Qui n’a pas rêvé un jour de se louer une  » cabane  » tout en rondins de bois au bord d’un lac perdu dans l’immensité des somptueuses forêts québécoises ? Si, jusqu’il y a peu, ce désir confinait au mythe, seul privilège des trappeurs et autres coureurs des bois, il est désormais réalité. Voyage au cour d’une nature grandiose et authentique.

L e feu crépite doucement dans le chalet encore endormi. Sans bruit, le premier levé ajoute de nouvelles bûches dans le poêle à bois. Aussitôt, celui-ci se met à dégager une agréable chaleur dont le fumet exquis embaume généreusement toutes les pièces. Les premiers rayons du soleil irisent la crête des épinettes noires tandis que, puissant et mélodieux, le chant du huard à collier perce la brume toujours délicatement accrochée aux bords du lac. Un, puis deux écureuils prennent alors place sur le bord de la fenêtre, semblant deviser sur la beauté du jour qui se lève. En bons citadins, l’envie de battre tambours et sonner trompettes pour partager ce moment d’émerveillement avec les autres semblerait logique. Mais passée la première excitation, force est de constater que les minutes s’égrènent et que les joyeux drilles n’envisagent point de s’en aller. Sans doute un clin d’£il, une invitation à remettre nos pendules à l’heure. De prendre conscience que nous sommes au c£ur d’un des nombreux parcs nationaux du Québec et qu’ici la nature est reine.

Fort judicieusement, le gouvernement a pris conscience depuis quelques années du patrimoine extraordinaire qu’il avait à sa portée et s’est engagé (via la Sepaq – la société des établissements de plein air du Quebec) à protéger et à aménager les 22 parcs nationaux que compte aujourd’hui le Québec. Le but premier étant la préservation des milieux naturels typiques à chaque région mais aussi l’accessibilité au public à des activités de plein air, ludiques ou éducatives. L’aménagement de structures adaptées et conviviales ainsi que l’affectation d’équipes compétentes et motivées à la gestion quotidienne des parcs a permis de réhabiliter et de redynamiser complètement l’ensemble du réseau. Des offres de séjours plus attrayantes les unes que les autres ont donc vu le jour et connaissent un succès qui ne se dément pas, que du contraire.

Envie de séjourner dans un chalet  » à l’ancienne  » (le  » René Richard « ) entouré de lichens plusieurs fois centenaires, au bord d’un superbe lac ? Rendez-vous alors au parc des Grands Jardins (région de Charlevoix), célèbre pour ses plans de pêche incontournables et sa taïga impressionnante, végétation qu’on ne trouve normalement que dans le Grand Nord canadien. Envie de camper en pleine nature, isolés de tout ? Embarquez-vous alors pour la formule canot-camping du parc Frontenac (région des Cantons de l’Est). Une idée originale où, après avoir rangé vos bagages dans un canot qui vous est alloué le temps des vacances, vous ramez jusqu’à votre emplacement personnel et en prenez possession en toute quiétude (les meilleurs sites : 3A/3B ou 5A/5B/5C). Passer la nuit bercé par le clapotis du lac Saint-François et la journée à taquiner le poisson dans un décor idyllique est une expérience inoubliable ! Pour les familles qui voudraient vivre des moments intenses en pleine nature sans pour autant être trop excentrées par rapport à un centre d’activités ou à une ville, la Sepaq gère également huit centres  » écotouristiques  » forts prisés pour leurs hébergements confortables mais aussi pour tous les forfaits qui y sont proposés. La station  » Duchesnay « , à 30 minutes en voiture de la ville de Québec, est idéale pour des vacances avec enfants. Elle comprend une aire de jeux spécialement aménagée pour eux, un centre d’interprétation de la nature, de multiples activités sportives (vélo ou encore kayak) ou d’excursions propres à éveiller et sensibiliser chacun à l’importance de la connaissance et de la préservation des forêts (découverte, survie, orientation).

Flambée des couleurs

Au printemps, lorsque les verts tendres chassent les dernières traces d’un hiver long et rigoureux, tout le monde s’extasie devant cette nature comme ressuscitée. L’été prolonge cet état de grâce avec à la clé, de belles journées chaudes et ensoleillées comme nous les connaissons en Europe. Mais lorsque l’été indien (de la fin septembre à la mi-octobre) s’en vient et que les ocres, les rouges, les jaunes, les verts rivalisent de nuances et d’intensité et parent les millions de feuilles de couleurs vives et chatoyantes, le spectacle est absolument féerique. Ces changements de couleurs sont essentiellement dus à la diminution des heures de lumière dans la journée, à la température du moment mais aussi à l’acidité du sol. La chlorophylle des feuilles (les plus marquées sont celles des érables) meurt. Les feuilles laissent alors apparaître des pigments rouges, jaunes et oranges dominants. D’emblée, la magie opère. On comprend mieux pourquoi cette période de l’année est tellement sollicitée et appréciée. Soyez sur vos gardes : séduits par tant de beauté, vous pourriez aisément et irrémédiablement  » tomber en amour  » de cette  » Belle Province  » unique en son genre.

