En 2015, l’actrice s’invite au casting du second volet de la saga Divergent. A 46 ans, la nouvelle égérie L’Oréal Paris ose aussi la comédie et se laisse – enfin – aller à des rôles un peu plus légers, qui lui vont bien.

Le cinéma est un maître trompeur. Lorsque Naomi Watts s’avance, main tendue, dans sa robe Chloé blanc cassé mettant en valeur la finesse extrême de sa silhouette, on a du mal à reconnaître ne fut-ce que l’ombre des personnages fiévreux, torturés même parfois, qui ont jalonné sa carrière. Ce matin-là, l’actrice révélée en 2001 par David Lynch dans Mulholland Drive – le long-métrage, tiré du pilote d’une série qui ne sera jamais produite, triomphe alors à Cannes et devient culte – ouvre avec nous le feu continu d’une journée d’interviews dans la suite lisse d’un grand palace parisien. A 46 ans, elle peut se targuer d’une filmo (quasi) sans fautes où se bousculent à la réalisation – James Ivory, Peter Jackson, Woody Allen, Michael Haneke, Anne Fontaine ou Gus Van Sant… – comme à ses côtés, sur le plateau, tout le gratin du 7e Art abonné aux Oscars et aux festivals prestigieux. Une belle leçon de patience et d’humilité quand on sait que l’aventure avait pourtant commencé à tâtons pour la jeune femme partie sur un coup de tête pour Hollywood, avec sous le bras un maigre C.V. de starlette de la télévision australienne. De son propre aveu pourtant, elle se savait  » faite pour cela « , prête aussi à se donner le temps d’attendre le  » bon  » projet. Une prudence et une persévérance qui ont fini par payer et qui lui permettent aujourd’hui de choisir et d’assumer des rôles qui lui plaisent vraiment, osant peut-être même un registre plus léger qu’à ses débuts. Un des privilèges de l’âge et de la maturité, sans doute, qui l’ont poussée aussi à accepter sans complexe – après tout, sa meilleure amie Julianne Moore avait pavé la voie pour elle il y a deux ans déjà – de devenir le visage d’un nouveau soin anti-âge L’Oréal Paris, mimant les résultats que l’on peut obtenir après des injections d’acide hyaluronique.  » Je suis même allée visiter les laboratoires pour voir par moi-même comment se fabriquaient les produits, c’était fascinant ! « , assure-t-elle, confortant ainsi sa réputation de bosseuse invétérée, prête à visionner des heures d’interview de Diana pour s’approcher d’elle au plus près afin de jouer la princesse à l’écran, ou à lire la déposition complète de la secrétaire de l’ex-patron du FBI. J. Edgar Hoover pour tenter de comprendre sa psychologie avant de l’incarner. Une pro de la préparation. Confirmation.

Quelle a été votre réaction lorsque l’on vous a proposé de rejoindre les égéries L’Oréal Paris ?

En mars 2014, j’ai reçu un coup de téléphone qui me proposait de venir à Paris pour rencontrer Cyril Chapuy, le président du groupe. J’étais un peu nerveuse, au début ! Il s’agissait tout de même d’un contrat beauté, avec tout ce que cela peut impliquer. D’un certain côté, surtout pour une femme de 46 ans comme moi, c’est plutôt flatteur, mais de l’autre, cela vous met une sacrée pression. Le fait que Julianne Moore, dont je suis très proche, ait déjà sauté le pas a achevé de me convaincre. J’aime aussi la vision de la beauté qui est mise en avant ici au travers d’un panel extraordinaire de femmes de tous âges et de toutes origines ethniques. Il n’y a pas de diktat, pas de modèle unique.

Aujourd’hui, est-ce un passage obligé pour un actrice de devenir porte-parole d’une grande marque de cosmétique ?

