Parce qu’il n’y a pas d’âge pour avoir du style, les chambres d’enfants s’ouvrent aux stars du design. Les tendances déco des grands se déclinent aussi en versions XXS. Le cocktail qui buzze ? Un mélange bien balancé de vintage et de contemporain griffé.

Lorsqu’elle s’est retrouvée enceinte de sa première fille, Lucie, 32 ans, s’est juré de bannir à jamais le total look Cendrillon ou Hello Kitty de la chambre à coucher du bébé. Comme beaucoup de jeunes parents exigeants, dotés d’un pouvoir d’achat conséquent, elle rêvait pour l’enfant d’un environnement différent, stimulant.  » Je savais précisément ce dont je ne voulais à aucun prix, se souvient-elle. En particulier de ces motifs lapins ou nounours infantilisants que l’on retrouve sur tout ce qui touche à la petite enfance.  » Refusant l’option  » lit-armoire-commode-à-langer  » préformatée dans laquelle sa fille se sentira bien vite très à l’étroit, Lucie décide alors de mêler objets vintage et mobilier contemporain. Au sol, un tapis multicolore réveille le plancher tout blanc. À l’exception de la taille XXS de certains meubles, le style ne diffère guère de celui des autres pièces de la maison : une déco sobre, étayée de quelques belles pièces griffées.

 » Pour eux comme pour leurs enfants, de plus en plus de gens sont aujourd’hui en quête de valeurs sûres, explique Cécile Dechamps, architecte d’intérieur et créatrice du site belge de vente en ligne Little Vintage Lovers. C’est ce qui explique en partie le succès rencontré aujourd’hui par les petits meubles anciens, au charme suranné, qui replongent les adultes dans leurs propres souvenirs d’enfance. C’est aussi bien vu désormais de montrer que l’on réutilise des objets qui ont déjà eu une ou plusieurs vies.  » L’usure, gage du comportement durable du nouveau propriétaire, est même, dans ce cas, recherchée.

Les fabricants ayant dans leur catalogue des versions mini de grands classiques du design – conçues ou non d’ailleurs par le créateur du modèle original – s’empressent désormais de les (ré)éditer.  » Croire que les gamins sont forcément attirés par des cochonneries en plastique de mauvaise qualité dans des couleurs dingues, ça, c’est une idée d’adulte, s’insurge Sylvain Willenz qui vient de présenter, en avril dernier, lors du Salon du meuble de Milan, une version kids de sa chaise Homerun ainsi qu’une petite table en bois peint chez Karimoku New Standard. J’ai adoré l’idée de réduire l’échelle de ma chaise, elle-même inspirée de l’univers des cartoons américains. C’est une évidence pour moi que les enfants puissent aussi s’entourer de belles choses bien faites, conçues avec sérieux. « 

Un point de vue largement partagé par Eugenio Perazza, président de la marque italienne Magis, à l’initiative de la ligne Me Too dédiée aux très jeunes amateurs de design. Depuis 2004, les plus grands noms du secteur – Enzo Mari, Marc Newson, Marcel Wanders, entre autres… – ont imaginé des objets pour les petits de 2 à 6 ans tout au plus. En Belgique aussi, l’éditeur Feld s’est lancé l’an dernier dans l’aventure du mobilier junior en demandant à Bram Boo de concevoir pour lui un bureau et des mini chaises baptisées BooBoo à l’allure effrontée de petits monstres taquins.  » Il y a un côté ludique évident dans tout ce que je fais, reconnaît ce spécialiste du travail du bois. Ça m’a tout de suite plu de traduire ma démarche dans des produits pour enfants de 5 à 8 ans. Les parents hésitent parfois à investir des sommes importantes parce qu’ils pensent que la vie de ces objets ne sera que de courte durée. Je pense, pour ma part, que c’est une période charnière dans le développement de l’enfant. C’est à cet âge-là qu’on est le plus ouvert, le plus impulsif dans sa manière de créer, de dessiner. Quand j’étais petit, je vivais sans le savoir entouré de meubles de créateurs. Je me souviens encore d’une petite chaise de Joe Colombo. Ça a eu des répercussions sur ce que je suis devenu, ça m’a sûrement ouvert l’esprit. Au-delà de la fonction de l’objet, j’aimerais transmettre quelque chose de pétillant, de joyeux. « 

S’il est indispensable de réduire l’échelle pour des éléments aussi fonctionnels qu’un lit, une chaise ou un bureau, nul besoin de limiter sa sélection aux gammes labellisées kids dès qu’il s’agit d’accessoires comme des chevets, des étagères, des tapis ou des coussins. Les lampes aussi, peuvent intégrer une part de poésie susceptible de toucher les plus jeunes. On pense notamment à la dégaine de robot de la lampe LED du Belge Frederic Gooris pour Alessi ou au plafonnier sur fond de ciel bleu des 5.5 designers pour Skitsch.

Dans la droite ligne du célèbre Sacco de Zanotta, conçu en 1968 par Piero de Gatti, Cesare Paolini et Franco Teodoro, les poufs géants constituent également une alternative à la traditionnelle liseuse. Choisis dans un coloris sobre, ils auront d’autant plus de chance de suivre jusqu’à l’université le petit bout qui faisait, hier encore, du trampoline dessus.

PAR ISABELLE WILLOT

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