Coco Chanel impose dans les années 1920 cette pièce jusqu’alors réservée aux hommes. Depuis les couturiers la déclinent à l’infini… et ce printemps, la veste se fait must.

L a mode de ce printemps cultive la féminité et s’accompagne du retour d’une pièce un peu négligée ces dernières saisons : la veste. A tout seigneur tout honneur, Dior ouvre le bal. Reprenant les codes qui ont fait le succès du fameux  » tailleur bar  » de Monsieur Dior en 1947, John Galliano s’est lancé dans une savante réinterprétation de cette jaquette à basques, aux épaules arrondies et à la poitrine haute et soulignée. Pour offrir davantage de souplesse, la taille a été allégée tandis qu’aux épaules le maintien d’une ligne stricte renforce l’architecture de la tenue. Mais, c’est dans le choix des matières et des coloris que Galliano apporte sa touche contemporaine. Avec l’imprimé camouflage, le patchwork de prince-de-galles ou le mélange de denims, cette veste se prête à toutes ses folies.

Chez Chanel, en revanche, pas de révolution. Pourquoi changer une mode qui marche ? C’est dans les années 1920 que Coco Chanel a imposé son tailleur et sa veste comme l’un des codes majeurs de la nouvelle féminité et de son émancipation. Inspiré de la tenue d’un bagagiste tyrolien d’un hôtel de Salzbourg, le cardigan Chanel reste, comme le montre Karl Lagerfeld à chaque saison, d’une absolue modernité. En tweed léger et pastel, en noir pailleté relevé d’une chemise blanche, en cuir noir gansé de cuir blanc ou encore dotée d’un col en V largement évasé, la veste s’adapte à toutes les métamorphoses. Dans son sillage, la veste courte fait des petits chez nombre de créateurs.

N£uds, rubans, bouillonnés, matières et couleurs exubérantes… La théâtralité règne toujours chez Viktor & Rolf. Marni accentue sa simplicité par le traitement brut d’une toile rigide. Chez Miu Miu, on se joue de l’effet cinétique des imprimés seventies, la veste devenant alors un magnifique trompe-l’£il. Christian Lacroix crée, pour sa part, un nouveau volume avec une veste courte très proche du spencer. Toile blanche en fond, jeu de fils colorés qui s’en échappent négligemment, l’élégance est juste et moderne. Beaucoup de douceur émane de cette ligne, tout comme des cardigans à manches bouffantes de Christopher Bailey pour Burberry Prorsum. Coupée dans des tissus aux tonalités pastel, la veste flotte et souligne ainsi la fluidité d’une robe, d’une jupe, d’un twin-set. Plus graphique, le spencer imaginé par Phoebe Filo pour Chloé : toilée de noir, gansée de satin blanc, sa structure apparaît. Superbe.

Masculin-féminin

Marc Jacobs s’adonne également au plaisir de raccourcir la veste pour mieux souligner la finesse de la taille. Son boléro, inspiré du costume traditionnel des toreros, se porte en version micro. Col Claudine, manches trois quarts bouffantes, il fera le bonheur des lolitas ! Nouvellement installé à la direction artistique d’Yves Saint Laurent Rive gauche, Stefano Pilati a choisi de rester fidèle à l’esprit maison. Côté veste, c’est la célèbre saharienne de la collection africaine de 1968, tout en coton beige avec un devant lacé et une ceinture à maillons de bronze, qu’il a choisi de revisiter. Une saharienne qui sera l’une des pièces fortes de nos garde-robes ce printemps. On la trouve déclinée sur tous les tons : en python chez Dolce & Gabbana, en imprimé léopard et mousseline de soie chez Gianfranco Ferré, en toile enduite chez Costume National et en version robe chez DSquared2.

Autre pièce à succès : la veste d’officier de marine, réinterprétée par Nicolas Ghesquières pour Balenciaga. Dotée de galons ou d’un col en V, d’un double boutonnage ou d’un ample revers, elle dessine une allure androgyne qui remporte tous les suffrages. Reste enfin le blazer. Si le costume a été piqué aux hommes par YSL en 1975, comme l’atteste la célèbre photographie de Helmut Nexton, c’est dans les années 1980 que Giorgio Armani fait entrer le veston masculin dans la garde-robe des femmes. Sa recette ? Confort, coupe parfaite et matières nobles, le tailleur-pantalon pour les femmes, symbole de la businesswoman des années 1980, allie élégance et décontraction.

Pour Armani, porter un tailleur-pantalon répond à sa philosophie de la vie :  » Ces vêtements sont faits pour une femme intelligente, émancipée, qui vit en vêtements stricts.  » Aujourd’hui, le couturier milanais persiste en vêtant les femmes de pantalons fluides en soie et de vestes spencers à boutonnage décalé, ou encore de modèles masculins légèrement cintrés. D’autres créateurs s’exercent également à réhabiliter le costume d’homme. Jean Paul Gaultier propose ainsi pour Hermès un tailleur-pantalon bleu marine d’une élégance inouïe. Veronique Branquinho joue de l’ambiguïté sexuelle de cette veste aux épaules trop grandes. Quant à Issey Miyake, il crée pour l’été un blazer en toile beige poudré de noir, d’une magnifique épure. A chacune de choisir sa palette.

Isabelle Lefort

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