Chris Corner, leader du groupe I AM X, se met à nu et joue au mannequin d’un jour pour notre magazine. Rencontre avec un artiste fascinant qui fait rimer tendance et prestance dans le plus élégant des flous artistiques.

I AM X,  » Kiss + Swallow « , chez Bang ! En concert le 14 mai prochain à la Soundstation de Liège. Tél. : 04 232 13 21. Internet : www.iamx.co.uk

Il a choisi le X pour définir sa nouvelle aventure musicale. A 29 ans, le Britannique Chris Corner a mis momentanément son groupe Sneaker Pimps entre parenthèses (plus d’un million et demi d’albums vendus dans le monde) pour se consacrer à ce projet beaucoup plus personnel et présenté sous le nom de I AM X (littéralement  » Je suis X  » ou  » Je m’appelle X « ). Teinté d’électronique délicieusement rétro, le premier album de cette renaissance désirée donne le ton par son titre  » Kiss + Swallow  » ( » Embrasse et avale « ) et ses textes sulfureux qui naviguent entre désir, amour et plaisir. Musicalement, le disque évoque les années 1980 sans être démodé pour autant. Que du contraire. Auteur, producteur, compositeur et interprète du projet I AM X, Chris Corner est un artiste résolument dans l’air du temps qui navigue, avec jubilation, entre  » néostalgie  » et pop underground.

En exclusivité pour Weekend Le Vif/L’Express, ce chanteur au look minutieusement étudié a gentiment accepté de faire l’aller-retour Londres-Bruxelles pour une production de mode dédiée à l’été 2005 ( voir pages 42 à 49). Complice, il s’est laissé prendre au jeu de cette séance de photos inédites, avant de se confier en toute simplicité. Action !

Weekend Le Vif/L’Express : Quelles sont vos impressions à l’issue de ce shooting de mode ?

Chris Corner : J’ai bien aimé ! Et je me suis senti très à l’aise. C’est un peu comme être sur scène. On joue un rôle et quand on entre dedans, ça peut être vraiment bien. Donc, c’est plus un plaisir qu’une corvée. Faire le mannequin l’espace d’une journée est très agréable finalement…

J’ai jadis été très timide, mais j’ai appris à être plus expressif au fil des années. Et puis, le fait de monter sur scène vous oblige à être fatalement à l’aise dans d’autres situations. Donc oui, je me sens à l’aise devant l’objectif.

Et puis, vous aimez la mode…

Oui ! J’ai toujours été intéressé par la mode. J’aime beaucoup les créateurs pointus, même si je ne me sens pas vraiment impliqué dans ce monde. Donc, je préfère mélanger leurs créations avec des pièces plus  » vintage « , plus pratiques, plus réalistes. C’est mieux. La combinaison est intéressante. Cela fait partie de mon style.

Mais d’où vient finalement cet amour du vêtement ?

Je pense que c’est d’abord le côté glamour de la mode qui m’interpelle, mais aussi cet aspect  » extra ordinaire « . Quand vous regardez un défilé, vous avez souvent l’impression que les extraterrestres ont débarqué ! Vous voyez des créatures incroyables avec des tenues venues d’une autre dimension. Il y a parfois un petit côté ridicule, mais il y a surtout ce côté  » hors de tout « .

Considérez-vous la mode comme de l’art ?

Oui, c’est de l’art, mais de l’art pour les détraqués ( rires) ! Non, sérieusement, je trouve qu’il n’y a pas assez de glamour dans ce monde. Beaucoup trop de gens se moquent, selon moi, de la façon dont ils s’habillent et ne se rendent donc absolument pas compte de la façon dont ils sont perçus. Je trouve ça triste. Donc, pour moi, la mode est essentielle parce qu’elle apporte précisément ce glamour dans la vie de tous les jours.

Quels sont vos créateurs fétiches ?

Ouh la la ! Il y a d’abord quelques créateurs britanniques qui me plaisent, mais qui ne sont pas du tout connus en Belgique. J’aime aussi Alexander McQueen pour son extrême inventivité et sa faculté à repousser les frontières. J’aime Dior pour son extravagance décalée. Et puis, grâce à vous, j’ai découvert aujourd’hui votre compatriote Xavier Delcour. Ce n’est pas mal du tout.

Lorsque nous avons préparé cette production de mode, vous nous avez transmis vos mensurations par e-mail avec le commentaire suivant :  » Attention, il s’agit de tailles féminines. J’aime le look androgyne.  »

( Rires) Lorsque je vais dans les boutiques de vêtements pour homme en Grande-Bretagne, je ne trouve généralement rien d’intéressant. Tout est grand, rien ne me va. Alors, le seul moyen pour trouver mon bonheur, c’est d’aller dans les boutiques pour femme. Comme je suis plutôt mince et petit, je n’ai aucune difficulté à trouver ce qui me plaît. C’est beaucoup plus original et beaucoup plus glamour. Et puis, j’aime aussi leurs chaussures ( rires) ! Ce n’est pas du fétichisme, le fait est que ça me va ! Mais il est vrai j’aime aussi le look androgyne…

Mais vous êtes 100 % hétéro, n’est-ce pas ?

