Les mini-portions envahissent de plus en plus notre quotidien. Mode passagère ou lame de fond sociologique ?

Retrouvez Frédéric Brébant chaque lundi matin, vers 9 h 45, dans l’émission  » Bonjour quand même  » de Jean-Pierre Hautier sur La Première (RTBF radio).

« Petit, petit, petit, tout est mini dans notre vie « . En 1966 déjà, Jacques Dutronc dénonçait, à sa manière, la mode du mini exacerbée notamment par l’avènement de la mini-jupe. Près de quarante ans plus tard, sa chanson pourrait être aisément remixée, histoire de souligner au mieux la tendance actuelle des mini-portions dans notre société de consommation. Fromages, café, conserves, poudre à lessiver… Petit, petit, petit, tout est mini dans notre caddy ! La faute aux célibataires toujours plus nombreux qui réclament des doses adaptées à leurs besoins ? Oui et non. Certes, les singles (comme on les appelle volontiers aujourd’hui) influencent fortement le conditionnement des produits de masse, mais il serait erroné de penser que le succès actuel des mini-portions repose exclusivement sur les épaules de cette tribu grossissante. Légitimes, les envies de légèreté et de miniaturisation sont également liées au nomadisme ambiant, quel que soit le statut civil de l’acheteur. La mobilité suppose en effet une certaine idée de la fonctionnalité et, dans cette logique, il était attendu que les produits de base adoptent le format réduit pour mieux séduire un consommateur en perpétuel mouvement. Sur le plan strictement alimentaire, il faut dire aussi que la fusion  » travail-loisirs  » est de plus en plus palpable et que, par conséquent, les gens pressés optent plus facilement pour la version  » snacking « , à savoir des petites portions à déguster vite fait bien fait au bureau. Certes, nous n’en sommes pas encore aux excès japonais (au pays du Soleil-Levant, même les £ufs sont emballés individuellement !), mais la tendance  » mini mini mini  » gagne inexorablement du terrain. D’ailleurs, même les produits non périssables succombent à la mode miniature, des soins de beauté aux magazines féminins, en passant même par les voitures (Les Smart comme les Mini cartonnent !) Au-delà de l’aspect véritablement pratique, cette envie irrésistible de  » penser petit  » reflète toutefois un état d’esprit pas très reluisant, axé davantage sur l’individu que sur le groupe. L’air de rien, la tentation de la mini-portion est révélatrice d’un égocentrisme sans cesse croissant dans notre société, dévoilant ainsi un consommateur qui se moque volontiers des autres et, malheureusement, de l’environnement. Car tous les experts le soulignent : les mini-doses génèrent de maxi-déchets ! Qu’à cela ne tienne, le désir de tout prendre avec soi fait fi du sentiment de culpabilité et engendre, in fine, de nouveaux comportements de société. Désormais, la philosophie du  » seul mais ensemble  » triomphe, comme l’avait prédit il y a quelques années la papesse des tendances Li Edelkort. Concrètement : on flatte de plus en plus son ego pour s’illustrer au sein de la communauté à laquelle on est obligé d’appartenir. D’où les envies de customisation. D’où la mode des soirées tapas où l’on picore ce que l’on veut. D’où le succès des gadgets technologiques (téléphones portables, Game Boy et autres iPod) qui permettent de s’isoler momentanément de la foule. D’où également le boom actuel des mini-doses individuelles. CQFD.

Frédéric Brébant

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