Brillante, étincelante, onirique et même parfois mystique, la haute couture est la poésie de la mode. Voici nos sept coups de projecteur sur les meilleurs moments parisiens de la saison printemps-été 2007. 1. Les geishas

de John Galliano pour Dior

En ouverture de la semaine de la haute couture printemps-été 2007, le 22 janvier dernier à Paris, une seule et même question agitait les journalistes de la planète mode : après un défilé Dior prêt-à-porter printemps-été 2007 plus que contesté pour sa rigueur et sa sobriété et une collection éponyme très éloignée des excentricités auxquelles le créateur britannique nous avait jusque là habitués, que nous préparait cette fois l’imprévisible Galliano ? Le résultat fut à la hauteur de l’attente : époustouflant. C’est dans l’opéra de Puccini  » Madame Butterfly  » que John a cette fois cherché son inspiration en nous offrant un tableau japonisant dans un décor de fauteuils Louis XVI. Ses geishas sont vêtues de tailleurs en gazar rose brodé, de robes en mousseline de soie peintes à la main et accessoirisées de rangées de perles, de manteaux en ottoman de soie vert brodé, de robes du soir en rabane écrue, culminant sur un magnifique tailleur en croco noir. Les épaules sont archistructurées, les bustiers s’affichent en forme de cônes, les manteaux empruntent le volume boule, les talons des chaussures, travaillés dans le bois, sont absolument renversants. On retrouve également le registre des armures moyenâgeuses traitées avec un esprit légèrement futuriste préalablement développé dans la collection prêt-à-porter, ainsi que la même palette flirtant avec les rose pâle et les gris perle. Les têtes sont coiffées de raphia ou carrément d’arbustes, intégrant des éventails, des ombrelles ou de grands peignes dans les cheveux. Sur les paupières, les maquillages forcent sur le trait. Pour ses 10 ans de création pour la maison Dior, Galliano is back et vient saluer le public, sous une pluie de papillons blancs, habillé en Pinkerton, l’officier américain dont Butterfly tombe éperdument amoureuse.

2. La grand-messe de Jean Paul Gaultier

Le défilé de Jean Paul Gaultier est à chaque fois un événement. Faisant appel tantôt à la sorcellerie, tantôt à la mythologie, JPG aime faire baigner son siège de la rue Saint-Martin, dans le iiie arrondissement de Paris, d’une ambiance onirique pour ne pas dire mystique. Dans un espace nimbé d’encens, des madones auréolées arborent Jésus en guise de serre-tête. Comme si ces créatures célestes aux noms évocateurs :  » Oraison « ,  » Méditation « ,  » Visitation « , ou encore  » Cantique « , préparaient leur première communion. Dans des robes bustiers portées avec des vestes cape ou encore vêtues de robes à capuche décolletées dans le dos et accessoirisées de brassards de communiante. Du voile, du tulle, du satin déclinés dans des tons de rose pâle et d’ivoire viennent religieusement jouer cette partition haute couture. Ici, les auréoles sont taillées dans des vitraux. Là, un c£ur percé d’une flèche est intégré dans une robe en jersey baptisée  » Guadalupe « . Là encore, des angelots viennent éclairer les visages. Pour donner un peu de piment à ces apparitions préraphaélites, la star du show-biz et bête de mode Dita Von Teese défile en vierge aguicheuse. Après ses 30 ans de mode, JPG voulait revenir à plus de spiritualité. La messe est dite sur la chanson mythique de Madonna  » Like a Virgin « .

3. La leçon de maille de Cathy Pill

C’est dans une cave voûtée de la Cité de l’architecture et du patrimoine au Palais de Chaillot baptisée  » La cathédrale  » que Cathy Pill a choisi de présenter sa collection automne-hiver 2007-2008 avec un peu d’avance sur le calendrier. En effet, la jeune Belge faisait partie des sept créateurs émergents invités par la Fédération française de la haute couture à défiler pendant la semaine de la couture à Paris. Exercice réussi avec brio par une Cathy Pill qui, en très bonne élève, disserte sur la maille sur un air de viole interprété par Julien Léonard. On adore ses robes en laine jacquard volumineuses, ses jupes en tricot jacquard de mohair portées avec des blouses en coton ombré et éclairées d’un collant bleu canard, ses jupes amovibles, ses manteaux en laine bouillie couleur moutarde (un must pour l’hiver prochain ?), ses manteaux en laine qui se transforment en boléro, ses combinaisons en maille. Un défilé auquel on a aperçu, au premier rang, la responsable des achats du grand magasin Barneys de New York. Good luck Cathy.

