Cap sur Rio de Janeiro ! Là où se niche une superbe demeure Art nouveau. reconvertie en merveilleuse résidence de vacances. Poussez la porte de la Casa Amarelo, la maison du bonheur.

Parce qu’il est tombé amoureux de l’exubérance de Rio de Janeiro, et parce qu’il ne fonctionne qu’au coup de c£ur, Laurent Gélis a redonné vie à une villa 1900 découverte dans Santa Teresa. Entre elle et lui il y avait une séduction, peut-être son aspect désuet. Et puis le quartier lui convenait bien : autrefois habité par la haute société qui avait fait construire de somptueuses propriétés avant de les déserter, il est aujourd’hui bohème et authentique, peuplé d’ateliers d’artistes et de villas restaurées. A Paris, il dirige Robert le Héros, marque iconoclaste de textiles et d’accessoires dont les motifs et les couleurs émerveillent l’univers de la décoration. Son nouveau chez-soi carioca, version vacances, décontracté et chaleureux, allait refléter la fraîcheur de ses collections.

Une harmonie tout en contrastes

Le jardin, petit paradis tropical, crée un écrin de palmes à Casa Amarelo, ceci sous le signe de l’intimité préservée. La cascade Belle Epoque, dessinée en courbes extravagantes, dissimule les marches abruptes qui grimpent sur les terrasses jusqu’à la piscine. Agrippée à flanc de  » morro  » , la maison épouse la pente accidentée. Construite en 1904, elle a hérité des formes ornementales de l’Art nouveau qui fleurissait en Europe : tour carrée, fenêtres ouvragées, carrelage en mosaïque. Depuis la véranda carrelée de céramique vert jaspé où tout l’art est de jouer avec les ouvertures – une façon d’effacer les murs au profit du paysage environnant -, le regard embrasse le  » centro  » de la ville. L’ascenseur centenaire, toujours en état de marche, entendait incarner les valeurs d’innovation, de luxe et de confort de l’époque. Il était important pour Laurent Gélis de faire de ce passé conservé la plus belle des inspirations colorées de Robert le Héros.

Le but était aussi d’inviter les amis. Il fallut abattre deux cloisons pour créer un grand salon. Installer les chambres. Ajouter des salles de bains. Inventer un nouveau credo où le mot couleur joue avec blanc et simplicité. Laisser la part belle au bleu de Xian et à l’anis étoilé, au gris rocher, au gris zinc et à l’aubépine, des nuances toutes prêtes trouvées chez Leroy Merlin en France qui s’accordent à celles des tissus. Dans ce creuset de tous les possibles, la palette créative annonça le choix du mobilier Made in Brasil. Banco pour les années 1950 chinées chez les antiquaires de la rua Lavradio dans le quartier de Lapa ou aux puces de Praça XV le samedi matin.

En réalité, la maison allie les contrastes à une harmonie d’ensemble. Il suffit d’arpenter les pièces pour comprendre le dépareillé composable entre la table basse avec piétement en jacaranda du renommé designer Sergio Rodrigues, la console héritée des anciens propriétaires, les chaises de la salle à manger rajeunies, les chandeliers baroques et une suspension japonisante.

Aux couleurs  » Blossom Pop « 

Quand la couleur est secouée au shaker d’une inspiration pop, corsée d’une fraîcheur seventies, le cocktail, aussi tonique que multicolore, s’appelle  » Blossom Pop « . Il s’accompagne d’un confortable fauteuil orange  » survitaminé « . On le mixe, à l’envi, aux rayures  » Tang  » de la chaise longue et autres fleurs poétiques sur les gros coussins. Le blanc, sa clarté apaisante, procure une sensation choc : le silence, la lumière, l’appétit des couleurs. Les amis sont de plus en plus nombreux à investir la place. L’idée pointe d’accueillir aussi les hôtes de passage. Avec sa façon improvisée de recevoir et d’offrir du plaisir, elle séduit les âmes plus sensibles à la simplicité des choses qu’au luxe palace.

Il suffit d’une charpente de plafond peinte en  » Sans Souci  » orange, une banquette ancienne chinée et tapissée de toile rayée, un jeté de fleurs  » Après la pluie matin  » sur le lit pour propulser la pièce dans une dimension contemporaine. La salle de bains a ce goût frais de berlingot orange-menthe croqué sous la douche en chantonnant une samba légèrement jazzy de Mariana Aydar, voix prometteuse de la nouvelle scène brésilienne. La cuisine joue, elle aussi, les couleurs fruitées d’ananas et de citron vert. Mais comme il faut malgré tout garder les pieds sur terre, Marcia nous régale d’une  » feijoada  » aux haricots noirs et du soufflé de chouchou (légume brésilien). Et, pour rompre la monotonie de tous les jours, elle utilise l’appétissante gamme de nappes et de vaisselle qui se met à table avec un désassorti spontané.

Peinte de bas en haut, à peine habillée de tissus multicolores, la maison s’est inventé une bulle de fraîcheur pleine de joie de vivre. Pour effacer la pesanteur du passé et recréer un autre paysage, le safran s’invite dans le couloir, rejoint par des tons pastel qui soulignent la perspective jusqu’au salon. Peindre en blanc les arcatures meringuées et les portes à double battant, c’est mettre en valeur les éléments architecturaux témoins d’une époque. C’est aussi magnifier la charpente de la chambre blottie dans la tour. L’espace, dégagé de meubles, semble flotter dans une lumière irréelle. Tablettes de chevet et lampes en plâtre participent à cet effet visuel. Coussins  » Anis Etoilé « , série de colliers multicolores et jeté de lit Clair de Lune ramènent à la règle du jeu de la maison : légèreté, mixité et fantaisie, une manière personnelle de construire son art de vivre. Et Laurent Gélis d’affirmer sa différence envers et contre toute tentative de standardisation :  » Robert le Héros ressemble à son équipe, c’est une marque qui rêve encore « .

Merci à Matthieu Romançant qui nous a accompagnés dans la réalisation de ce reportage.

Carnet d’adresses en page 48.

Geneviève Dortignac – Photos : Henri Del Olmo

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