villages perchés lumineux, de douces collines, le Beaujolais méridional a des airs d’Italie, mais le terroir est bien français, fertile pour des vignes renommées. Gastronomie, art de vivre, patrimoine, une région qui aime la vie, comme nous !

A moins d’être lyonnais, peu de gens, finalement, connaissent le Beaujolais. Celui avec une majuscule, car l’autre, avec un petit b, est célébré jusqu’au Japon. C’est au sud que se révèlent les trésors d’un terroir qui, au gré des saisons, arbore sa capeline d’or, de vert et de pourpre. Au pays dit  » des Pierres-Dorées « , surnommé ici la  » petite Toscane « . Un feston de villages coquets drapés dans leurs habits de lumière, alchimie de calcaire jaune, de grès bigarré et de marne irisée. Bagnols d’abord, joyau baroque où il fait bon flâner, les yeux sans cesse sollicités par d’infimes détails architecturaux. Ici, une plaque évoque un lointain passage de Madame de Sévigné. Là, une grappe de raisin sculptée dans la pierre rappelle que nous sommes déjà en terre viticole. Et puis, bien sûr, il y a ce château des xve et xviie siècles, gonflé de tours aux belles rotondités. Franchir son pont-levis, pour savourer un repas gastronomique ou passer une nuit royale, c’est s’offrir une parenthèse de luxe et de sérénité. Plus loin, ne manquez pas Jarnioux, imposante place forte dorée, et Charnay, pimpant village fleuri. Si Morancé somnole un peu, son château du Pin constitue une belle adresse hôtelière à un battement d’aile du golf de Lucenay. Notre village médiéval favori ? Le Florentin Oingt. Des enseignes à l’ancienne invitent les promeneurs, nombreux le week-end, à franchir le seuil des boutiques qui s’égrènent au-delà de la vieille porte de Nizy. Un entrelacs de ruelles pentues mène à la tour donjon du xiie siècle renfermant un intéressant musée médiéval. On se familiarise avec la grande mystique Marguerite d’Oingt, religieuse et poétesse du xiiie siècle, qui fut une des premières à écrire en français. Oingt abrite aussi de talentueux artistes, telles Christine Poirier, maître tisserande, qui crée notamment pour la maison Chanel ; Annie d’Oréfice, dont les céramiques s’exposent partout en France ; et la restauratrice de tableaux anciens Dominique Juban.

Sentes buissonnières

Vers le nord se découvre la capitale caladoise, Villefranche-sur-Saône. Animée de multiples commerces, elle est rythmée par un chapelet de façades médiévales et Renaissance où s’entremêlent maisons à colombages avec fenêtres à meneaux en encorbellement. A deux pas se tient chaque lundi, dans les grandes halles colorées, un des plus vieux marchés de France, à ne pas manquer pour la joyeuse cacophonie qui y règne. Depuis peu, la ville se pique d’art contemporain avec son musée Paul-Dini, ultradesign, dédié aux artistes de Rhône-Alpes. Les vignobles qui s’étirent aux portes de la ville forment un tableau impressionniste ponctué de cadoles, petits abris de vignerons en pierres plates où l’on se retrouve parfois pour partager fromage de chèvre et saucisson. La route godille de plus en plus au fur et à mesure que l’on s’approche de Vaux-en-Beaujolais. Un village pittoresque à flanc de colline, qui s’est un jour reconnu dans Clochemerle, le roman de Gabriel Chevallier. En contrebas, Le Perréon, un village posé au creux de collines soyeuses et rondes, comme celle dite  » de la Madone « . Pour se fondre dans le magnifique décor alentour, il faut emprunter les sentiers de randonnée qui s’égaillent au travers des vignobles. Par endroits, des belvédères offrent une vue époustouflante sur les coteaux et même le mont Blanc. Par les sentes ou par une route vicinale, on gagne des lieux plus confidentiels mais émouvants. Salles-Arbuissonnas-en-Beaujolais, avec sa corolle de vignes déployées tout autour, abrite un cloître médiéval où séjourna au xviiie siècle la comtesse chanoinesse Suzanne de Lamartine du Villars, future mère du poète… A Montmelas-Saint-Sorlin, on admire un château digne de celui de la Belle au Bois dormant.

Le royaume des crus

Blottie sur l’Ardières, un affluent de la Saône, à la frange du Haut Beaujolais, Beaujeu conserve les belles manières de son ancien statut de capitale de la région. Prenez le temps d’y rencontrer un grand moulinier à l’£uvre, Jean-Marc Montegottero, dont les huiles inédites parfument de prestigieuses tables étoilées de l’Hexagone. Pour allier plaisirs historiques et dégustations de cuvées spéciales, il faut s’enfoncer dans le royaume des crus au château de Corcelles, petit bijou orné de tourelles à poivrière, de donjons et d’oubliettes. A quelques courbes de là, le château de Pizay invite les flâneurs à découvrir son ravissant jardin. Dessiné par Le Nôtre, il forme un échiquier où des ifs vieux de quatre cent cinquante ans figurent les pièces du jeu. Au-delà, le regard s’envole vers le mont Brouilly, joli mamelon surmonté de la chapelle Notre-Dame-du-Raisin qui sert de point de repère aux randonneurs. A Chénas, le château Chassignol arbore des airs de diva italienne. Encensé par Lamartine, l’adorable bourg de Saint Amour constitue l’ultime étape sur les routes beaujolaises, puisque au-delà commence le Mâconnais. Il s’active autour de ses crus et de sa superbe Auberge du Paradis : un chic sobre, une déco chinée de belle facture et un restaurant sur la piste des étoiles…

Sandrine Gayet – Photos : Pascale Béroujon

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