Son golf de renommée mondiale et sa douceur de vivre en font l’une des destinations privilégiées des Californiens. Mais c’est avant tout pour son incroyable architecture prisée par le Tout-Hollywood de l’Âge d’Or qu’il faut se rendre à Palm Springs.

Planté au milieu des cactus et du désert californien, ce lieu artificiel a réellement provoqué une vague de création sans précédent. Ainsi, c’est à Palm Springs que Richard Neutra a dessiné, en 1946, la célèbre maison Kaufmann, quintessence du Style international, caractérisé par son minimalisme et son refus de l’ornement. Considéré comme l’un des chefs-d’£uvre du genre, cet assemblage de cubes de verre est aujourd’hui en vente pour près de 10 millions d’euros après avoir transité il y a deux ans par les adjudications de Christie’s… On rêve de franchir son portail pour une visite à 360 degrés mais un écriteau est bien là pour maintenir les curieux à distance. Private property. No trespassing. Tout est dit…

Heureusement, Palm Springs ne se limite pas à ce joyau, pas plus qu’elle ne se résume à la Elrod House, gigantesque caverne high-tech construite en 1968, mieux gardée que le Pentagone, visible dans un épisode de James Bond ( Les diamants sont éternels), et ouverte aux visiteurs à de très rares occasions. Heureusement donc, les trésors architecturaux construits entre les années 30 et 70 accessibles au public abondent à Palm Springs.

The place to be

Aéroport, lieux de culte, agences bancaires, bâtiments administratifs, dispensaire pour animaux, hôtels, constructions résidentielles ou station de téléphérique qui permet de rejoindre à 3 000 mètres les cimes enneigées des montagnes San Jacinto : la fièvre moderniste transparaît ici partout. Même l’office de tourisme, avec son toit acéré pourvu d’un interminable voile de béton, colle parfaitement à l’esthétique ultradépouillée du Style international.

Construit en 1963, l’office de tourisme est en réalité une ancienne station-service dessinée par Albert Frey, l’une des grandes signatures de la ville. Cet architecte d’origine suisse, élève du Corbusier, s’installe aux Etats-Unis en 1930 avant de se fixer à Palm Springs en 1934. L’année suivante, il réalise l’avant-gardiste Movie Colony Hotel, toujours en service et magnifiquement restauré.

Cette enseigne marque le début de la transformation de Palm Springs en nouveau terrain d’audace architecturale et de destination à la mode pour les stars de Hollywood en mal de week-end prolongé. Pressés de fuir l’atmosphère des studios, les grands noms de la Paramount ou de la MGM en font leur lieu d’élection, une place to be chic et glamour. Chacun possède ses habitudes. C’est ainsi qu’au Racquet Club, on croise la silhouette élastique de Fred Astaire et qu’à l’ombre des palmiers qui bordent la piscine du Tennis Club, on a toutes les chances d’apercevoir Cary Grant, tandis que Frank Sinatra, sans doute en compagnie de Dean Martin, ou d’une jolie starlette, a élu domicile au bar de l’ Ocotillo Lodge. Nombre de ces personnalités et bien d’autres encore – comme Marilyn ou Albert Einstein – ne se contenteront pas de parader dans les country clubs mais feront construire leur propre villa.

High Society

Les bungalows grand luxe éclosent par dizaines et, dans l’émulation, tous ou presque se mettent au diapason esthétique moderniste. Murs rideaux, recours au plan libre, toit-terrasse : les inspirations Bauhaus sont décidément à l’honneur. Témoin de cette ambiance high society digne d’un mélodrame de Douglas Sirk ou d’une comédie musicale de Vincente Minnelli, l’Horizon Hotel, fraîchement réhabilité lui aussi et toujours en activité. Cet ensemble d’habitations individuelles, disposées de manière à ce que chaque occupant soit protégé du regard de son voisin, est dû à l’architecte William F. Cody. Auteur également du très coloré hôtel Del Marcos, tout droit échappé d’un dessin animé avec sa façade déstructurée, et des plans de l’église St Theresa, voués au culte de la ligne claire, réalisés à la fin de sa carrière.

A Palm Springs, même faire un virement s’apparente à un geste esthétique pour peu que l’on se rende à la City National Bank, ouverte en 1959, véritable sculpture inspirée par la chapelle de Ronchamp du Corbusier. Ce n’est pas le seul emprunt stylistique. Au jeu des influences, on ne manque pas de faire un rapprochement entre le Washington Mutual Building dessiné en 1960 par Stewart Williams, qui a conçu la station alpine locale, et la patte d’Oscar Niemeyer, le concepteur de Brasilia.

Délaissée par la jet-set au milieu des années 70, Palm Springs connaît depuis quelques années un authentique revival. Des associations locales comme le Palm Springs Modern Committee ont vu le jour en faveur de la sauvegarde du patrimoine moderniste. Elles organisent plusieurs fois par an des visites de lieux fermés d’ordinaire au public, dont un très prisé Desert Tour au mois de mai. Mais si Palm Springs connaît un retour en grâce, c’est grâce surtout à son festival de cinéma annuel qui se déroule en janvier où le Tout-Hollywood se donne aujourd’hui rendez-vous, de Leonardo DiCaprio à Brad Pitt, ou Clint Eastwood. Un demi-siècle après l’Âge d’Or, le glamour est bien de retourà

TEXTE : ANTOINE MORENO / PHOTOS : RENAUD CALLEBAUT

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