Barbara Witkowska Journaliste

Zoom sur les collections Croisière des grandes griffes de mode. Des créations à haute valeur séduction ajoutée.

De la nouveauté, sans cesse renouveléeà Telle est la règle d’or des grandes maisons. Pour éviter les temps morts entre les collections été et hiver, Chanel a lancé, au début des années 2000, la collection de demi-saison, baptisée Croisière. Depuis lors, Louis Vuitton et Versace lui ont emboîté le pas, pour rassasier les  » serial shoppeuses « à

Rapide flash-back. En 1983, lorsque Karl Lagerfeld prend les rênes de la création de la griffe au double C, il innove en lançant, au début de l’hiver, quelques pièces légères et habillées. C’est en 2004 que de vraies collections, construites autour d’un thème, voient le jour. La première défile sur une péniche sur la Seine, celle de l’année suivante, dans des anciens bus parisiens. En 2006, pour offrir un vrai dépaysement, le défilé Croisière traverse l’Atlantique et investit le Grand Central Station à New York. En 2007, l’effet de surprise joue à fond à l’aéroport Santa Monica à Los Angeles et se poursuit, cette année, sur Miami Beachà

Zen attitude chez Louis Vuitton

Amorcée discrètement en 2001, la collection Cruise du malletier parisien atteint aujourd’hui sa vraie vitesse de croisière avec une vingtaine de silhouettes et de nombreux accessoires. Pas d’extravagances ni de modèles outranciers. L’esprit est plutôt sage et BCBG. Les coupes rigoureuses, l’allure, dans l’ensemble, calme et élégante, sont conçues aussi bien pour la ville que pour les soirées plus  » tralala  » au bord de la mer. Inspirés par le sportswear haut de gamme, d’innocentes robes-manteaux voisinent avec des shorts, des jupes droites et des hauts rehaussés par un jeu de boutons, de n£uds ou de broderies pailletées.

Le colorama frais et vitaminé juxtapose le blanc, le turquoise et le fuchsia. L’incontournable noir s’invite çà et là. Parfois, les silhouettes monochromes ou bicolores s’égayent de  » bandes aquarelles  » imaginées par l’artiste londonienne Tanya Lang. Pour le soir, il y a le choix entre deux propositions éblouissantes : une robe en jersey fluide couleur pêche drapée gracieusement autour des épaules ou une combinaison-pantalon en crêpe de soie rose vif, un sympathique clin d’£il aux seventies.

La beach attitude prend aussi de l’ampleur dans la collection d’accessoires, en associant une panoplie de maillots dont ce modèle noir aux fines lanières entrelacées, une nouvelle version du Mongram en Néoprène rose ou orange fluorescent, des visières, des paréos, des lunettes XXL et des  » bijoux de peau « .

Esprit rockissime chez Chanel

C’est sous le soleil de la Floride que la prestigieuse maison parisienne a présenté son défilé Croisière, en mai dernier, en présence de 300 happy few triés sur le volet, conviés au Raleigh, mythique hôtel Art déco au bord de Miami Beach.  » Miami est un endroit hors du temps, hors de toute contrainte, a déclaré Karl Lagerfeld, directeur artistique de Chanel. C’est la détente, la plage et le soleil toute l’année. C’est l’idée du  » easy living « , de prendre du temps pour perdre du temps. « 

L’esprit de la collection ? Rock on the beach. Karl Lagerfeld a imaginé une Mademoiselle moderne, un brin rétro qui emporterait dans ses bagages des pantalons larges en jean blanc ou en satin de soie, mais pattes d’ef dans l’esprit 1970. Le blanc côtoie le noir, incontournable, ou encore le gris, la nouvelle couleur montante. Bien présents, aussi, quelques pastels dont un rose très  » sweet « . Ils empruntent leurs tonalités aux immeubles Art déco de Miami.

L’iconique veste en tweed est en version micro, terminée par des manches en PVC transparent. Les tops sont minuscules, les minijupes idem. Le tout ultrabrodé de camélias, orné de perles et de chaînes. Le soir, on choisit en fonction de son humeur la veste en paillettes grises (déclinée aussi au masculin), très rock, ou encore la purissime et angélique robe longue en satin blanc, décolletée en biais sur une épaule. Côté accessoires, on épingle parmi les futurs must-haves : les escarpins à talon revolver.

Paillettes et couleurs chocs chez Dior

Depuis trois ans, date du lancement de Cruise, la maison présente ses collections à Manhattan, à New York, dans une mise en scène  » dolce vita  » très spectaculaire. Les points forts du cru 2009 ? Le décor Acapulco des années 1950 plus vrai que nature, une fausse piscine et un hommage à Tony Duquette, extravagant créateur et designer de la grande époque hollywoodienne, disparu en 1999. Plus exubérant et déchaîné que jamais, John Galliano a suivi à la lettre la célèbre maxime de Diana Vreeland :  » Ne jamais avoir peur d’être vulgaire mais ennuyeuse « .

Pas de lieux communs ni de banalités, donc, dans un défilé haut en couleur et plein de références exotiques. La palette chromatique ose les duos improbables rose indien/mandarine, émeraude/bleu lagon ou marine, vert anis/jaune soufre. Fleurs tropicales, orchidées, jaguars et décors d’inspiration maya envahissent des matières fluides et liquides. La collection très soir et rétro glam dévoile des broderies baroques à foison, des pantalons larges en lamé or, des pantalons indiens courts et moulants, des robes de cocktail entièrement volantées et des caftans vaporeux. Juchés sur des talons vertigineux, coiffés de sombreros dorés,  » lestés  » de minaudière luxueuse, les mannequins invitent le public à  » profiter du paradis sur Terre aux couleurs Dior « .

Rétrofutur chez Versace

La séduction à son apogée révèle une femme reine de jour comme de nuit. Cette saison, elle hésite entre une préciosité d’hier magistralement remasterisée avec un futurisme arty. La nostalgie s’exprime à travers des palettes chromatiques empruntées aux  » civilisations anciennes disparues « . L’intensité des faux sombres précieux (fuchsia, orange, bleu) contraste avec la clarté des pastels et la douceur des tonalités sable. La féminité tout en légèreté poursuit sa conquête à travers des matières aux effets impalpables, inspirés de l’époque victorienne. Les pantalons (très) taille basse et (très) slim sont portés avec des blouses vaporeuses en mousseline ou avec des vestes militaires plus structurées. Le plissé, omniprésent, revisite avec poésie l’héroïne romantique.

A l’opposé de cette sophistication rétro, on trouve des éléments pointus et modernes, fournis par le travail de l’artiste Giacomo Balla (1871-1958). L’une des grandes figures du courant futuriste italien, il est célèbre pour sa recherche sur le dynamisme de la couleur et de la lumière. De nouvelles techniques de coupe et des motifs peints à la main ont permis de se rapprocher au plus près de cette étude, en créant des effets de mouvement totalement inédits. Dans les accessoires, enfin, des peaux irisées et nacrées y impriment un esprit joaillier fait de préciosité et de légèreté.

Barbara Witkowska

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