» Le fairtrade, c’est mathématique «
Il n’a rien d’un militant baba-bobo, tout de l’entrepreneur bouillonnant. Interview de Philippe Lebordais, project leader de la marque Dressing Right.
Quelle est la genèse de votre projet ?
J’étais déjà un peu dans le développement durable puisque je travaillais pour une industrie canadienne spécialisée dans les moteurs hybrides. En octobre 2006, j’ai lu un reportage sur le commerce équitable, par hasard, et je l’ai vu sous un autre angle. J’ai eu l’intime conviction qu’il fallait créer, fabriquer et commercialiser une ligne de vêtements équitables, pour la femme et l’homme, qui serait destinée à la distribution classique et au marché » corporate « .
Vous avez tenu à obtenir la labellisation » Fairtrade » de Max Havelaar. Pourquoi ?
Parce qu’elle n’est pas basée sur de vagues concepts, mais qu’elle est mathématique ! Cela veut simplement dire que le paysan malien vend son kilo de coton 307 francs CFA (environ 0,50 euro) au lieu de 170 (environ 0,25 euro). L’impact sur le prix du produit fini est infinitésimal mais quand on rencontre les cotonculteurs, on se rend compte que cela change leur vie. L’ambition du projet est qu’ils soient payés à un prix qui leur permette de vivre dans la dignité.
La collection Femme et l’ouverture d’une boutique ont été reportés à plus tard. Tout n’est pas rose dans la mode équitable…
La boutique existe, elle est située dans le quartier Dansaert, à Bruxelles, elle nécessite trois mois de travaux avant l’ouverture. Quand ? C’est le grand point d’interrogation ! Nous avions la volonté d’avoir une collection Homme et Femme et un point de vente. Nous avons réduit la voilure, c’est le bon sens paysan : il est plus aisé de défendre une collection plutôt que deux. En espérant pouvoir y revenir très vite.
En réalité, tout est encore à inventer ?
Oui. Il faut décider les filateurs et les tisseurs à se lancer dans l’équitable. Cela a été notre tache la plus difficile. Il faut également convaincre les intermédiaires, les détaillants, et ce n’est pas chose facile, le marché du prêt-à-porter est saturé ; même avec des collections très bien dessinées, dans les plus beaux cotons du monde et avec un label équitable, il faut y mettre de l’huile de coude !
Vous êtes le project leader et le financier de Dressing Right. Seriez-vous philanthrope ?
Non, je suis un entrepreneur qui fait du » social business « . J’essaie simplement de montrer qu’il est possible de travailler d’une manière équitable – du champ de coton au magasin – tout en rendant une copie à la fin de l’année avec un bilan en équilibre.
Propos recueillis par Anne-Françoise Moyson
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici