Les beaux défis de VANESSA PARADIS

Chaque année, miss Paradis est à son sommet. En 2010, elle a triomphé au cinéma avec L’Arnacour, de Pascal Chaumeil, mais aussi côté chanson. Sa tournée acoustique – qui passe par Liège, en janvier prochain – fait l’objet d’un CD et DVD live (*). Et ses plus grands moments télévisés sont compilés dans une anthologie. Rencontre dans un palace parisien.

Le film de sa vie d’artiste défile dans une anthologie.  » La première fois, j’ai carrément eu du mal à la regarder, nous confie Vanessa Paradis : tellement de gens ont disparu. Et puis, il n’est jamais facile de se voir, et encore moins à travers les décennies.  » Bien des images d’elle se superposent au fil de ces vingt années, mais, dans l’imaginaire collectif, elle reste d’abord l’adolescente de Joe le taxià  » Moi, j’ai plus de recul, dit-elle. Je vois l’enfant, la personne adolescenteà Ce ne sont pas simplement des images, mais des sensations qui reviennent, des moments qui en rappellent d’autres. C’était vraiment intense à voir. « 

Comment jugez-vous après coup toutes ces expériences ?

Il y a un chemin de parcouru, oui. Après, mon £il est plutôt neutreà L’anthologie est un objet dont je suis très fière. J’étais surprise de faire partie de cette collection prestigieuse. Mais je n’ai pas envie de tout disséquer, ça devient trop intime. Je viens en plus de le faire pour mon best ofà Je pensais qu’on se voyait pour parler de l’album et du concert live.

Justement, ce CD live est né de cette compilation ?

Oui, à l’occasion de la sortie de ce disque, j’ai fait un showcase (concert privé) de trois quarts d’heure. Sur scène, c’était un tel bonheur, tout le monde avait envie de prolonger l’aventure et cela s’est fait : au Casino de Paris, à l’Opéra de Versailles, dans les festivals. Et d’ailleurs, on y retourne. On va se produire en Europe, au Canada, au Japon probablement.

L’un des moments clés de ce concert, c’est le passage de La Ballade de Lily Rose et de Jackadi, où vous vous accompagnez à la guitare, seule sur scène ?

Dans un spectacle acoustique, qui dénude les chansons, où on les joue avec du bois et des cordes, ça me paraissait logique de proposer ne serait-ce qu’un morceau guitare-voix. Voir l’artiste ainsi, c’est précieux, je le sais, j’aime en être spectatrice. Il était difficile pour moi qui ne suis pas une musicienne accomplie d’arriver à le faire correctement, seule sous les projecteurs. J’avais l’impression de me trouver au bord d’une falaise, c’était vertigineux. Mais c’était à la fois une responsabilité et un défi.

D’autant que ce sont des chansons que vous avez vous-même composées ?

Depuis Bliss, je compose, c’est la satisfaction de participer à la recherche et à la création. La pratique est difficile. Tu cherches, tu cherchesà c’est interminable et, quand tu réécoutes le lendemain, rien ne te plaît. (Rires.) Aujourd’hui, je trouverais qu’il manque quelque chose dans un de mes albums s’il n’y avait pas au moins une chanson de moi.

Revenons à cette anthologie et à l’évolution de votre lookà

J’ai vu de drôles de choses, de drôles d’accoutrements, des maquillages infects. Il y avait du bon et du mauvais, mais c’est bien, ça marque les époques, ça montre les années qui passent. La transformation est fulgurante. Moi, j’ai toujours aimé les vêtements. Le shopping, tout ça, aucun problème. Après, forcément, à l’adolescence, on se cherche un style, on en essaie plusieurs, on les mélange même. Et ça continue encore ! On met des habits qu’on vient d’acheter avec de vieux trucs retrouvés dans des valises, dans des cartons.

Vous aviez tourné, en 1991, cette fameuse publicité pour le parfum Coco de Chanel, dont vous êtes désormais l’égérie.

Ah, c’était tellement original, cet oiseau en cage épié par un chat. Plutôt qu’être habillée en robe du soir, mystérieuse, et de courir vers son bien-aiméà C’est un grand privilège de travailler avec Chanel et de vivre à chaque fois des expériences fortes et différentes. J’ai chanté pour la marque à Shanghai. Joué à la pétanque à Saint-Tropez. J’en ressors toujours avec des étoiles plein les yeux. C’est l’esprit de Karl Lagerfeld. Il a le coup de crayon, le talent, la spontanéité, l’humour.

Vous tournez actuellement Café de Flore, de Jean-Marc Vallée. Qu’est-ce qui vous a décidée à accepter ce rôle ?

À chaque fois que je lis ce scénario, je finis à bout de souffle tellement ça me plaît. C’est un film sur l’âme s£ur. Je joue une mère de famille dans le Paris des années 60. D’où ma coiffure actuelle. Je suis un peu habillée en mémère, ce ne sera pas le superlook de Françoise Hardy ni celui de Brigitte Bardot. C’est génial quand le costume peut aider l’actrice que je suis. Ne pas se sentir soi-même dans les vêtements, cela aide à composer.

Juliette Binoche parle de sororité entre les comédiennes. Ce sentiment existe-t-il entre les chanteuses ?

Ce qui peut nous relier, c’est la scène : on sait le bonheur que la musique procure, non seulement à écouter mais aussi à faire. Le lien, c’est aussi le risque, l’audace, le courage et l’inconscience. Peu importent les styles et la façon de le faire.

Quel est votre dernier coup de c£ur musical ?

Janelle Monáe me rend dingue. Elle est époustouflante. Ce qu’elle présente est parfait : la production de son album The Archandroid, la manière dont elle chante, danseà

Vous avez dit, à propos de Jeanne Moreau :  » On a toutes envie d’être comme elle : forte, belle, courageuse, féminine et masculine à la fois.  » C’est une définition de l’artiste ?

Pas forcément une définition de l’artiste ; de la femme. Je pourrais l’appliquer à une archéologue, à une médecin. Et même à un homme. Oui, parlons d’un homme ! (Rires.)

(*) Une nuit à Versailles, CD et DVD. Anthologie. 1987-2007,

coffret 2 DVD (Barclay/Universal). En concert au Forum, à Liège, le 19 janvier prochain.

www.leforum.be

PAR GILLES MÉDIONI

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