Recevoir ses amis en noir et blanc

De vastes espaces, des meubles sobres, peu d’objets, mais une table accueillante et raffinée… Voici les nouveaux codes pour recevoir ses amis, en jouant sur l’éternelle séduction du noir et blanc.

Ils s’aimèrent sur le mythique pont des Arts (et pas n’importe quand : en l’an 2000 !), se marièrent quelques années plus tard à Malibu, s’installèrent rue Bleue, à Paris… Un conte de fées ? À coup sûr, si l’on considère que Dovie tient son nom d’une arrière-grand-mère cherokee – une Indienne, donc, de la famille linguistique des Iroquois – et qu’elle est née en Californie, pourvue de seize frères et s£urs –  » dur pour les réunions de famille et les anniversaires « , glisse-t-elle avec un sourire. Rien ne prédisposait cette jolie blonde perchée sur des talons interminables (de Christian Louboutin) et qui se considère comme une authentique Parisienne, à croiser la route d’un certain Laurent, né à proximité de Lyon, dans le Haut-Beaujolais précisément, d’une famille  » textile « .

Ils se rencontrèrent donc, elle issue d’une école de commerce londonienne, lui d’ESMOD (Ecole supérieure des Arts et Techniques de la Mode), et tous deux travaillant dans  » la com  » : Dovie a créé son agence en 1990, vouée à la mode, à la beauté et au luxe (J. Mendel, les champagnes Dom Pérignon, les bougies Diptyque, etc.), Laurent a débuté sous l’égide de Jean-Jacques Picart comme attaché de presse chez Christian Lacroix, deux hommes  » cultivés, honnêtes et bien élevés « … avant, lui aussi, de voler de ses propres ailes, pour Chevignon et Dsquared2 notamment. Lesquelles ailes les ont menés, Dovie et lui, jusqu’à ce quartier dont on ne sait trop, finalement, s’il est commerçant, résidentiel, ou les deux.

Un immeuble typiquement haussmannien comme il en existe tant à Paris, un escalier façon hôtel particulier, sur lequel donnent, à raison d’un par étage, des appartements aux nobles proportions – et à la surface non moins noble : 260 m2 -, enroulés autour d’une cour intérieure avec stucs, feux ouverts en marbre et hauts plafonds, où la lumière éclate d’autant plus et mieux qu’elle arrive de tous les côtés, par la rue La Fayette, par la rue Bleue, par la rue Saulnier.  » En montant l’escalier, on a su qu’on achèterait « , dit Dovie au souvenir de leur première visite, en 2005, de ce qui n’était encore que des bureaux, sans salle de bains… ni cuisine. Celle-ci est désormais une vaste pièce à vivre, celle-là est devenue double : une pour les maîtres de maison, une autre pour les invités. Quant au reste, c’est  » open  » : cloisons abattues, le moins possible de portes et le plus possible d’ouvertures, de miroirs, de fenêtres.

On l’aura compris, la lumière est ici chez elle, réfléchie de toute part, mais aussi pensée, pour un esprit loft. Dès l’ample entrée, une odeur rassurante comble les narines : celle des délicates bougies  » Baies  » de chez Diptyque. Les parquets, qui eux aussi brillent, renvoient la lumière, celle venue de l’extérieur, celle des lampes chinées aux puces de Vanves et de Saint-Ouen, celle aussi du feu vite allumé par Laurent, de retour du travail en compagnie de Dovie. Car ces deux-là se quittent à peine : partent travailler ensemble (leurs bureaux sont, sinon voisins, du moins proches), déjeunent souvent ensemble, reviennent ensemble.

Deux ? Trois conviendrait mieux… Mercer est là, qui ne les quitte pas d’une patte – un irrésistible bichon maltais d’un blanc éclatant, qui tire son nom de sa première nuit passée en compagnie de Dovie et Laurent à New York, à l’hôtel Mercer, ce qui explique qu’il soit bilingue ! Un coup de foudre, comme pour les objets et les meubles qui se trouvent ici et qui accompagnent l’espace sans jamais, au grand jamais, l’occuper.  » L’appartement n’est pas figé, explique Laurent. Au fil du temps, il changera, il évoluera : dans dix ans, il sera fini… Dovie et moi fonctionnons au coup de c£ur. « 

Pour l’instant, par exemple, il n’y a pas de rideaux – sauf à une fenêtre donnant sur la cour -, mais rien ne dit qu’il n’y en aura pas un jour.  » Tant qu’on ne trouve pas une histoire, on ne fait rien, et quand on aime une chose, qu’on est deux à l’aimer, elle rentre obligatoirement dans notre univers, disent-ils de concert. Quand l’autre n’est pas convaincu, on essaie de trouver un compromis, mais jamais on n’achèterait l’un sans l’autre, l’un contre l’autre.  » Voilà pourquoi, les week-ends d’été, à Paris ou en province, même s’ils ne les apprécient guère, on les rencontre, à deux – plus le chien évidemment -, sur les marchés aux Puces, voire chez quelques antiquaires, disponibles pour une lampe, un tableau, une bergère, un miroir sorcière, une gravure – les tableaux de maîtres, ce n’est pas le genre de la maison. Pour le moment, la sobriété est de mise dans cet appartement, privilégiant l’uni, le blanc, le noir et le gris, plutôt que l’imprimé et la couleur. Plus tard, peut-être…

Mais plus tard est fait de plein d’autres jours. Le quotidien, rue Bleue, est enchanteur – pour les amis surtout, qui viennent ici comme à la fête, goûter la cuisine de Bertrand Raynaud ( NDLR : pour celui qui dirige l’entreprise familiale des porcelaines Raynaud, la cuisine est une histoire de passion). Dovie, elle, se charge de la mise en scène et du plan de table.  » On aime recevoir plutôt que sortir, confient-ils. Ou on voyage (Los Angeles, de préférence, puisque c’est là-bas qu’est établie la famille de la jeune femme), ou on est à la maison.  » Pour figurer au nombre des amis, consulter la liste d’attente… et bonne chance.

Trois recettes en tenue de fête, page 24.

Gilles Dallière et Monique Pivot Photos : Francis Amiand

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