Symbole de légèreté, de romantisme, de pureté, il met en relief la matière, souligne les détails et renouvelle les codes de l’élégance. Le blanc ? Un pas vers la perfection.

Exposition  » Yohji Yamamoto, Juste des vêtements « , musée de la Mode et du Textile, 107, rue de Rivoli, à 7501 Paris. Jusqu’au 28 août prochain.

Parfait contrepoint des imprimés fleuris et psychédéliques, le blanc s’impose ce printemps. Même les marques qui ne juraient que par le  » Black is black « , tels Costume National et Ann Demeulemeester, délaissent leurs couleurs traditionnelles. Pour Jean-Jacques Picart, consultant en mode,  » cet engouement répond à un besoin profond de renouer avec la légèreté et permet aux créateurs de donner libre cours à toutes les interprétations « . Symbole de l’innocence, le blanc devient la couleur du romantisme et du naturel, magnifiant une grâce virginale à la façon de Claude Jade (dans  » Mon oncle Benjamin « ), dont la blouse en voile de coton laissait transparaître la poitrine naissante. Pour Hermès, Jean Paul Gaultier n’hésite pas à nouer l’étoffe d’un simple cordon.

Pour le 20e anniversaire de sa société, Dries Van Noten a lui aussi joué des transparences avec des blouses aux manches bouffantes portées sur des jupons volantés tout aussi crayeux. Et l’allure n’en semble que plus féminine…

Bricolé à la manière des seventies, le blanc met également en relief le côté brut des matières naturelles. En crochet, en tricot, voire en macramé, il épouse une allure sur une robe longue pour Chanel. Il se joue de la broderie anglaise et du tricot chez MaxMara. Pour Louis Vuitton, le blanc se porte même en pompon comme un clin d’£il à une silhouette de lolita japonaise. Et en accessoire, le sac tricoté et  » logotomisé  » LV paraît plus précieux que jamais.

Interprété à l’antique, le blanc signe également les drapés grecs. Créés en hommage à Madame Grès et très en vue cette saison, ils sculptent les corps des femmes, soulignant tout particulièrement les seins et les hanches chez Marcel Marongiu, Lanvin ou Prada. Ultraféminins, ils ne supportent aucun écart de traitement, aucune once de lourdeur. Froncée à l’infini sur un tulle rigidifié mille fois plissé, l’opaline juponne sous les doigts de fée de Giambattista Valli, qui signait pour Ungaro sa dernière collection de prêt-à-porter. Signe de distinction, la blancheur symbolisait la candeur ou l’appartenance aux classes sociales aisées. La collection Givenchy, dans ses tenues immaculées, multiplie les références à Audrey Hepburn et à son allure de ballerine.

En souvenir des cols blancs que l’on distinguait, au xxe siècle, des cols bleus (issus du monde ouvrier), Ralph Lauren décline la teinte emblématique de la  » wasp society  » pour l’essentiel de sa collection, dans un style  » navy  » où s’entremêlent jupes droites, pantalons à pont, fourreau immaculé de satin et veste en angora portée croisée mais profondément décolletée. Mais que l’on ne se trompe pas, le blanc est loin d’être passéiste. Porté flou et fluide sur des soies, il paraît d’une grande modernité chez Stella McCartney et Chloé. Satiné en jupes évasées pour Veronique Branquinho, coupé au carré par Rick Owens, déstructuré par As Four, il se fait bouillonné, roulé et tressé avec Watanabe. Ann Demeulemeester et le jeune créateur américain Benjamin Cho vont même jusqu’à brûler la cotonnade pour mieux exprimer sa violence potentielle. En cuir zippé sur les sacs Dior, il devient futuriste et laqué chez Pierre Hardy avec des bottines que n’aurait pas boudées Barbarella.

Enfin, la chemise blanche. Signe par excellence de la distinction, pièce maîtresse de toute garde-robe qui se respecte, héritage historique des camisards (qui se reconnaissaient par son port par-dessus les vêtements), elle fait l’objet de deux réinterprétations remarquables cette saison. Yohji Yamamoto, dont on va pouvoir admirer, durant le printemps, au musée de la Mode et du Textile (1), à Paris, le travail de maître réalisé depuis ses premiers défilés dans les années 1980, poursuit son approche expérimentale de l’allure androgyne. La chemise s’allonge, tombe jusqu’aux pieds, traîne plissée sur le côté. Col relevé, manches géantes, ou au contraire porté court en corset, le blanc consacre la joie du créateur à renouveler les codes de l’élégance contemporaine.

Quant à Alber Elbaz, qui signe pour Lanvin la plus belle collection de la saison, il démontre en un vêtement toute sa virtuosité. Regardez, elle est simple à première vue, ses manches bouillonnent, son col s’évase. Scrutez son dos. La construction fascine. Trois coutures plissées font toute la différence et le travail du tombé paraît sans pareil, l’allure est enlevée. La structure est pure, simple et parfaite.

Isabelle Lefort

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