Souffrant d’une mauvaise réputation, due notamment à ses bâtiments vieillissant mal, le courant moderniste a pourtant marqué durablement notre capitale. L’audace de ceux qui osèrent, à l’époque, l’expérimentation et les formes tranchées est aujourd’hui mise en avant à l’occasion d’une biennale (*). Visite guidée.

Autoroute urbaine et tunnels, immeubles-tours voués au culte du béton… : dans notre capitale, ces expressions font figure d’insultes citadines aux yeux de ceux qui auraient bien vu leur fief conserver son charme rural d’antan. Mais l’histoire est là et elle se doit de ne pas être oubliée car, en marge des préparatifs de l’Expo 58 et du courant moderniste qui circulait alors, c’est toute une génération de concepteurs qui a, après la Seconde Guerre mondiale, relevé ses manches pour bâtir une ville meilleure. En testant de nouveaux matériaux et en remettant en question la manière d’utiliser chaque lieu, ils ont ouvert le champ des possibles de l’art de bâtir. Certes, nombre de leurs réalisations ont mal vieilli – ce sont les risques lorsque l’on tente des techniques innovantes – mais la contribution qu’ils ont apportée à la discipline est inestimable. Il suffit d’observer la tour Brusilia, à Schaerbeek – qui, jusqu’à l’érection du gratte-ciel UP-Site le long du canal en 2014, était le plus haut bâtiment belge de logement – pour se rendre compte du potentiel des édifices hérités de ces années créatives. La majorité des appartements y sont traversants, la façade d’une rare cohérence et la vue sur la métropole unique !  » Il est indispensable de rappeler la valeur culturelle et le potentiel touristique de ce jeune patrimoine, martèlent les organisateurs de la Biennale d’architecture moderne qui est organisée par diverses associations, tout au long de ce mois d’octobre. Les immeubles qui demeurent encore dans leur état d’origine sont à ce point le reflet d’une époque que, lorsqu’on y pénètre, on est pour ainsi dire transporté dans un autre univers.  » Une belle opportunité de voyager, à domicile, et de découvrir des pépites au détour des rues qui nous sont parfois familières à Bruxelles et dans sa périphérie… Jacinthe Gigou, directrice d’Arkadia, partenaire de l’événement, nous donne un avant-goût en images.

(*) Modernisms are shaping the city, Modernisms are shaking the city, www.bbma.be Visites d’intérieurs et balade à vélo les week-ends d’octobre (sur réservation) ; conférence le 4 octobre ; projection de films les 11 et 18 octobre. www.bbma.be

LES JARDINS DE LA CITÉ ADMINISTRATIVE DE L’ÉTAT

Par René Pechère (1956-1958)

 » Véritable ville dans la ville avec ses 400 000 m2, cette cité comportait le plus grand restaurant d’entreprise du pays ainsi que son propre accès à la jonction Nord-Midi, via la gare de Bruxelles-Congrès. En contrebas, les jardins ont retrouvé leur disposition d’origine depuis fin 2014. Particulièrement illustratifs de l’oeuvre néoclassique de Pechère, ils sont constitués de parterres géométriques et de fontaines.  »

L’ÉCOLE DU CERIA

Par Jean et André Polak (Anderlecht, 1948)

 » Après la guerre, le concept américain de campus fait son entrée. Le plan directeur du CERIA consiste en une composition de bâtiments indépendants, qui délimitent des espaces de différents types. L’expression semi-industrielle des volumes est clairement inspirée du Bauhaus de Dessau.  »

LE SHELL BUILDING

Par Alexis Dumont et Marcel Van Goethem (Bruxelles-Ville, 1931-1934)

 » Shell commande un siège bruxellois qui illustrera son importance sur le marché mondial. Il fait partie des grands ensembles immobiliers érigés à la même époque par la firme dans plusieurs capitales européennes. Les architectes relèvent le défi et imaginent un complexe sur ossature en béton comprenant des bureaux mais aussi des commerces et des parkings.  »

LA MAISON DE KLEINE BRINK

Par Jacques Dolphyn (Wemmel, 1970-1972)

 » Cette spacieuse villa de 430 m2 se caractérise par son design fonctionnel et ses matériaux sobres. Elle est conçue dans le modernisme d’après-guerre sur le modèle américain. Le nom de la propriété se réfère à  » The Brink « , le lieu de naissance de la propriétaire. Très fonctionnelle et flexible, la maison est construite en relation étroite avec la nature environnante.  »

LA BIBLIOTHÈQUE ROYALE DE BELGIQUE

Par Maurice Houyoux et Roland Delers (Bruxelles-Ville, 1954-1969)

 » Elle est bâtie, au Mont des Arts, sur un terrain de 13 000 m2, mais ses multiples niveaux et étages offrent une superficie utile de 67 000 m2… Sa construction a nécessité 28 000 m2 de béton armé et 3 000 tonnes d’acier et de poutrelles !  »

LE BÂTIMENT TELEX

Par Léon Stynen (Bruxelles-Ville, 1957-1965)

 » Il a contribué à positionner Bruxelles sur la scène internationale ; derrière sa façade énigmatique striée de lamelles d’aluminium aboutissaient pas moins de 4 000 lignes de télex ! « 

PAR FANNY BOUVRY

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