Dans le marathon des Fashion Weeks, où les shows s’enchaînent à un train d’enfer, un défilé orchestré par Jeremy Scott c’est un peu la glace à deux boules au milieu d’une journée shopping : une pause sucrée et rafraîchissante, qui redonne de l’élan pour la suite. C’est que ce natif du Missouri, élevé loin de la sphère du luxe et longtemps persuadé que tous les Parisiens s’habillaient en haute couture, jongle comme personne avec l’humour, les références à la culture pop et l’irrévérence. Bref, il ne prend pas la mode pour ce qu’elle n’est pas, ou en tout cas ce qu’elle ne devrait pas être, à savoir une institution intellectualisante et incapable d’autodérision. Quitte à faire grincer des dents certains pontes de la profession, qui n’ont pas toujours vu ce provocateur d’un bon oeil. Ainsi, à ses débuts en 1997, a-t-il mis du temps à s’imposer. Karl Lagerfeld, pourtant, l’avait alors encouragé à persévérer. Et, avec son sens inné de ce qui fait l’époque, le kaiser avait une fois de plus raison ; aujourd’hui, tout ce que touche le créateur iconoclaste semble se transformer en or – au propre et au figuré, puisqu’il ne cache pas son attirance pour le bling-bling. Ses collaborations avec Longchamp ou Adidas ? Des must-haves. Les ventes de Moschino ? Multipliées par dix depuis son arrivée à la direction artistique de la maison en 2013. Il faut dire que son vestiaire dessiné à partir des codes du McDo – robes à rayures jaunes, visières rouges, sacs Happy Meal… – ou de l’univers de Barbie – mini-shorts roses, patins à roulettes, perruques blondes… – ont fait le tour des réseaux sociaux. De quoi attirer en boutique toute une (jeune) génération, quitte à lui vendre plutôt des sweats et des tee-shirts à logo relativement  » sages « .

Pas étonnant, dès lors, que l’Américain ait été l’invité d’honneur du dernier Pitti Immagine Uomo. L’occasion, pour le successeur de Franco Moschino, de présenter une collection Homme en phase  » avec l’esprit et les formes  » chers au fondateur de la griffe, dixit Raffaello Napoleone, CEO de ce salon florentin donnant le ton en matière de vêtements masculins. De là à imaginer que la silhouette phare de Jeremy Scott se retrouvera dans la rue au printemps prochain, il y a de la marge. Le mix  » couronne en plastique doré, veste de F 1 à écussons, bijoux baroques et sandales à Velcros « , ce n’est pas demain la veille que monsieur Tout-le-monde se l’appropriera, pour sûr. Surtout quand on sait que cet ensemble ne fait qu’accessoiriser une pièce maîtresse : un splendide caleçon barré du nom de la marque, proposé en blanc, en noir ou en métallisé. Parce que sur les podiums, à tout le moins, c’est tous les jours la fête du slip.

Delphine Kindermans

Sur les podiums, à tout le moins, c’est tous les jours la fête du slip.

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