Christine Laurent
Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

Derrière la verdeur, il y aurait une immense mélancolie, une frustration latente, voire même un ras-le-bol. Pis, nos trentenaires auraient le moral en berne. On nous les dit ronchonnant, pestant, trépignant. Point de mire de leur courroux ? Les baby-boomers (babyboons pour les spécialistes), les 50-65 ans, la génération 68, bref leurs parents. Ce qu’ils leur reprochent ? De les plomber. Impossible de grimper dans l’échelle professionnelle û les aînés tiennent toutes les manettes dans les entreprises et ne sont pas prêts de les lâcher û, d’acheter un appart û ils font grimper les prix avec leurs revenus plantureux û, de partir en voyage en low price û plus disponibles, ils raflent toutes les bonnes affaires. Dur, dur, dur d’avoir 30 ans.

Le malaise serait tel que les trendsetters (les futurologues des tendances) parlent déjà de crise du tiers de vie, balayant ainsi la mythique  » midlife crisis  » qui, elle, ne surgissait qu’au détour des 40 ans. De fait, les baby-boomers ont de l’argent (c’est la première génération qui affiche deux revenus par ménage, sans compter les héritages et les emprunts déjà remboursés). Libérés de bien des contraintes et en bonne santé, ils multiplient les projets, les déplacements, les découvertes. Et même si certains d’entre eux aspirent à une préretraite libératoire, les voilà vissés à leur boulot jusqu’à 65 ans, ordre de l’Etat de moins en moins Providence. Drôle de situation coincés qu’ils sont entre l’obligation ferme de rester à leur poste et les piaffements de ceux qui en ont assez de ronger leur frein dans l’ombre.

L’inconfort des trentenaires (baptisés pour l’occasion momos û mobiles, moraux û parce qu’ils bougent beaucoup et sont attachés à des valeurs) est d’autant plus titillant que notre société vieillissante se dope de plus en plus avec leurs codes et références. Ce sont eux qui donnent aujourd’hui le ton, aspirant ainsi toutes les tranches d’âge. Shootés souvent à l’urgence, ils voudraient donc tout, tout de suite. Y compris le pouvoir.

Mais qui donc le leur reprocherait ? Depuis toujours, les nouvelles générations ne rêvent-elles pas de mordre les mollets des anciens ? En se frottant à leur résistance, n’apprennent-elles pas à affûter leurs armes ? Rien de bien neuf, donc, dans ces joutes intergénérationnelles relookées IIIe millénaire. Si ce n’est cet extraordinaire goût des gourous tendance pour le séquençage à l’infini. Et leur capacité à nous faire gober du neuf tout rutilant avec du vrai éculé élimé. Chapeau !

Christine Laurent

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