Les silhouettes masculines de l’hiver 07-08, structurées et épurées, marquent l’entrée en force des matières techniques dans la mode. Cette saison, les hommes se la jouent Back to the Future.

Polyesters métallisés chez Burberry Prorsum ou Diesel, fourrure synthétique chez Prada, plastique transparent chez Alexander McQueen, matières techniques inspirées des tenues de sport chez Junya Watanabe… Le vestaire Homme de l’hiver 07-08 joue avec l’art et la matière. Inévitable retour du balancier, après plusieurs saisons axées sur une mode empreinte de nostalgie, les créateurs explorent aujourd’hui une voie plus futuriste, avec des silhouettes aux lignes architecturées et épurées.  » Cette mode plus construite nécessite des tissus plus fermes et plus denses, analyse Ariane Bigot, adjointe de la direction Mode du Salon Première Vision, grand-messe parisienne au cours de laquelle le prêt-à-porter rencontre l’industrie textile et choisit ses tissus. Par conséquent, les produits synthétiques retrouvent une certaine noblesse : tout comme il existe des laines ou des cotons très luxueux, on a vu apparaître des matériaux de synthèse nobles et qualitatifs. Il y a une place sur le marché pour des synthétiques très haut de gamme, plutôt dans le segment du prêt-à-porter de luxe, étant donné le prix élevé de ces produits, lié à leur forte valeur ajoutée. « 

Car ces  » textiles innovants « , comme les appellent les professionnels qui ne recourent même plus au vocable  » tissu « , mêlent à des fibres de synthèse des matériaux aussi techniques que le Teflon, la fibre optique ou le carbone. Et ce n’est qu’un début : la recherche scientifique, qui applique les découvertes les plus récentes en nanotechnologie, va toujours plus loin. On arrive aujourd’hui à créer des matières imperméables  » respirantes  » ou sans toucher  » plastique « , des tissus aux propriétés antibactériennes ou antipollution…

Eco-logique ?

Est-ce à dire que la vague écolo est aujourd’hui retombée ? Pas nécessairement : il semble que la tendance  » synthétique  » se développe parallèlement à la mouvance  » organique « , de plus en plus souvent mentionnée sur les étiquettes de nos vêtements, en particulier dans la grande distribution. Sans compter que ces nouveaux matériaux hautement techniques peuvent aussi être confectionnés à partir de bambou, de soja, de pulpe de bois et même d’algues ou de carapaces de crabe. Et, contrairement aux idées reçues, produire proprement un matériau de synthèse est souvent plus facile et moins coûteux.

Reste que ces nouveaux tissus sont avant tout recherchés par les créateurs pour le confort, le tombé ou la nervosité qu’ils offrent aux modèles qu’ils dessinent. On est bien loin des années 1970, où les synthétiques étaient plébiscités pour leur facilité d’entretien. L’idée, relativement nouvelle, est ici de surprendre non seulement par la couleur ou la coupe, mais aussi par le toucher.  » On observe une évolution subtile vers une grande exigence au niveau tactile, confirme Ariane Bigot. La demande pour des tissus extrêmement doux et raffinés est en hausse, que ce soit dans les matières naturelles ou de synthèse. « 

Poursuivant son évolution vers une vision de moins en moins monolithique, la mode de l’hiver 07-08 voit donc s’opposer deux tendances très tranchées :  » D’un côté, le rond, le douillet, le duveteux, par exemple avec la fausse fourrure, de l’autre, le dense, le cassant, notamment avec des silhouettes plus caparaçonnées « , poursuit la spécialiste. Une dualité que l’on retrouve parfois dans un même look, qui peut combiner éléments chics et casual. On a ainsi vu des gilets en grosse maille sur des pantalons de satin chez Fendi, des chemises blanches sobrissimes habillées d’épais blousons chez Dolce & Gabbana, Calvin Klein ou Jil Sander. Et les sacs, chaussures et ceintures se laissent aussi gagner par ce double langage. Ainsi, chez Lanvin, la gamme d’accessoires masculins de l’hiver 07-08 est caractérisée par des  » matières luxueuses  » et une  » inspiration sportive « , tandis que chez Diesel, on revisite les boots en cuir en les plastifiant d’une  » coat  » métallisée futuriste. Derrière une allure parfois rigoriste, on retrouve donc, cette saison mais aussi au printemps prochain, toute la fantaisie des créateurs. Le synthétique, c’est fantastique !

Delphine Kindermans

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