Cocorico ! Le restaurant Noma, à Copenhague, bénéficie d’une cuisine neuve, conçue par une firme belge. A la barre, René Redzepi et son équipage, soit vingt-six cuisiniers qui jonglent avec les produits de la nature et leur fermentation.

Bien qu’il jouisse aujourd’hui d’une réputation mondiale, le chef René Redzepi, du restaurant Noma à Copenhague, n’a rien perdu de sa sympathie. Son ambition est de privilégier l’inédit, aux côtés d’une équipe de collaborateurs jeunes et motivés. Chez Noma, tout le monde, du plongeur au  » head chef « ,a voix au chapitre et peut contribuer à l’évolution de l’établissement. La création est là un processus constant et ces efforts communs génèrent à coup sûr des résultats surprenants.

L’été dernier, le Noma a fermé ses portes pendant un mois. Au bout d’une décennie, l’heure du changement avait sonné. Un jardin de rocaille en pierre de lave a été aménagé devant l’entrée de l’entrepôt reconverti. La salle a été réaménagée, son sol et sa charpente refaits, mais de manière tellement subtile qu’il faut bien regarder pour s’en apercevoir. Toutefois les plus grandes modifications concernent la cuisine, où certains murs ont été abattus pour créer un espace équipé par la firme belge Maes Inox.  » Je me suis toujours promis de tout revoir après dix ans, explique René Redzepi. Je ne voulais pas naviguer en mode pilote automatique. Le travail doit rester un défi quotidien, sinon on ne peut plus avancer.  »

Voici dix-huit mois, son sous-chef belge de l’époque, Yannick Van Aeken, l’a donc introduit chez Maes Inox.

 » Avant de décider avec quelle firme nous souhaitions nous embarquer, nous avons rencontré sept cuisinistes. Nous les avons jugés sur la seule qualité. Finalement, nous en avons retenu deux qui répondaient à nos critères, dont un qui voulait tout installer gratuitement à titre de publicité. Nous avons choisi l’autre. Bien que nous ayons fait un bon deal, la cuisine est restée chère. Je voulais un nouveau style et une nouvelle organisation qui permette à vingt-six cuisiniers d’oeuvrer efficacement sur une surface de 60 mètres carrés. Il fallait aussi concevoir un environnement qui puisse contribuer à bosser quatorze heures par jour dans une ambiance agréable. Ici, nous mettons de la musique pendant la mise en place !  »

Cinq réunions ont été programmées avec Maes Inox, au cours desquelles le head chefDan Gusti, un Américain d’origine italienne, a exprimé ses souhaits. La nouvelle cuisine est en acier inoxydable et en pierre.  » Tous les détails ont leur importance. Par exemple, il faut prévoir un récipient pour les cuillères à goûter et un tiroir pour le Roner « , précise Redzepi.

Le style culinaire pratiqué chez Noma évolue en permanence. Par le passé, Redzepi s’est surtout attaché à explorer les produits présents dans son environnement et s’est penché sur tout ce qui pousse dans la nature, ou presque.  » Une telle approche est un processus lent. Lorsqu’une préparation n’est pas tout à fait au point, il faut souvent attendre la saison suivante, auquel cas on perd un an. Tout ça nécessite une grande patience. Mais les plantes nous donnent aussi beaucoup de liberté. Les légumes ne sont plus confinés dans un rôle de garniture. En les faisant fermenter, on peut créer la même profondeur gustative qu’avec un morceau de viande. Cela ouvre d’innombrables possibilités, la diversité du monde végétal est plus grande que celle du monde animal.  »

La fermentation des ingrédients, largement utilisée au Noma aujourd’hui, est une technique qui, historiquement parlant, est appliquée dans le monde entier à des fins de conservation. En plus de renforcer les goûts, elle facilite la digestion.  » Il suffit de quelques gouttes du jus de champignons fermentés sur une huître pour créer une explosion dans la bouche. Dans ce processus, nous partons de moisissures de culture basées sur du malt de seigle. Nous mettons par exemple à reposer des petits pois pendant cinq mois et obtenons ainsi du Pae-so, une pâte miso riche en umami. Une cuillère est suffisante pour transformer un plat. Nous appliquons ces méthodes aux bolets ou aux groseilles à maquereau encore vertes. Dans notre grenier à fermentation, nous laissons fermenter 2 000 kg de produits, dont du poisson, des viandes, des sauterelles et même des fourmis. Nous mettons ensuite le goût au point. Par ailleurs, nous voulons toujours apporter à tous nos mets un élément de surprise et une touche humoristique.  »

PAR PIETER VAN DOVEREN / PHOTOS : KRIS VLEGELS

 » Je ne voulais pas naviguer en mode pilote automatique. Le travail doit rester un défi quotidien, sinon on ne peut plus avancer.  »

 » Dans notre grenier, nous laissons fermenter 2 000 kg de produits, dont du poisson, des viandes, des sauterelles et même des fourmis.  »

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