esthètes dans l’âme, henriette et pierre chiesa ont restauré le château du vignal comme un parc dont l’oliveraie et les jardins ne feraient qu’un. ils ont ainsi créé un vrai bijou d’harmonie dans le paysage montagnard de l’arrière-pays niçois.

Carnet d’adresses en page 80.

Quittant la périphérie de Nice et son dédale de voies rapides, la D615 vous fait entrer dans la vallée du Paillon de Contes, une rivière de galets qui se tarit dès l’arrivée des beaux jours. Il faut s’enfoncer plus avant dans cet arrière-pays touffu, prendre la direction de Contes, puis de Berre-les-Alpes, suivre le parcours ascensionnel de la petite départementale, avaler un certain nombre de virages pour arriver à un lieu-dit, mentionné sur la carte Michelin 245 comme étant le Vignal. Là, un portail flanqué de deux cyprès marque l’entrée du monde de Pierre Chiesa, un superbe domaine hérité de ses aïeux. La propriété est en effet lovée dans un cirque naturel qui regarde se découper à l’horizon un relief de petites montagnes, couvertes d’une végétation impénétrable.

Lorsqu’on emprunte le long chemin d’accès, légèrement en surplomb, on n’aperçoit pas de suite la résidence. Entre les cyprès qui le bordent, on découvre d’abord la belle oliveraie. La partie bâtie est un ensemble de constructions dont chacune possède sa personnalité, son originalité. On remarque d’abord une longue bâtisse entièrement recouverte d’un enduit à la chaux de couleur rouge brique et dotée d’une élégante petite tour de deux niveaux. A proximité immédiate, une tour carrée défensive se signale par ses créneaux creusés par rangées superposées de trois sur chacune des faces. Plus en arrière, une tour circulaire est, elle, montée en pierre de taille. Une autre tour encore, plus étroite, évoque les campaniles de la Ligurie italienne toute proche. En s’éloignant un peu, on devine, juché au sommet de la propriété, un grand bâtiment de ferme élégamment peint en jaune citron. Et sur le même niveau que l’ensemble des habi-tations, de l’autre côté d’une pièce d’eau rectangulaire, on distingue une grande chapelle à laquelle on accède par de longues et amples terrasses. C’est autour de celles-ci que s’articulent ce qu’il est convenu d’appeler les jardins, avec leurs haies, leurs parterres fleuris, leurs éléments décoratifs, leurs roses et bien d’autres plantes qu’on s’attend à trouver sur les contreforts de la Riviera.

Le Vignal a été conçu comme un tout, unissant dans le même paysage l’activité oléicole et les éléments de plaisance. Pierre Chiesa se souvient qu’enfant, on trouvait de la vigne (la culture de celle-ci, remontant à la nuit des temps, a sans doute donné son nom au lieu-dit) sur les terrasses de la propriété familiale. Et comme tant d’autres dans la vallée, l’exploitation comptait aussi des châtaigniers et des arbres fruitiers. C’est lorsque le domaine lui échoit, que Pierre Chiesa décide de transformer le paysage environnant en accordant la priorité à l’olivier.  » Nous avions une oliveraie de 450 unités, mais il manquait des arbres sur les différentes restanques (terrasses de culture), confie le maître des lieux. Nous avons donc décidé de compléter les alignements existants et de créer une plantation nouvelle dans la partie centrale de cet amphithéâtre naturel. A cette époque, on ne trouvait pas de jeunes pousses de la variété locale, le cailletier. Nous avons donc dû prélever trois centaines de souchons sur les arbres existants.  »

Henriette et Pierre Chiesa n’oublieront jamais leur première tentative, du creusement de dizaines et de dizaines de trous, judicieusement alignés, formant le plan global de plantation s’inspirant des obliques d’un éventail.  » Nous avions à peine terminé la plantation, que les pluies diluviennes d’un orage d’équinoxe d’une rare intensité ont tout emporté.  » Quelques décennies plus tard, l’oliveraie offre une parfaite harmonie que l’on peut détailler depuis les diverses terrasses du jardin de plaisance. La première d’entre elles, la plus grande, conduit à la chapelle qui se mire dans un grand réservoir d’eau rectangulaire. A proximité du parapet, des poteries d’Anduze sont plantées de Plumbago. D’autres, situées près de l’escalier qui permet d’accéder aux jardins supérieurs, sont ornées de Clerondendrum.

 » Lorsque nous avons commencé le jardin lui-même, nous avons donné la priorité aux senteurs et aux saveurs, explique Henriette Chiesa. On y trouve donc des plantes aromatiques, comme de gros massifs de sauge, de romarin.  » Les autres plantations constituent une savante combinaison de formes régulières, taillées en boule, et de spontanéité débridée, comme celle de ces Datura, devenus gigan-tesques. Ici et là, on distingue des buissons de myrte, d’autres de laurier.

Sur le chemin de la ferme de Vignal, un portique indique : Porte de Narbonne. Cette signalisation fait référence à la dénomination de la parcelle dans le cadastre et non à un chemin qui conduirait à la ville de Narbonne. L’histoire du site est pourtant bien riche. La tour carrée, par exemple, existe depuis l’an 1027 : elle fut édifiée par le seigneur de Berre. La chapelle est construite à l’emplacement d’un temple romain. On pense même que le lieu était habité bien avant l’arrivée des légions de Rome. En effet, sa topographie particulièrement calme en regard de l’environnement hostile qui l’entoure a fait du Vignal un havre, une halte sur la route de la montagne. De plus, le site, riche en sources, pouvait être cultivé. D’autres activités humaines s’y sont développées, comme l’ex-traction de la pierre. Le site de l’ancienne carrière a d’ailleurs lui aussi été aménagé par Henriette et Pierre Chiesa.  » Un de nos prédécesseurs y avait installé un théâtre de verdure, en l’enjolivant même de colon- nades, rappelle Pierre Chiesa. Nous avons décidé d’alléger le site, d’y planter quelques espèces comme de l’Hamamelis, des roses de noël (hellébores), des Camellia sasanqua. Et nous avons taillé les arbousiers qui y ont poussé naturellement dans la roche, ce qui confère au lieu un petit côté japonisant.  »

La promenade peut se poursuivre, de découverte en découverte. On admire ici le magnifique tronc d’un olivier, là la cime majestueuse d’un grand pin. Au passage, on croise une volée multiple d’escaliers bordés de part et d’autre d’agapanthes bleues. Un véritable ravissement, à l’image de toutes les merveilles qui peuplent le château du Vignal.

Texte et photos : Jean-Pierre Gabriel

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