A l’occasion du lancement du parfum du même nom, Fendi nous ouvre les portes de son Palazzo romain. Visite guidée avec Silvia Fendi, qui retrace la saga d’une maison de mode se jouantdes conventions.

Un parfum-miroir

Le crépitement des flashes, déjà bien nourri, se fait subitement frénétique lorsque Karl Lagerfeld, sorti d’une limousine noire, avance à son tour sur la  » red  » carpet au bras de la rayonnante Raquel Zimmerman. L’un comme l’autre se devaient d’être présents : tandis que le créateur met son talent au service de la maison depuis plus de quarante ans, la top est l’égérie de Fendi. Elle est aussi le visage du nouveau parfum de la marque, Palazzo, disponible en Belgique en exclusivité chez Ici-Paris-XL dès ce 15 octobre. Or, c’est la réception donnée à l’occasion du lancement de ce nouveau jus qui fait vibrer ce soir-là le c£ur de Rome.

La fragrance forte, exigeante et osée, est à l’image de la femme Fendi.  » J’ai pensé qu’il était important que le parfum soit très reconnaissable, qu’il corresponde à l’ADN de la marque, explique Silvia Fendi. Je voulais quelque chose de très personnel, qui reste et pas une senteur trop fraîche qui s’évanouit dans l’air. J’avais aussi envie qu’on y retrouve des accents un peu anciens.  » Chez LVMH on insiste sur le rôle actif qu’a pris l’héritière dans la conception de Palazzo,  » essentielle pour que le parfum soit éminemment Fendi « . Petite-fille d’Adele et Edouardo Fendi, Silvia possède en quelque sorte les codes de la maison dans ses gènes. Seul Karl Lagerfeld peut aujourd’hui partager avec elle ce statut de mémoire vivante de la griffe. Engagé en 1965 par Paola, Carla, Anna, Franca et Alda, les cinq s£urs Fendi qui ont rejoint l’entreprise familiale au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le maestro suit pas-à-pas la métamorphose du petit atelier de peausserie romain en griffe de mode internationale. Mieux, il y prend une part active, en désembourgeoisant la fourrure pour en faire un objet de mode et plus seulement un signe de distinction sociale. Dès son arrivée, celui qui est aujourd’hui encore directeur artistique des lignes de prêt-à-porter et de fourrure retourne les peaux, les associe à d’autres matières, en supprime les doublures pour les inscrire dans une démarche résolument fashion, sans renier pour autant le passé d’artisanat de la griffe. Silvia Fendi, qui connaît Karl Lagerfeld depuis qu’elle a 4 ans – il lui dessinait déjà des vêtements, comme en attestent des clichés en noir et blanc ! – résume son apport en quelques mots :  » Karl Lagerfeld nous a appris à regarder devant, peu en arrière « .

Romaine avant tout

A cette époque comme aujourd’hui, la maison ne se contente pas d’innover dans le seul domaine de la fourrure. Alors qu’elle est la première, en 1973, à s’investir dans la déco et l’ameublement, elle révolutionne aussi les accessoires en proposant, dès les années 1960, les premiers sacs souples, ou en dessinant, en 1997 son fameux modèle Baguette :  » C’est une journaliste américaine qui a écrit qu’il se portait sous le bras comme un pain français, précise Silvia Fendi, créatrice du modèle. C’est comme cela que le nom Baguette s’est imposé « . Depuis, il s’est vendu à plus de 600 000 exemplaires et a été édité en quelque 700 versions, que les people s’arrachent : Naomi Campbell l’a choisi dans sa déclinaison noire à paillettes, Gwyneth Paltrow en croco et Madonna brodé de perles. Autant dire que ce sac emblématique occupe une place de choix parmi les accessoires de la marque, qui représentent aujourd’hui plus de la moitié de son activité, contre un quart pour le prêt-à-porter et la fourrure, le reste étant dévolu aux chaussures et à la petite maroquinerie.

Mais la vraie singularité de Fendi ne tient ni à son passé familial, ni à sa volonté constante de détourner les codes classiques de la mode. De l’avis unanime de ceux qui travaillent pour elle, c’est l’ancrage de la griffe dans la Ville éternelle qui lui donne son identité propre.  » La marque c’est l’Italie, mais une Italie romaine, insiste Silvia Fendi. Nous sommes en quelque sorte des outsiders de la mode italienne. Rome est une ville parfaite pour les créatifs, on y respire la liberté. Et puis il y a cet esprit relax qui est une qualité propre aux Romains.  » Une ville, qui comme la marque aux deux F, se nourrit d’antagonismes, entre contemporanéité et histoire, rigueur et fantaisie, aristocratie et folklore.

L’âme d’Adele et Edoardo

Le Palazzo, conceptualisé par le célèbre architecte new-yorkais Peter Marino, se veut à l’image de ces contrastes ; la soirée de lancement du parfum éponyme nous donne mille occasions d’en prendre la mesure. Après le champagne bu au rez-de-chaussée, boutique hypramoderne où le travertin cher à la région a été taillé en lamelles pour évoquer le travail des peaux, les invités empruntent le lourd escalier d’époque, peint de ce gris métallique profond qu’adoptent les pavés romains après la pluie. A l’étage, où les tables ont été dressées pour le dîner, changement de tempo : place à un univers intimiste et baroque, où, à la lueur des bougies, les ors, les moulures, les parquets de bois sombre se reflètent dans de grands miroirs biseautés.

La soirée se terminera dans l’espace lounge aménagé sur le toit du palais. Pour y accéder, on traverse les deux ultimes niveaux du majestueux bâtiment de la via Condotti, réservés au studio de création et aux ateliers. Une stratification à haute valeur symbolique : alors que les étages supérieurs sont souvent réservés aux pontes de la gestion et à la direction, ici ils sont dévolus à la création. Et, pour renforcer encore l’idée que celle-ci doit infuser dans toute la maison, les planchers se font transparents. Sur la terrasse surplombant Rome illuminée, Silvia Fendi et Karl Lagerfeld discutent, complices, à bonne distance des rédactrices de mode prêtes à tout pour se faire photographier en leur compagnie. Les autres invités, touchés par la grâce de la Ville éternelle et de la maison de mode qui lui ressemble tant, ressentiront peut-être la présence d’Adele et Edoardo. Quand on est chez Fendi, leur âme n’est jamais bien loin.

Delphine Kindermans

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