Les créations du designer belge Bram Boo sont innovantes, pratiques, flexibles et rudement bien pensées. Malgré leur look très épuré, elles respirent la fantaisie et la joie de vivre. Découverte.

Carnet d’adresses en page 120.

Bram Boo a à peine plus de 30 ans, ses créations ne sont pas encore éditées mais il a déjà décroché un article dans le très hype  » Wallpaper « , le magazine britannique qui fait la pluie et le beau temps sur la planète design. Il suffit d’examiner ses créations avec un peu d’attention pour se dire qu’après tout, c’est la moindre des choses. Son style novateur crée la surprise, ses meubles sont résolument adaptés au mode de vie des citadins nomades et, en plus, ils affichent un look irrésistible. Difficile de ne pas y succomber. Pourtant, rien ne prédisposait ce jeune prodige à devenir designer.  » J’étais un étudiant assez médiocre, se rappelle Bram Boo. A l’âge de 17 ans, comme je ne faisais pas grand-chose à l’école et que je n’avais aucune idée du métier que je souhaitais exercer, mon père ( NDLR : le peintre Bram Bogaert) m’a proposé de travailler avec lui. Cela m’a permis de m’ouvrir un peu l’esprit et d’apprendre à apprécier l’art sous toutes ses formes. Je réalisais les châssis des toiles et j’accompagnais mon père à toutes les foires et expositions pour faire les accrochages. Parallèlement, ma s£ur, qui avait à l’époque un magasin d’antiquités au Sablon à Bruxelles, m’emmenait acheter des pièces sur les marchés aux puces. Elle m’a appris à reconnaître les objets et les meubles intéressants. En regardant tous ces meubles vintage datant des années 1950, 1960 et 1970, j’ai commencé à aimer le design. Pendant trois ans, j’ai acheté et revendu des meubles à mon propre compte. Quand je me suis lassé de ce business, je me suis dit que, finalement, cela devait être intéressant de créer son propre mobilier…  »

Après avoir suivi une formation en ébénisterie, Bram Boo s’inscrit à un cours du soir de design industriel dans une école de Hasselt. Il jette quelques idées sur papier et son professeur, séduit, lui conseille de les réaliser grandeur nature. Il l’encourage ensuite à participer à une foire de design en Allemagne pour tester la réaction du public face à ses créations. Et là, le miracle se produit.  » J’ai établi des contacts avec le VIZO ( NDLR : Vlaams Instituut voor het Zelfstandig Ondernemen) et avec la presse, précise le jeune créateur. Pour une première tentative, je dois avouer que j’ai eu pas mal de chance. L’année suivante, enthousiasmé par ce succès, j’ai soumis un dossier au Salon du meuble de Milan afin de pouvoir exposer mes projets au Salon Satellite, l’espace réservé aux jeunes designers. Et là aussi, à ma plus grande joie, les réactions ont été très positives…  »

Son premier meuble ? Une table en bois brut, bien charpentée, baptisée  » Rough  » ( NDLR : brut en anglais). Bram Boo l’a conçue en 1996 pour son usage personnel. A l’époque, il retapait sa maison et avait besoin d’un meuble robuste sur lequel il pouvait également travailler. Une approche multifonctionnelle qui est d’ailleurs l’image de marque du jeune designer.  » En 1999, j’ai conçu les « Matriochkas », un ensemble de sièges reposant sur le principe des célèbres poupées russes, poursuit-il. Chaque fauteuil est creux et peut donc s’empiler sur un modèle plus petit. Un concept ludique et pratique qui s’intègre à la perfection dans les espaces restreints. Cette idée m’est venue spontanément puisque je vis en effet dans une maison assez petite. Grâce à ces meubles empilables, je dispose en permanence de plusieurs sièges tout en occupant un minimum d’espace au sol. La fonctionnalité et la modularité constituent l’une des pierres angulaires de mon travail.  » Une philosophie qui permet au jeune designer de coller à l’air du temps et de proposer des solutions nouvelles.  » Il y a déjà tant de tables, de chaises ou de canapés sur le marché, souligne Bram Boo. Cela ne m’intéresse pas de créer un meuble juste pour le look. Je ne suis ni styliste ni décorateur.  »

Son secret pour innover et surprendre en permanence ? Tout simplement disséquer nos modes pour proposer des solutions adaptées à nos besoins changeants.  » Dans les grandes villes, il y a de plus en plus de célibataires qui prennent rarement le temps de manger chez eux, explique Bram Boo. Une table n’a donc pas forcément besoin d’être très grande. Souvent, elle ne sert qu’à poser un notebook, par exemple. Comme cette utilisation est nouvelle, on peut donc penser des formes innovantes et adaptées à ces circonstances. C’est ainsi que j’ai créé « Oasis », un sofa modulable comprenant deux éléments d’assise juxtaposables dont l’un est équipé d’un petit bureau et d’un système d’éclairage. Grâce à cette astuce, on peut s’asseoir confortablement pour manger un sandwich, travailler sur un notebook ou encore lire des magazines dans son living. Je suis intimement convaincu que les gens ont de plus en plus besoin de flexibilité.  »

Les créations de Bram Boo sont plutôt rectilignes et épurées. Un style qui correspond à son caractère bien trempé mais qui répond également à des impératifs techniques.  » Etant donné que je fabrique mes projets à l’aide de panneaux de MDF, de ma scie sauteuse et de ma ponceuse, cela limite un peu les possibilités, précise le créateur. Au départ c’est peut-être un handicap, mais à l’arrivée c’est un avantage. Au niveau strictement formel, ces difficultés me poussent en effet à donner une identité très forte à mes projets. Beaucoup de jeunes designers voient leurs £uvres mises en production par des éditeurs parfois prestigieux mais, souvent, ils doivent s’adapter au style de la maison. Je préfère ramer un peu pour trouver un éditeur qui respecte mon point de vue créatif. Commercialement, c’est très dur mais je crois que le jeu en vaut la chandelle…  »

Mais les projets de Bram Boo sont en voie de commercialisation. Un fabricant australien souhaite en effet éditer son canapé  » Oasis  » et la toute jeune maison d’édition belge Feld est sur le point de diffuser la table  » Etcetera « , un meuble très pratique intégrant deux bancs amovibles. Bram Boo, lui, est déjà une étape plus loin. Il rêve de créer une chambre à coucher superconfortable mais aussi très sexy, à la limite de l’érotisme, ou encore une maison modulable et très écologique… Des projets ambitieux qu’il ne tardera sûrement pas à concrétiser.

Serge Lvoff

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