Pâques gourmandes

Quatre chocolatiers wallons ont choisi de s’installer à la campagne pour célébrer l’art de la gourmandise. En exclusivité pour Weekend, ils interprètent avec brio le thème traditionnel de l’oeuf de Pâques.

Comme Juliette Binoche dans  » Chocolat « , le film de Lasse Hallström, des artisans de Wallonie ont pris le parti de s’établir loin des grandes villes pour exercer leur métier de chocolatier. Pour Pâques, Weekend Le Vif/L’Express leur a rendu visite et leur a proposé d’interpréter à leur façon le thème traditionnel de l’oeuf. Un challenge créatif et gourmand qu’ils ont tous relevé avec brio.

Wavre n’était pas encore la cité cosmopolite que nous connaissons aujourd’hui lorsque, début mai 1958, Dina Guion ouvre sa petite chocolaterie.  » A l’arrière de la boutique, nous avions la salle à manger. L’atelier se trouvait là où il est encore aujourd’hui, c’est-à-dire dans les caves « , raconte-t-elle. Ses enfants Edwige et Joël Stevens ont grandi entre le chocolat, le beurre et la crème, au milieu des dizaines de modèles de pralines.  » Nous avons plus de 130 spécialités et un leitmotiv : la fraîcheur « , s’exclament-ils en choeur.

Artisanat est ici synonyme de petites séries. Une production journalière de 1,5 kg pour une recette donnée est la règle générale. Quant aux spécialités aux fruits et à la crème fraîche, par exemple, elles doivent être consommées dans les deux jours, d’autres encore endéans la semaine.

Si leur enseigne –  » L’Art de Praslin  » – compte une adresse à Namur et une autre à Bruxelles, Edwige et Joël restent attachés à leur boutique-atelier de Wavre et à leur clientèle servie sur mesure.  » Il paraît impensable chez nous de proposer des oeufs ou des ballotins garnis d’avance, soulignent-ils. Les clients nous demandent chacun une composition spécifique. Pour Pâques, la demande est souvent la même : des oeufs. Mais les nôtres sont garnis de pralines sélectionnées par le client sur place, le tout assorti de quelques petits oeufs. « 

Camille Druart, lui aussi, a pris le relais de sa mère. En 1982, celle-ci s’ennuyait dans sa maison de campagne… Elle a donc cherché à s’instruire auprès du boulanger d’un village voisin. Rapidement, elle crée un petit atelier à l’entrée de son jardin. Les premiers clients arrivent. D’autres suivent. Pour répondre à la demande, elle appelle son fils à la rescousse. Camille est cuisinier, diplômé de l’école hôtelière de Namur. Mais au cours de sa formation, il a aussi suivi un stage en pâtisserie qui lui a particulièrement plu. Perfectionniste, curieux de tout, Camille est aussi un voyageur. Catégorie sac à dos et sensations extrêmes. C’est au détour d’un de ses périples qu’il est tombé amoureux de Mixia, son épouse chinoise.

Pour les consommateurs, la chocolaterie Druart est un petit comptoir de vente situé à l’arrière de la maison familiale. Il suffit toutefois de pousser une porte pour découvrir un vaste atelier fondu dans le paysage champêtre, puisque à moitié enterré. Il faut d’ailleurs se munir d’une bonne carte des Hauts-Pays pour atteindre le village d’Angreau, situé près de Dour et Quiévrain. Cette verte campagne fut le pays d’Emile Verhaeren. Elle entoure de toute part la Chocolaterie Druart.

Les chocolats de Camille ont des goûts d’une extrême pureté. Les mélanges d’origines sont naturellement parfumés. Pour Pâques – comme pour les autres fêtes – le chocolatier se surpasse. Il aime avant tout les gros oeufs moulés à la main qu’il découpe de manière à les garnir de personnages réalisés à partir de demi-coquilles d’oeufs.

Comme celle de Camille, la passion d’Etienne Bouvier pour le chocolat est opiniâtre. Ce joueur de bugle – il fait partie de l’une ou l’autre fanfare de la région dinantaise – a commencé tout tout petit.  » J’étais apprenti boulanger, confie-t-il. Et comme il ne m’était pas possible de m’initier aux techniques chocolatières dans la pâtisserie qui m’employait, je me suis acheté quelques moules et j’ai commencé chez moi.  » Lorsque ses employeurs le poussent à poursuivre dans cette voie, Etienne prend possession de presque toutes les pièces de l’appartement  » l’une après l’autre, à l’exception de la chambre « . Entre-temps, il effectue des stages en France, notamment à Paris chez Le Nôtre.

Pour Pâques, Etienne propose des sujets moulés mais également des montages dont regorge son site Internet. Pour Weekend, il a réalisé – en bon Wallon – un oeuf rehaussé d’un très beau coq aux contours naïfs.

On découvre un style plus contemporain chez Hervé Filleul. Le cadet (il a 27 ans) de nos chocolatiers est professeur de boulangerie-pâtisserie. C’est avec son épouse institutrice qu’il a décidé d’ouvrir une petite chocolaterie de campagne en rénovant l’ancienne épicerie située face à l’église de Leers-et-Fosteau. Leur projet est double: la fabrication de pralines et de chocolat – notamment une truffe à l’Eau de Villée – et des cours de chocolaterie destinés au grand public.  » Couleur chocolat  » – c’est le nom de leur entreprise – entend rester à l’échelle artisanale et développer cette rencontre pédagogique permanente avec les consommateurs… petits et grands.

Texte et photos: Jean-Pierre Gabriel Carnet d’adresses en page 96.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content