Quand il nous donne rendez-vous à La Paix, face aux abattoirs d’Anderlecht, pour y être photographié, Paul Dujardin a-t-il choisi l’une des adresses les plus en vue du moment ? Eh bien non ! Et il ne faut pas longtemps pour que se révèle le passionné de Bruxelles, aux racines profondément ancrées. Le directeur de Bozar remonte les ans et évoque les lieux quand on y vendait et achetait le bétail  » sur pied « . Une époque qu’il a connue alors qu’il était enfant et dont il restitue l’atmosphère avec beaucoup de poésie. En un clin d’£il, il poursuit son voyage dans le temps en évoquant le ring de Bruxellesà quand il n’était encore qu’un vaste verger où l’on cultivait les chicons. Paul Dujardin passe avec une aisance exquise des références culturelles les plus pointues aux plaisirs simples de la vie quotidienne :  » faire la vaisselle en famille  » qu’il considère comme une thérapie. En quelques mots, il saute d’un déjeuner avec le conservateur du musée Getty de Los Angeles au carré d’herbes aromatiques que son épouse bichonne au c£ur de leur grand potager. En fil rouge, le même souci du détail et le même besoin d’authenticité. Ses grands-parents étaient agriculteurs et ses parents bouchers. Témoin de cette filiation, sa sélection d’adresses se veut une sorte de  » défense et illustration du bon-manger « . Il n’hésite pas à parler de  » la valeur inestimable de la terre  » et épingle ces familles de Brooklyn qui se regroupent en coopérative afin de pouvoir bénéficier chaque semaine d’un panier de légumes bio. Dans la foulée, il évoque aussi sa cuisinière éthiopienne qui l’a initié à l’injera – un repas traditionnel copte -, de ses 6 enfants qu’il adore emmener au restaurant et de ses réunions qu’il met un point d’honneur à entamer avec un jus de fruits frais. Son agenda ultrachargé et sa vie trépidante ne lui font jamais transiger sur la qualité de vie.

1. La Paix

 » Je suis sentimentalement attaché à cette adresse que je fréquente depuis toujours. Le chef David Martin s’est entre autres formé chez Alain Passard, à Paris, et depuis son arrivée, La Paix est passée à la vitesse supérieure tout en conservant l’esprit originel de la maisonà fondée en 1892. C’est, pour moi, le mariage parfait entre modernité et tradition. « 

Avec sa nouvelle cuisine ouverte, nombreux sont ceux qui prédisent une étoile à La Paix. Mêlant allègrement atmosphère populaire, beaux produits et cuisine savante, elle s’impose sans se départir d’un vrai esprit de brasserie. La carte affiche des musts qui font courir le Tout-Bruxelles : poulet des Landes rôti au foin en cocotte ou b£uf Simmenthal de Bavière et sa béarnaise au beurre fermier. Grand amateur de viande, Paul Dujardin savoure, lui, le lard basque avec gourmandise.

La Paix, 49, rue Ropsy-Chaudron, à 1070 Bruxelles. Tél. : 02 523 09 58.

2. Ciao

 » Cette adresse intimiste nichée en contrebas du Sablon est un modèle de constance : elle est gérée par deux professionnels depuis plus de vingt-cinq ans avec la même rigueur. Elle est fréquentée quasi exclusivement par une clientèle d’habitués. Il n’y a qu’un seul service, ce qui fait que l’on peut prendre tout son temps. J’y ai deux plats préférés : les artichauts crus marinés dans l’huile d’olive et la tagliata de b£uf à la roquette. « 

On a vite fait de passer à côté du Ciao, tant la maison se veut discrète. Mais la décoration tout en simplicité s’efface au profit d’un festin gourmand totalement maîtrisé grâce à un duo hyperefficace : Giuseppe Pereyra de Leon Costa en salle et Jean Poletto dans la microcuisine. Les mets, eux, se succèdent avec une fraîcheur imparable. Mention toute particulière pour le foie de veau à la sauge.

Ciao, 28, rue Joseph Stevens, à 1000 Bruxelles. Tél. : 02 513 03 23.

3. Le Samouraï

 » Pour moi, il s’agit du meilleur restaurant japonais de Bruxelles. Cette adresse est parfaite pour qui souhaite s’initier à la cuisine nippone : elle excelle tant pour le cru que pour le cuit. Il y a un côté aristocratique à cette enseigne qui se marque jusque dans l’ordre des plats envisagés en vue d’une digestion la meilleure possible. « 

Avec ses allures de cantine tokyoïte, Le Samouraï s’affiche comme un restaurant aux dimensions de bonzaï dans lequel la cuisine s’apparente à un travail d’orfèvre. Cette affaire familiale en passe de devenir une institution a les faveurs de plusieurs stars : Marie Gillain, Alain Bashung ou encore Catherine Deneuve. S’il ne fallait qu’un exemple pour illustrer l’esprit des lieux, on le trouverait sans hésiter dans la soupe miso. Trop souvent servie de façon industrielle, elle est ici une vraie  » perle  » aromatique pleine de goût.

Le Samouraï, 28, rue du Fossé aux Loups, à 1000 Bruxelles. Tél. : 02 217 56 39.

4. Champigros

 » Il nous arrive souvent, à mon épouse et moi, de prendre la voiture rien que pour venir acheter ici des champignons. Chez Champigros, nous bénéficions d’une véritable expertise et de précieux conseils de préparation. On pourrait croire que cuire des champignons est très facile, mais il s’agit, en vérité, d’une véritable science. « 

S’il est une constante dans la sélection de Paul Dujardin, c’est bien la discrétion. Son carnet déborde d’adresses qui nécessitent une connaissance intime des rues de Bruxelles. Ceci est particulièrement vrai pour Champigros, tapi derrière la place Sainte-Catherine. Ce grossiste en champignons est également accessible aux particuliers qui viennent y glaner shiitakes, agarics des jachères et autres morilles… Sans oublier un assortiment d’huiles aromatisées et de champignons séchés.

Champigros, 22, rue Melsens, à 1000 Bruxelles. Tél. : 02 511 74 98.

5. VDS-food

 » Je suis le neuvième enfant d’une famille de dixà Pour les réunions familiales, il n’est pas rare que j’accueille jusqu’à 80 convives. Quand cela arrive, je n’ai qu’une adresse : VDS-food, à deux pas de la gare du Midi. « 

Grossiste pour un grand nombre de restaurateurs à Bruxelles, VDS-food est un vrai plan d’initié. Cette affaire familiale qui a débuté, il y a quarante ans, par un magasin de volaille est, avec le temps, devenue une référence. L’adresse ne paie certainement pas de mine avec ses allures d’entrepôt, mais elle propose un excellent rapport qualité-prixà d’une gamme de surgelés étendue à des produits de très grande qualité.

VDS-food, 104, rue de Belgrade, à 1060 Bruxelles. Tél. : 02 543 19 19.