Quand de grand matin, Pierre – guide accompagnateur  » Faune Aventure  » lié au parc de la rivière Jacques-Cartier – vous emmène, à travers conifères et feuillus, à la lisière d’un lac pour tenter de voir l’orignal (appelé aussi élan d’Amérique), c’est indubitablement une nouvelle journée riche en émotion qui se prépare. En période de rut, de la mi-septembre au début octobre, Pierre s’adonne au  » call  » (appel) en imitant la femelle en ovulation. Si en réponse aux petits cris aigus qu’il émet via un cornet, de petits bruits plaintifs et sourds vous reviennent en écho, attendez-vous alors à admirer le plus gros représentant de la famille des cervidés (le mâle peut peser jusqu’à 500 kilos). Un moment extraordinaire. Une prise de conscience également de toute cette faune sauvage qui vous entoure. Ici, comme dans tous les parcs, la vie animale évolue à son rythme sans se préoccuper des aménagements réalisés par l’homme. Vous pourrez à l’occasion croiser un ours noir, admirer un castor à l’£uvre, surprendre un lièvre ou un renard roux. Les animaux étant instinctivement craintifs, vous ne devez toutefois pas en avoir peur. Vous vous en tirerez, tout au plus, avec quelques frayeurs si un ours s’avisait de venir goûter vos brochettes ou de finir votre spaghetti bolognaise. A ce jour, il n’y a jamais eu d’accident et les anecdotes de ce genre se comptent sur les doigts de la main. En revanche, s’il est une autre espèce qui pourrait vous donner quelques soucis, c’est bien celle des  » maringuoins « . C’est ainsi que nos amis les Québécois appellent ces misérables et voraces bestioles que sont les moustiques. De la mi-juin à la fin août, le festival du maringuoin et autres mouches noires bat son plein. Une solution efficace : porter des vêtements longs et légers et s’enduire d’une bonne dose de produit répulsif.

L’auberge du  » Mange Grenouille « . Voilà un nom qui interpelle. Pour l’explication, sachez que dans des temps plus anciens, quelque part en Angleterre, l’idée qu’on se faisait des Français était celle de gens qui, bizarrement, se nourrissaient de batraciens. D’où est née l’expression  » frog eaters  » (mangeurs de grenouille). C’est également le nom dont furent affublés les Québécois au XVIIe siècle au Canada anglais. C’est donc pour faire un clin d’£il à d’anciens souvenirs et non sans un certain trait d’humour que Jean, un Français, a ouvert l’originale et fabuleuse auberge du  » Mange Grenouille « . Un vrai coup de c£ur. Romantique et théâtral, le lieu donne le sentiment d’intégrer une superbe maison de poupées élégamment et minutieusement décorée. Les chambres (le grenier des amoureux est croquignolet !), le restaurant, le salon, le service, tout y est soigné à l’extrême et de bon goût. Mais des adresses comme celles-ci se méritent. Il vous faudra en effet vous rendre dans le village du Bic, au nord-est de la ville de Québec et sur l’autre rive du fleuve Saint-Laurent. Une bonne raison de profiter de la route à parcourir pour visiter d’autres sites et parcs intéressants. Itinéraire conseillé : depuis la ville de Québec, se rendre jusqu’aux Escoumins en privilégiant deux arrêts. Le premier étant la jolie petite bourgade de Baie-Saint-Paul avec ses maisons typiques et ses nombreuses galeries d’exposition. La seconde étant Tadoussac pour un arrêt au centre d’interprétation des mammifères marins. Passionnant et interactif, le centre permet de mieux comprendre le milieu marin du fleuve Saint-Laurent. Une fois ces notions assimilées, ne ratez pas l’occasion d’une excursion en bateau à la rencontre des baleines, cela en vaut vraiment la peine. Pendant la haute saison, préférez un départ depuis Bergeronnes (moins de monde et proche de Tadoussac). Ensuite, traversée du fleuve depuis les Escoumins jusqu’à Trois-Pistoles. Puis sur la route menant à Rimouski, vous parviendrez finalement au village du Bic. Après vous être restauré à l’excellente table de l’auberge du  » Mange Grenouille « , faites un tour du côté du parc national du Bic. Situé dans l’estuaire maritime du Saint-Laurent, ses caps, ses baies et ses reliefs sauront vous inspirer une randonnée agréable et vivifiante. Pour les plus courageux, un bon canot et quelques coups de rame vous mèneront un peu plus au large où, surprise agréable, une petite colonie de phoques gris viendra sans doute vous taquiner. Lorsqu’il sera temps de faire demi-tour, peut-être aurez-vous la chance d’assister à un splendide coucher de soleil reconnu comme l’un des plus beaux au monde.

Reportage texte et photos : Hervé Diard / Planet Pictures n

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