Un bébé, une nouvelle vie ! L’heureux événement booste certaines mères au point de leur donner envie de lancer leur propre affaire. Ces  » mompreneuses  » sont de plus en plus nombreuses. et davantage encore sur la planète mode.

Elle vient d’accoucher et elle est déjà pendue à son GSM, entre deux biberonsà C’est ça, être une femme d’affaires.  » C’est un peu le piège, avoue-t-elle. On démarre une activité pour s’occuper. Et puis, finalement, on se retrouve vite prise dans une spiraleà Mais c’est tellement passionnant !  » En 2006, alors qu’elle vient d’avoir son deuxième enfant, la créatrice de mode Cordelia de Castellane – ex-Ungaro -décide de créer, avec sa cousine Ségolène Gallienne – la fille du magnat belge de la finance Albert Frère – une griffe enfantine.  » Quelque chose de raffiné, à prix abordables, dans un esprit bohème-chic.  » CdeC voit le jour. Quatre ans plus tard, les deux jeunes femmes disposent d’une dizaine de boutiques – dont une qui ouvre à Anvers le 1er septembre prochainà

La styliste est ce que l’on appelle une mompreneuse – contraction pour maman (mom) et entrepreneuseà Et elle est loin d’être la seule. De plus en plus de femmes entament en effet une activité d’indépendante suite à la maternité. Et le secteur qu’elles choisissent est souvent lié à ce nouveau rôle parental : conception de vêtements pour bébés, de mobilier extra-small, etc. Aux États-Unis, ces femmes mi-mères-mi-gestionnaires se sont fédérées et sont plus de sept millions ! Cette vague de mompreneuses a essaimé en France où un réseau similaire a vu le jour, à l’initiative de Céline Fénié, patronne d’un e-store d’articles de puériculture.  » Quand j’ai monté cette société, je me sentais isolée. J’ai donc mis au point un blog et je me suis rendue compte que nous étions nombreuses à tenter pareille aventure et qu’il fallait unir nos forces pour échanger des idées, se former, etc. « , résume la Française. Aujourd’hui, son site et son blog comptent 1 500 membres et l’association Mampreneurs qui en découle déjà 350 adhérentes.

Objectif flexibilité

En Belgique, une telle organisation n’existe pas. Mais plusieurs initiatives permettent aux femmes chefs d’entreprise – avec ou sans enfants – de se rencontrer et de participer à des activités communes. C’est le cas de Diane, initié par l’Union des Classes Moyennes, ou encore de Jump, une structure fondée par Isabella Lenarduzzi, dirigeante d’une boîte d’organisation d’événements.  » Statistiquement, il y a plus de femmes diplômées que d’hommes. Or, il y en a moins qui sont chefs d’entreprise. Il y a donc un problème au niveau micro-économique, analyse-t-elle. Nous sommes plus nombreuses à travailler que par le passé, mais nous gardons aussi la charge familiale, ce qui fait de nous des superwomen forcées. « 

C’est pour mieux cibler les obstacles rencontrés par celles-ci que Jump a réalisé, au printemps dernier, une enquête sur l’entreprenariat féminin. Cette recherche met notamment en avant que plus de 35 % des femmes qui se lancent ont entre 35 et 44 ans et que 70 % d’entre elles ont des enfants. Un tiers de l’échantillon a même des petiots de moins de 5 ans.  » Beaucoup de mamans veulent, après une grossesse, se réorienter, confirme Isabella. Travailler à la maison permet d’être plus flexible et de porter toutes ses casquettes.  » Le tout est de trouver le juste équilibre.

 » Il faut pouvoir mettre des barrières : faire comprendre aux enfants qu’ils ne peuvent pas franchir la porte du bureau à tout prix, et déculpabiliser de ne pas s’en occuper tout le temps. Sinon l’activité ne peut pas décoller « , nuance Isabella.  » C’est une question d’organisation « , résume Bernadette Pâques, maman d’un garçon de 11 ans et boss de Company Writers, une boîte de traduction et réécriture à destination des entreprises. Cette dernière a reçu le prix Equi-woman 2010, décerné, à Bruxelles, lors du salon Entreprendre au féminin, et qui récompense une femme qui a su concilier vies privée et professionnelle.  » Ce n’est pas toujours évident de faire des journées de dix ou douze heures, confie-t-elle. Mais, en travaillant à domicile, je suis là pour mon fils en cas de problème. Et il est en première ligne pour voir ce que je fais et comprendre l’importance du travail dans la vie. « 

Boss virtuel

Parmi les activités les plus prisées par ces mompreneuses, on retrouve les sites de ventes en ligne. Selon une enquête réalisée, en juin dernier, par l’association française Mampreneurs, 43 % de ses membres seraient e-commerçantes, contre seulement 4 % de créatrices. Un nombre incalculable de site ont vu le jour récemmentà L’une propose du matériel de cuisine pour les petits (www.cookinette.fr); l’autre – inspirée par son expérience personnelle avec sa fille – vend du matériel pour les enfants handicapés (www.canailles-a-roulettes.com) et une troisième propose un site pour commander de quoi réussir un goûter d’anniversaire (www.mylittleday.fr). Anne-Sophie Renevier, une maman célibataire toulousaine a, elle, il y a peu, initié un e-store de vêtements de créateurs (www.enmarge.fr) pour que  » tout le monde ait accès à des collections pointues « . Sur son site, on retrouve des marques belges telles que Dominique Ver Ecke et, dès cet hiver, Max & Lola.  » L’e-commerce me permet de travailler de partout. Je peux déménager du jour au lendemain, pour aller prendre l’air à la campagneà Et l’investissement de départ est raisonnable « , conclut-elle.

Un autre créneau porteur est la mode pour les kids. De nombreuses marques sont en effet nées de l’envie d’une maman d’habiller ses enfants autrement. C’est le cas de We Were Small ( lire ci-contre) et de Petite Chérie-Obéron chez nous ; ou encore de la toute nouvelle griffe française Bonnie & Claude, initiée par uneà journaliste. Si parfois ces nouvelles venues dans la mode enfantine sont des pros – comme Cordelia de Castellane – il s’agit très souvent d’autodidactes. Comme Sabine Van Driessche, créatrice belge de Petite Chérie-Obéron, qui a appris la couture sur le tas et a commencé par imaginer des modèles pour ses enfants avant de démarrer son activité, d’abord via des ventes à domicile – une méthode très en vogue chez les mompreneuses.

La tendance est donc là. Reste à se demander si, à l’heure où les hommes commencent, eux aussi à assumer à fond leur rôle de papa, une nouvelle vague ne pourrait pas voir le jourà Celle des  » dadpreneurs  » ! À l’image de Gauthier Bribosia, précurseur du genre, qui, avec l’aide de ses deux fils, conçoit des doudous aux allures de monstres, les Deaddy Bears (photo ci-dessous). Si cet ingénieur commercial sorti de Solvay se réjouit de s’être rapproché de ses enfants par cette activité, il y voit aussi une manière intéressante d’aborder le monde du business.  » Ce projet d’entreprise m’apporte une ouverture d’esprit sur des aspects souvent laissés pour compte dans le monde des  » adultes  » :la spontanéité, la créativité et l’imaginaire, souligne-t-il. En contact avec eux, je trouve des réponses simples et concrètes à des besoins universels que nous, nous aborderions de manière théorique ou empirique.  » À quand les  » kidspreneurs  » ?

Carnet d’adresses en page 70.

Par Fanny Bouvry

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