Oui, j’ai vraiment l’impression que cela fait partie du deal. Tout le monde le fait ou presque, ce qui n’était certainement pas le cas il n’y a même pas quinze ans d’ici. Et franchement, c’est plutôt agréable de jouer les top models car nous avons la chance de tourner des campagnes magnifiques. Pour celle-ci, je vais retrouver Peter Lindbergh avec qui j’ai toujours plaisir à travailler. Il ne s’intéresse pas à la beauté superficielle de la femme : ce qu’il recherche, c’est son essence véritable. Honnêtement, je suis loin de me sentir décontractée devant un objectif fixe, ce n’est pas du tout mon domaine de prédilection ni d’expertise. Surtout si vous avez en face de vous quelqu’un qui donne des ordres qui partent dans tous les sens, comme à un robot ! Mais Peter, lui, a le don de mettre les gens à l’aise. Si l’on est relax, on laisse plus facilement transparaître qui l’on est vraiment.

Vous sentez-vous belle tous les jours ?

Certainement pas ! Et je mets au défi même les plus jolies femmes qui soient de l’affirmer ! Nous avons toutes nos bons et nos mauvais jours. J’aime l’idée de pouvoir compter sur des produits pour avoir davantage confiance en moi. Cela fait plus de deux mois (NDLR : l’interview a eu lieu en novembre dernier) que j’ai intégré matin et soir le sérum et la crème Revitalift Filler dans ma routine beauté. Et je vois la différence. La crème est très nourrissante, cela se sent rien qu’en mettant les doigts dans le pot ! Comme c’est un produit sans SPF, j’essaie de ne pas oublier d’appliquer une protection solaire. C’est ce que fait toujours Julianne et sa peau est vraiment sublime, comme translucide ! J’avoue que je ne suis pas aussi prudente qu’elle.

Vous rappelez-vous de ce qui vous a donné envie de devenir actrice ?

Mon premier souvenir de ma mère sur les planches remonte à mes 4-5 ans : je la voyais sur scène, avec son joli costume, sa voix si particulière, c’était fascinant. Je passais un moment délicieux mais je n’arrêtais pas de lui faire signe. Evidemment, elle ne répondait pas car elle était totalement dans son personnage jusqu’à ce que, de manière quasi imperceptible, elle me fasse un clin d’oeil. C’est à cet instant-là que j’ai compris qu’elle  » jouait « , qu’elle était dans un monde imaginaire. J’ai tout de suite eu envie de faire la même chose. Bien sûr, ce n’est qu’à l’adolescence que j’ai réalisé que cela pouvait être un vrai métier. C’est alors devenu clair pour moi : je voulais faire cela dans la vie.

Ce qui vous plaît, c’est jouer à être quelqu’un d’autre finalement ?

Complètement ! C’est cela qui est passionnant, explorer d’autres personnalités que la sienne, vivre d’autres vies, trouver une certaine liberté d’être à travers eux.

Si l’on regarde votre filmographie, vous avez surtout incarné des personnages au destin tragique – on pense tout de suite à Lady Diana bien sûr, mais aussi à la mère qui voit sa famille emporter par le tsunami de 2004 dans The Impossible ou à une ex-junkie dans 21 grammes. Arrivez-vous facilement à les  » abandonner  » ?

Il y a un an, je vous aurais répondu, sans hésiter, que je pouvais très aisément sortir de mon rôle à la fin de chaque journée de tournage. Mais il se fait qu’en 2014 j’ai enchaîné, si pas des comédies au sens strict du terme, en tout cas des films plus légers. Et c’est indéniablement plus simple de se vider la tête, de revenir à la  » vraie  » vie lorsque l’on joue ce type de personnage. Dans St.Vincent, je me glisse dans la peau d’une strip-teaseuse russe, enceinte de surcroît, et amie d’un vieux misanthrope interprété par Bill Murray. Vous pouvez vous imaginez ça (elle rit) ? C’était très drôle pour moi, en tout cas. Je ne regrette certainement pas mes rôles plus intenses, mais j’avais besoin de changement.

On vous retrouvera en 2015 à l’affiche du deuxième volet de la saga Divergent. Dans le camp des bons ou des méchants ?

