Les jeunes designers belges sont bien décidés à faire parler d’eux dans les prochaines années. Leurs expositions se multiplient, les distinctions suivent. Zoom sur ces nouveaux talents aux univers particuliers et aux inspirations nouvelles.

Carnet d’adresses en page 178.

Ils sont nombreux, ces jeunes designers fraîchement sortis de l’école. Pour la plupart, ils ont souvent complété leur formation hors de nos frontières dans les grands instituts de design européen, comme le Royal College of Art de Londres ou l’Ecole d’Art de Lausanne. Ils sont revenus au pays pour pratiquer leur passion de l’objet. Il n’y a pas de style belge à proprement dit, chacun cherche sa voie et sa personnalité propre dans la création. Parfois en emboîtant le pas aux tendances actuelles, mais très souvent en les prenant à contre-pied comme on sait si bien le faire chez nous.

Les bijoux contemporains de Michel Delpérée

Avec des formations diverses, en bijouterie, sculpture et peinture, il est tout à fait naturel que Michel Delpérée ait acquis une vision ouverte et plurielle des objets qu’il conçoit. Il s’est très tôt intéressé au bijou qu’il considère comme une sculpture. Ses mélanges insolites de matières surprennent. Grâce à un travail de facture artisanale, il réalise des pièces au style novateur, tout en leur donnant des formes disciplinées et maîtrisées. Sa spécialité c’est le contemporain avec des matériaux (comme l’or et l’aluminium, mais aussi des résines et de la silicone) alliés en formes linéaires et en motifs architecturaux.

Michel Delpérée a participé à de nombreuses expositions collectives en Belgique et à l’étranger. Des expositions permanentes de ses £uvres ont été montées à la galerie Néon et Chez Garance, à Bruxelles, tandis que certaines de ses créations ont été acquises par la Communauté française de Belgique dans le cadre d’une sélection d’£uvres d’artistes belges contemporains.

Le design intelligent d’Elric Petit

Lauréat du Prix du Jeune Design belge en 2003 et du prix Design for Europe en 2002, Elric Petit continue son petit bonhomme de chemin. En 2004, il rafle encore un prix à la Fondation belge pour la Vocation. Une formation solide de designer, notamment à La Cambre à Bruxelles et à l’Ecole d’Arts de Lausanne, l’a amené à se questionner sur la conception de l’objet et sur sa légitimité. Il prône un design intelligent, qui s’illustre par une conception fonctionnelle et contemporaine : sa  » Baladeuse  » en silicone s’inspire, par sa forme, des capuchons cylindriques servant à cacher les éléments électriques du plafond. Par un simple retournement, cet objet habituellement fixe se voit attribuer une fonction d’abat-jour mobile. Elric Petit réinvente également le patrimoine du design en adaptant des formes classiques à de nouvelles fonctionnalités. Pour preuve son tréteau  » Nestor  » qui reprend ainsi des formes traditionnelles d’ébénisterie.

En plus de ses travaux personnels, Petit a honoré une commande pour l’Orchestre philharmonique de Liège et créé une sculpture pour le prix  » Caïus  » de la Fondation Prométhéa.

Les lumières de Nathalie Dewez

Sa conception de l’espace et de l’objet acquise lors de ses études en Mobilier et Agencement à La Cambre a conduit Nathalie Dewez à s’intéresser à la lumière :  » parce qu’elle fait partie intégrante de nos vies, à l’intérieur comme à l’extérieur. Elle intègre tous les espaces et nous en donne une perception chaque fois différente. Elle modèle, souligne ou fait disparaître « .

La jeune femme affectionne le mélange des lumières artificielle et naturelle. Toujours à la recherche de l’équilibre entre les deux, elle s’est orientée vers la conception de luminaires d’ambiance.

Son travail s’inspire aussi du végétal ; avec des heracleums qui portent leurs graines en vastes halos blancs, de hautes herbes qui se balancent, des corolles. Les structures sont souples et résistantes. C’est avec toute la douceur des diodes électriques que ses créations s’endorment le matin pour se réveiller le soir.