4. L’allure moderne signée Chanel

Toujours en avance d’une tendance, c’est désormais la règle, Chanel nous dicte ce que nous porterons dans… deux saisons. Et même quand il s’agit de haute couture, la mythique griffe française ne manque pas de nous dévoiler ce dont nous raffolerons demain. Cette fois, il s’agit d’enlever le bas. Oui, oui. Out les superpositions grungy et autres robes pulls enfilées sur des leggings, cette fois, on ose carrément la veste de tailleur, largement ceinturée à la taille, sur des collants très opaques façon fuseau des nineties. Voilà, c’est chic et moderne, c’est l’esprit Chanel. Pour le reste, la collection conçue par Karl Lagerfeld est brillante, l’accent est mis sur le graphisme des talons (une constante dans les défilés de cet été), les yeux sont recouverts d’un voile de tulle percé de brillants, les robes étoffées de plumes. On ose même l’imprimé léopard, ce qui est très inattendu chez Chanel. Le soir, les robes sortent en  » lamelles  » argentées. La collection est présentée sur fond de musique live interprétée par le groupe Cat Power pour donner encore plus de modernité à l’ensemble. Au final, le rideau s’ouvre… sur l’ensemble de l’atelier de la rue Cambon. Une belle photo de famille prise sous les yeux d’une brochette de stars, les actrices Sigourney Weaver, Diane Kruger (la nouvelle égérie de la collection accessoires Paris-Biarritz pour le printemps-été 2007), Vanessa Paradis et le chanteur Marc Lavoine.

5. Le recyclage grand luxe de Martin Margiela

Pour sa ligne artisanale, le Belge Martin Margiela soigne le concept. En tant que membre invité de la haute couture, sa machine est parfaitement huilée. Une bande sonore nous présente en plusieurs langues ses dernières ingéniosités qui, chaque mois, seront distillées en exclusivité dans les sept boutiques de la maison à travers le monde. Quelques exemples : cette veste réalisée à partir de toile de baskets ou encore, baptisé  » veste voyage « , ce modèle confectionné à partir d’une housse de voyage pour vêtements en toile de nylon, qui dévoile encore… l’étiquette. Intitulée  » robe tableaux « , une autre pièce est créée à partir d’£uvres chinées aux puces : chaque peinture est lavée, assouplie puis traitée pour fixer les pigments. Le modèle est ensuite entièrement doublé de taffetas de soie puis plié autour du corps. Des foulards de soie anciens sont, quant à eux, assemblés pour former une robe. Un sac à provisions est transformé en veste pour homme. Comme toujours, la coupe est aussi irréprochable que le concept. On apprécie l’humour mais peut-être l’ensemble manque t-il un peu d’émotion.

6. Les volumes boules de Jean Paul Knott

Jean Paul Knott arrondit les angles. On le disait trop carré, voilà qu’il se met à faire des ronds mais toujours avec la même rigueur. Les volumes deviennent boules dans des matières grand luxe : soie et cachemire et dans des coupes toujours irréprochables. Tailleurs- jupes boule, veste en vison tricoté transformable, robe en cachemire au décolleté profond, tuniques à cols bénitiers, robes asymétriques, effets de peinture jetée sur de la soie, shorts bloomers déclinés dans une palette de noir, de gris mais aussi de caramel. Avec Knott couture, présentée dans le cadre cossu d’un appartement parisien, Jean Paul Knott, qui cultive sa confidentialité, démontre une fois de plus son talent.

7. Les maharajas d’Armani Privé

Triple actualité pour le créateur italien qui, en même temps qu’il présentait sa collection haute couture, ouvrait sa nouvelle boutique parisienne, avenue Montaigne, et lançait sa nouvelle gamme de produits cosmétiques. Cette fois, Giorgio Armani a puisé son inspiration dans une Inde fantasmée et a cherché à transposer les costumes des maharajas pour la femme. Le résultat est envoûtant. Un festival de tailleurs-pantalons, de tuniques associées à de délicats pantalons skinny, de vestes dotées de fermoirs en perles, de tailleurs gris argent agrémentés de châles bijoux, de turbans d’où dégoulinent des cristaux, de jupes en croco, de robes en voile vert d’eau. Le maître italien s’inspire des pantalons saris qu’il féminise, et comme toujours chez Armani, les courbes de la femme sont sublimées. Ce défilé très privé a été suivi d’un dîner non moins privé dressé dans le musée d’Art moderne de Paris. Six cents invités, triés sur le volet, ont goûté au caviar d’Aquitaine et au risotto à la truffe dans un décor de jeux de miroirs spécialement conçu pour l’occasion. Pas de doute, Giorgio Armani sait recevoir.

Agnès Trémoulet

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