Son dernier roman, Les Vies d’Emily Pearl, est digne des sours Brontë. Le regard noir, souligné d’eye-liner, Cécile Ladjali allie l’ombre à la lumière.

Quelles sont  » Les Vies  » de Cécile Ladjali ?

Celles de professeur, romancière, dramaturge et essayiste. La Française qui, malgré une éducation jésuite, pense à l’Iran tout le temps. La scoute pratiquant l’escrime, qui a décroché un doctorat en lettres. La fille de deux mères : l’adoptive, profondément aimée et disparue trop tôt ; et la biologique, dont je ne sais que penser…

L’écriture est-elle  » un rendez-vous avec votre solitude  » ?

Oui, mais malgré la douleur, il faut s’immerger en soi. Cela ne signifie pas que j’ai la graphomanie du nombril (rires) ! J’écris aussi des pièces, afin de pouvoir travailler avec un metteur en scène.

Qu’aimez-vous dans le genre épistolaire ?

Tout comme mes romans, cette mise en scène du langage est très théâtrale. Généralement, on s’adresse à  » cher papa, chère maman « . Comme ils ne sont plus là, je me réinvente une famille par le biais de l’écriture. Mes histoires parlent de vie et de mort.

L’amour, blessure ou transcendance ?

C’est risqué, tout se joue sur le fil du rasoir. Tout comme la beauté et la création, l’amour nous met en danger. C’est un plaisir, une bagarre, une maladie. Il faut pouvoir tenir cette tension, physique et psychique, qui finit forcément par retomber. En amour, on peut être déçu par l’autre, par soi ou pour avoir trop donné.

Quel est votre rapport au corps ?

Très compliqué… C’est mon seul souci, une lutte solitaire que je déteste. Il paraît que c’est typique des bébés abandonnés. Quand j’écris, je recrée un dialogue qui n’a pas eu lieu.

Votre rapport à la mode ?

J’adore ! Acheteuse compulsive, je suis très coquette. Mes élèves me disent gothique, mais je suis plutôt baroque. J’aime détourner des fringues, mélanger le moderne au rétro, les chaussures Doc Martens à une chemise de grand-mère (rires).

Si vous étiez une couleur ?

Le noir, car c’est ce qui me va le mieux. Cette vraie couleur lumineuse n’est nullement triste. J’y ajoute toutefois une touche de rouge ou d’orange.

Etre une femme c’est…

Avoir la liberté de procréer et de créer. Mes  » bébés  » de papier sont mille fois moins importants que les vrais, mais quand j’engendre un roman, je fais sortir autre chose de moi. L’écriture est souvent incompatible avec la procréation. C’est troublant, tant de femmes écrivains sont marginales… Il n’y a néanmoins pas de génie féminin. C’est une fausse question.

Le bonheur c’est…

Mes enfants.

Etre mère c’est…

Avoir la responsabilité d’une âme.

Les Vies d’Emily Pearl , par Cécile Ladjali, Actes Sud,

191 pages.

Propos recueillis par Kerenn Elkaïm

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content