L’auteure belge surfe sur la vague du développement personnel et le hisse au rang d’expérience spirituelle. Voici la confession d’Elisabeth, aimantée par le père Constantin qui n’a rien d’un saint. Un chemin de croix qui mène à soi…

Êtes-vous une grande rêveuse ?

Certainement. Ça donne à l’existence une dimension et un souffle qu’elle n’a pas dans la réalité. Comme en témoigne mon héroïne, pouvoir fantasmer et mettre en scène sa vie est une richesse. À condition de connaître ses limites et de ne pas confondre rêve et réalité.

Quelle profession désiriez-vous embrasser ?

Ado, j’aimais beaucoup la chanson française. Le goût de l’écriture m’est venu avec Brassens, Barbara et Anne Sylvestre. Aujourd’hui, je sculpte la forme des textes dans mes romans.

L’écriture est-elle un ravissement pour vous ?

Sans doute… L’écriture est un bonheur quand elle m’apporte une densité qui me rapproche de mon monde intérieur. Or, elle me ravit aussi à la vie et au monde extérieur. En période d’écriture, je mets tout le reste entre parenthèses.

Pourquoi l’emprise est-elle le fil rouge de tous vos romans ?

C’est ma thématique fondatrice, celle qui donne de l’énergie à mon écriture. Si je savais pourquoi, je n’écrirais peut-être pas. Ici, mon projet est de dénoncer la manipulation que le père Constantin exerce sur toutes les femmes du roman. Il cache un homme machiavélique.

Qu’incarne cet homme aux yeux de ces  » noyées  » ?

Toutes fantasment sur la figure paternelle idéale. Se croyant l’Élue, elles se sentent uniques. Le père Constantin crée une dépendance chez ces disciples. Elisabeth se rêve en fiancée mystique, lui veut se substituer à Dieu en la baptisant et en la mettant dans son harem.

Quel serait le père idéal ?

Personne. Le mien est mort depuis trente ans, il était aussi imparfait que les autres. Ça ne m’intéresse pas d’avoir une figure de référence à ce point déterminante.

 » Notre histoire d’amour est plus vaste que l’amour.  » Qu’est-ce que le sentiment amoureux pour vous ?

Il comprend une idée d’ouverture, de disponibilité à l’autre. Chez Elisabeth et Constantin, chacun utilise l’autre comme un miroir. Elisabeth est une femme audacieuse qui joue avec le feu. Elle veut être aimée par un homme de Dieu qui la regarde comme tel. Lui la traite comme un territoire conquis.

Jusqu’où êtes-vous prête à aller par amour ?

Mon héroïne s’imagine en fille, tentant de séduire son père pour voir s’il peut résister. Je ne suis guère candidate à ce rôle £dipien.

À quoi ne pourriez-vous pas renoncer ?

Au printemps. On apprend néanmoins à renoncer chaque jour…

Aimez-vous écouter le silence ?

Évidemment, d’autant qu’il est rare à notre époque. Impossible d’écrire sans lui car j’écris à voix haute, pour faire sortir la musicalité du texte.

Quel est votre refuge ?

Le bord de mer, quel qu’il soit.

Si vous étiez une tentation irrésistible.

Le chocolat.

Le Ravissement des femmes, par Corinne Hoex, Grasset, 200 pages.

KERENN ELKAÏM

POUVOIR FANTASMER ET METTRE EN SCÈNE SA VIE EST UNE RICHESSE.

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