Le 12 mars 1892, Henry de Groux se promène avec Lautrec et d’autres au Moulin-Rouge, place Pigalle. Le 25 février 1893, il dîne chez Paul Verlaine, rue Descartes, à Paris. Il rapporte une anecdote.  » Qui a dit que j’étais saoul ?  » hurle le vieux poète après quelques maigres agapes, divers crus et plusieurs absinthes. Il menace de sortir pour aller en reprendre, veut assommer le premier qu’il croise sur son chemin. Ses amis s’interposent. On finit par le coucher. Le 24 décembre 1898, de Groux prend un verre avec Whistler. Les deux hommes parlent des  » vrais grands artistes  » : Titien, Rembrandt, Velasquez, Michel-Ange, Tintoret. Le 29 juillet 1899, de Groux croise Alfred Stevens à Montmartre qui l’invite à boire l’apéritif au Rat Mort. Stevens semble las, fatigué. Ils discutent technique : huiles, vernis, tubes en fer blanc. Le 9 février 1898, Henry de Groux sauve Zola du lynchage à la sortie du Palais de Justice durant l’affaire Dreyfus. Le 10 septembre 1899, sur le boulevard Saint-Germain, de Groux rencontre Oscar Wilde. Ils déjeunent au Vieux Satyre. Wilde lui  » offre aimablement dix francs « . Le 8 décembre 1902, de Groux écrit à André Gide pour solliciter son aide. Le même jour, il s’insurge de la réponse de l’écrivain à sa lettre. Gide lui aurait-il fait des avances ? L’été 1904, de Groux fut trouvé à moitié fou et à demi nu errant au petit matin sur une plage d’Italie après s’être échappé d’un asile psychiatrique. Il fut donné pour mort en 1911 avant d’apparaître drapé dans un linceul à l’inauguration de la salle qui lui avait été consacrée au Salon d’Automne. Il fait la connaissance d’Apollinaire.

Mais qui est cet Henry de Groux qui connaît ToutParis ? Un mondain ? Un dandy ? Certes. Mais, il fut d’abord un peintre, symboliste, belge et célèbre.

Depuis sa disparition en 1930, ses tableaux ont sombré dans l’oubli. Restent ses écrits. Dix-huit volumes manuscrits où il éructe, s’insurge, vitupère, tient la chronique d’un monde et de ses contemporains. Une £uvre cruelle d’écrivain. Avant de découvrir son Journal publié par l’Institut national d’histoire de l’art (INHA ) je n’avais jamais entendu parler de lui. Suis-je la seule ?

(*) Chaque semaine, la journaliste écrivain Isabelle Spaak (Prix Rossel 2004 pour son roman d’inspiration autobiographique Ça ne se fait pas, Editions des Equateurs) nous gratifie de ses coups de c£ur et coups de griffe.

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