Les formes aléatoires de Sylvain Willenz

Sylvain Willenz a fait ses études au Royal College of Art de Londres. Tout comme Elric Petit, il a reçu le Grand prix de Design for Europe à la Biennale Interieur en 2002. Depuis, il travaille à Bruxelles comme designer de produit. Ses créations portent le plus souvent la marque du procédé, contrôlé ou non, qui leur a donné forme. Ses produits sont toujours étudiés pour une production en série, même si le fini n’a pas une apparence industrielle. Ainsi, pour sa série  » Dr Bamboozle « , il est parti d’un procédé ultrasimple, des tiges de bambous sanglées pour former une assise (un banc ou un tabouret). Le tout est ensuite trempé à froid dans le caoutchouc liquide. Une fois l’ensemble sec, les sangles sont retirées et le caoutchouc assure la cohésion de l’objet. Le bambou est utilisé dans un environnement culturel occidental libéré de sa connotation ethnique, ce qui lui insuffle une substance nouvelle et contrastée.

Pour Sylvain Willenz  » ce qui fait la beauté d’un objet n’est pas seulement sa forme, mais bien plus sa conception et son contenu idéologique, dans un contexte vaste et actuel « .

Le néo-traditionnel de Marina Bautier

Après ses études de design de mobilier en Grande-Bretagne, Marina Bautier revient à Bruxelles pour se consacrer à sa passion, la création de meubles et d’objets usuels. Certains sont développés en petites séries, d’autres conçus pour une production plus industrielle. La jeune femme planche aussi actuellement sur quelques projets d’aménagement d’intérieur.

De la conception de sacs pour la maison d’édition Posso à la fabrication de tabourets de salles de bains, en passant par des accessoires de jardin, Marina Bautier garde un esprit et une ligne fluides et simples. Elle renoue ainsi avec une tradition bien belge d’objets de caractère et très personnels.

La métallurgie de Marc Savary

Systèmes mécaniques complexes ou tentacules de métal déployées qui, dirait-on, sont tout droit sortis d’un épisode de  » La Guerre des Etoiles « … L’univers de Marc Savary, fait d’acier et de souvenirs d’enfance, est nourri de science-fiction et de robotique. Ce passionné de bricolage a bouclé des études en design industriel à La Cambre, avant d’entrer dans un bureau d’études. Mais ses rêves prennent vie chez lui pour engendrer des £uvres personnelles et uniques, comme sa surprenante lampe-robot aux mécanismes insolites. Manipulables à souhait, ses créations sont des jouets pour les grands. On s’amuse à les voir et à les toucher. Marc Savary utilise principalement des pièces de récupération qu’il remodèle et qu’il assemble. L’aspect inachevé des objets désarçonne, il s’agit de nous conduire vers un intemporel fait de ferraille, de diodes et de câbles.

La présence de Marc Savary dans quelques grandes biennales européennes a bien sûr étonné, dans ces lieux où les formes épurées règnent en maître. Mais, grâce à lui, le design contemporain adopte une note plus ludique et excentrique.

Le design sensitif d’Evelyne Gilmont

Evelyne Gilmont n’est plus ce que l’on pourrait appeler un espoir, mais elle reste néanmoins une personnalité singulière dans le monde du design en Belgique. Après des études d’architecture d’intérieur, elle devient professeur de design à l’Ecole supérieure des Arts plastiques et visuels de Mons. Elle conçoit pour le plaisir, s’inspire de la vie quotidienne, travaille à partir de sensations. Evelyne Gilmont insuffle la vie dans ses créations en les insérant dans le mouvement et la mobilité : elles s’ouvrent, se ferment et changent de fonction en même temps. Ses chaises se transforment en espaces de rangement ; selon l’état de fatigue de l’utilisateur, son tapis de sol se mue en un pouf confortable ou en un espace de repos ouvert ; son paravent grandit et retrécit au gré des envies et des besoins. Son design intelligemment fonctionnel se veut simple et adaptable. La Grand-Place de Mons accueillera bientôt une de ses créations en mobilier urbain : des chaises bien sûr !

Cuong Nguyen

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