Heu… C’est une bonne question ! La plupart du temps, oui ( rires) ! Cela dépend comment je me sens et à quel point je suis saoul ( rires) !

Le look semble primordial pour vous. On chuchote d’ailleurs que vous vous préparez pendant une heure et demie avant de monter sur scène ?

On vous a menti ! Cela me prend tout au plus cinq minutes ( rires) ! Non, c’est vrai que c’est important. Cela montre au public que j’ai fait un effort. Même si ce look ne durera pas plus que trois chansons étant donné que je suis rapidement en sueur sur scène. Mais c’est important. Ne fût-ce que pour la première impression que l’on laisse au public.

Quelle est votre définition de l’élégance ?

C’est de porter ses vêtements avec allure et assurance. La façon de se tenir est primordiale. Si on se tient bien, on peut carrément porter n’importe quoi. L’élégance, c’est une question d’attitude.

Que signifie ce logo de Nike tatoué sur votre avant-bras gauche ? Seriez-vous  » sponsorisé  » ?

Non et je devrais l’être ( rires) ! J’étais très saoul quand je l’ai fait. Je devais avoir 18 ou 19 ans. J’étais en Arizona avec un groupe. Un jour, je me suis dit :  » Je vais faire un tatouage.  » Et j’ai choisi Nike. C’était censé être un pied de nez. Et d’ailleurs, ça l’est ! Si je l’ai fait, c’est pour que l’on m’en parle. Parce que c’est une prise de position détournée. C’est une façon de dire :  » Attention, même le corps humain peut devenir un support publicitaire « . Et comme Nike est la marque ultime, je me suis  » logotisé  » avec Nike ( rires) !

Aucun regret ?

Non. Il ne faut jamais rien regretter. Je pense que c’est une erreur de regretter ses actes dans la vie.

Venons-en à votre musique. Quand on écoute votre album, il y a un petit côté années 1980 revu à la sauce d’aujourd’hui, un côté  » néostalgique  » si l’on ose dire…

J’aime beaucoup ce mot. Mais lorsque j’ai fait cet album, je n’ai pas délibérément choisi de lui donner le son d’une période particulière. Alors, peut-être la veine années 1980 est-elle sortie de moi ? Je ne sais pas. En fait, les commentaires diffèrent au sujet de cet album et ce n’est pas plus mal…

Justement, comment définiriez-vous votre musique auprès de quelqu’un qui ne l’a jamais entendue ?

Je pourrais écrire un essai là-dessus ! C’est impossible de répondre en deux mots. Mais pour planter le décor, je dirais qu’il faut essayer de m’imaginer dans une chambre avec un ordinateur, nu ( rires), en train de faire une espèce d’électro-rock-wave-punk avec une attitude un peu poète et mélancolique.

Pourquoi les paroles de vos chansons évoquent-elles surtout l’amour, le sexe et le plaisir ?

Parce que ce sont mes pensées premières de la journée ( rires) ! Non, sérieusement, c’est une sphère que j’aime explorer. Et j’aime aussi la combinaison des vraies émotions, de la poésie et de toutes ces choses pleines de sens. En fait, j’aime les émotions combinées à la perversion…

On retrouve un peu cette perversion en concert avec ces étranges images de film que vous montrez sur scène.

Oui, elles sont tirées d’un film porno japonais, mais il n’y a rien d’explicite. Cela ne m’intéresse pas de choquer. Je préfère la suggestion. Je préfère la psychologie du sexe au sexe proprement dit. Encore une fois, je ne veux pas choquer. Je ne suis pas Marilyn Manson. Je suis plus subtil.

Vous avez connu le succès mondial avec Sneaker Pimps et, pourtant, vous signé le projet I AM X sur un petit label belge indépendant ! Pourquoi ?

Parce que j’ai eu de mauvaises expériences avec les grosses maisons de disques. Je n’aime pas leur attitude. D’une minute à l’autre, vous passez de tout à rien. Moi, je veux être libre. Je veux travailler avec passion et enthousiasme. Je déteste être contraint.

Y aura-t-il un jour un nouvel album des Sneaker Pimps ?

Oui, c’est prévu. On a déjà écrit une dizaine de nouvelles chansons et on termine la production. On espère sortir l’album à la fin de cette année ou au début de l’année prochaine.

Propos recueillis par Frédéric Brébant

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