Je ne peux pas vous le dire car on nous a vraiment demandé d’en révéler le moins possible avant la sortie du film. Pour ceux qui ont lu les livres, je serai Evelyn, un personnage plutôt extrême, à la personnalité complexe. Je garde un souvenir incroyable de ce tournage. L’équipe est formidable et les jeunes acteurs tout simplement fantastiques.

Vieillir dans ce métier ne vous fait pas peur ?

Non. Au fur et à mesure que je prends de l’âge, j’ai l’impression que les rôles que l’on me propose sont de plus en plus profonds. Ils sont le reflet du temps qui s’écoule : forcément, à 40 ans passés, on vit et on a vécu plus de choses, à l’écran aussi.

Le fait d’être devenue mère de deux petits garçons influence-t-il vos choix professionnels ?

D’un point de vue pragmatique, certainement. Depuis que mes enfants sont à l’école, je ne peux plus voyager aussi facilement. Avant, cela ne posait pas de problème de partir tourner en Thaïlande pour six mois : ils nous suivaient et passaient du bon temps sur la plage. Maintenant il y a les cours et les horaires dont il faut tenir compte. Heureusement, j’ai pu travailler principalement à New York récemment. Mes goûts, eux, n’ont pas changé. Pour que je me lance dans un projet cinématographique, il doit me parler. Mes enfants pourront regarder mes films quand ils seront plus grands et plus à même de comprendre les choix artistiques que j’ai faits. Certains de mes personnages ont des côtés sombres, mais je n’ai jamais été attirée par un profil de tueuse en série !

La pression médiatique aidant, vous sentez-vous comme obligée de  » montrer l’exemple  » ?

Jusqu’à un certain point, oui. Mais j’essaie surtout d’être moi-même, en fait. Si cela peut inspirer, eh bien, tant mieux ! Je suis fière de mes enfants, de la relation merveilleuse que j’ai avec leur père (NDLR : l’acteur Liev Schreiber) et de ma carrière. Mais je ne cherche pas à imposer ce modèle de vie à qui que ce soit.

Qu’auriez-vous fait si vous n’aviez pas été actrice ?

J’admets que j’ai bien dû me poser la question lorsque ma carrière piétinait mais je ne suis pas vraiment qualifiée pour quoi que ce soit d’autre en fait ! Cela devait être mon destin d’être comédienne, même si cela sonne un peu bateau dit comme ça…

Que faites-vous quand vous ne jouez pas ?

D’abord, il y a tout ce qui tourne autour de la sortie du film, comme la promo par exemple. Je lis par ailleurs beaucoup de scénarios pour trouver de nouveaux projets. Je gère également toutes les petites choses du quotidien. Je n’ai pas tourné les six premiers mois de 2014 mais je n’ai pas eu pour autant une minute à moi car je me suis occupée des enfants. Le temps passe si vite… Aussi, j’adore cuisiner et recevoir. Je fais du sport : du tennis, de la danse, un peu de yoga. Mais comme je m’ennuie facilement, je dois changer souvent.

Votre définition du style ?

Je dois être à l’aise, donc quand je m’habille cela doit rester un plaisir, ne pas demander d’effort. J’aime porter des pièces fortes, comme un smoking Saint Laurent par exemple, sans que ce soit pour autant extravagant. Moderne, chic, classique même parfois, tout dépend de mon humeur. Je peux me sentir inspirée aussi bien par Kate Moss qu’Audrey Hepburn. Ma garde-robe déborde de vêtements d’Isabel Marant, c’est le genre de choses que j’adore porter tous les jours. Je craque aussi pour les robes de Roland Mouret et les créations de Chloé ou de Stella McCartney.

Est-ce vrai que le tapis rouge des grandes premières vous impressionne encore toujours ?

Je m’habitue mais cela reste quelque chose d’intense. C’est tout sauf naturel ! Le plus étrange, c’est d’être entouré de personnes qui crient votre nom dans toutes les directions. Vous regardez à gauche, à droite, vers celle qui vous appelle mais cela vient de tous les côtés. On ne sait plus du tout où donner de la tête, littéralement. Sans même parler des flashes qui crépitent sans arrêt.

PAR ISABELLE WILLOT

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