Du côté d’Aubel, les formations de Valérie Mostert permettent à tout un chacun de se réapproprier l’acte de manger. Itinéraire d’une biogastronome qui a la nature pour source d’inspiration.

C’est l’histoire de quelqu’un qui refuse d’être un pion dans les mains de l’industrie agroalimentaire. Quelqu’un qui n’accepte pas de couper le cordon qui le rattache à la terre et qui fait de ce lien indéfectible son métier. Du plus loin de ses souvenirs d’enfance, Valérie Mostert se rappelle avoir eu la campagne comme toile de fond de son existence. La ferme de ses grands-parents. Les animaux. Les interminables balades à vélo. Autant d’éléments marquants qui l’ont construite. Après des études en philologie germanique et un master en études européennes l’ayant ouverte sur l’altermondialisme, la jeune femme part à la découverte d’autres horizons. Elle choisit l’Amérique latine. Pas en séjournant dans les hôtels de luxe, bien sûr, mais en partageant quatre saisons en épousant les rythmes des paysans de là-bas. C’est-à-dire en ne faisant qu’un avec la Pachamama, la Terre mère. L’expérience la connecte à l’essentiel : manger de façon frugale, travailler en plein air, vivre de peu. Revenue en Belgique, elle est rattrapée par la question de la subsistance en milieu urbain, un contexte qui isole et dresse les individus les uns contre les autres. Elle débute sa carrière professionnelle dans une société américaine qui organise des séminaires de management. L’expérience dure deux ans. Elle choisit ensuite de voler de ses propres ailes en donnant des cours d’anglais dans des entreprises. Elle commence à Bruxelles et poursuit dans la région de Liège, après s’être installée avec son mari sur le plateau de Herve. L’ancienne étable qu’ils retapent ensemble offre une vue imprenable sur la ferme de ses grands-parents. Ce contexte émotionnellement fort la pousse à réfléchir sur le sens qu’elle veut donner à ce flux imprévisible que l’on appelle une vie.  » Je me suis posé la question de ce que je voulais vraiment faire loin du conformisme. J’ai très rapidement compris que ce qui m’intéressait, c’était vivre au contact de la nature, cultiver la terre, nourrir ma famille d’aliments sains et vivants, transmettre mes connaissances « , explique-t-elle. Partant du principe selon lequel  » quand on veut, on peut « , Valérie Mostert réduit son temps de travail. Les heures qu’elle récupère lui servent à se former. En hiver, elle compulse un nombre impressionnant d’ouvrages pour tout savoir de la nutrition. Au printemps et en été, elle passe la plupart de son temps au jardin pour maîtriser les arcanes de la permaculture, cette approche qui vise une pratique agricole soutenable en s’inspirant des écosystèmes naturels. En plus de cela, elle fait des stages et condense toutes ses lectures dans un mémoire qu’elle intitule A la découverte de la biogastronomie. En 2007, elle décide d’arrêter les leçons d’anglais pour enseigner le fruit de ses recherches à la faveur de cours de cuisine s’insérant dans des formations d’un an, de septembre à juin, à raison d’une session par semaine. Rapidement, le bouche-à-oreille fait son effet, les élèves affluent. Il faut dire que le jardin de Valérie Mostert est un appel à changer de vie. Scandée par une jolie serre en bois et une série de carrés potagers, cette parcelle incarne un art de vivre axé sur le locavorisme et l’autosubsistance alimentaire – on peut en prendre la mesure en lisant Cuisine de la Terre (1), le livre qu’elle a récemment signé. S’il s’agit d’un bel exemple, pas question pour autant de donner dans le sectarisme.  » Je consomme local et de saison, mais je ne veux en aucun cas prôner une approche puriste qui isole du monde. Pour moi, bien manger est plus qu’un comptage de calories ou de vitamines, c’est avant tout un acte joyeux et responsable qui invite au plaisir gastronomique « , commente cette mère de famille de 44 ans. Tolérante, elle l’est clairement. La seule chose qui la fait grimper aux murs, c’est l’argument qui voudrait qu’une nourriture saine et exempte de pesticides serait réservée aux nantis.  » Le problème est une question de priorités. Avant, on consacrait 40 à 50 % du budget à la nourriture, aujourd’hui c’est 10 à 15 %… Ce n’est pas normal. Il faut comprendre qu’en achetant, on vote, on élit le type de société que l’on veut. Si vous faites vos courses dans les supermarchés, vous élisez un monde dans lequel les producteurs sont pressés comme des citrons. Bien se nourrir prend du temps, à chacun d’évaluer si le jeu en vaut la chandelle.  »

(1) Cuisine de la Terre, 80 recettes vivantes pour vos cinq sens, par Valérie Mostert, Racine.

PAR MICHEL VERLINDEN

 » Bien manger est bien plus qu’un comptage de calories ou de vitamines. « 

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