Christine Laurent
Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

Certes, ils ont du flair. Un flair infaillible pour troubler nos sens, mêler accords et vibrations, nous vaporisant des projections imaginaires qui sont autant d’émotions sensorielles. Mais la fine fleur des créateurs de parfums s’embrouille aussi désormais dans les fragrances. En cause, un marché de plus en plus volatil, infidèle, exigeant, assoiffé de surprises olfactives inattendues. Pour les satisfaire, les nouveaux jus se multiplient (on compte pas moins de 300 lancements par an) parmi lesquels chaque maison espère imposer l’ADN d’un classique. Pas si simple… Dans cette course effrénée, qui voit les flacons arriver en rafale, une nouveauté chasse bien vite l’autre, banalisant ainsi l’ensemble des marques censées porter l’image la plus glamour du luxe.

Vertige d’essences ! Le marché navigue à vue, la magie s’émousse, l’envoûtement s’étiole. Mais déjà les majors réagissent. En s’appuyant sur une stratégie toute de subtilité. Pas question de s’égarer dans le sillage des arômes négligés au risque de laisser s’effacer l’aura du précieux produit. Non. Pour s’imposer, les nez se laissent chatouiller les narines par une nouvelle créativité et beaucoup d’imagination. Surprendre, tel est désormais leur credo. En allant puiser, par exemple, dans les catalogues pour remettre au goût du jour des parfums fanés, redécouvrir des trésors anciens, oubliés au fond des tiroirs au profit de produits marketing. Que l’on théâtralisera avec finesse pour une sortie tout en beauté. Bref, on rafraîchit les mythes. Autant de niches qui séduiront l’amateur aisé, voire fortuné. Ras le bol des senteurs éventées par le premier quidam croisé dans la rue ou au supermarché ! Les consommateurs leaders, tout en haut de la pyramide, rêvent d’inconnu, de mystère, de volutes rares. Sous la forme d’éditions limitées peut-être. Mieux : d’un sur-mesure, savamment ciselé et qui aura demandé pas moins de neuf  » essayages  » dans un salon ou un bar à parfum. Pour une note finale qui vaut son pesant de pétales : 50 000 euros les trois litres.

Jus précieux pour objets précieux. Les joailliers, eux aussi, ont humé ces nouvelles bouffées. Mauboussin, Cartier, Boucheron, toutes les grandes maisons de la place Vendôme déploient des trésors d’imagination pour proposer leurs flacons, voire même des bijoux olfactifs, quand les parfumeurs, eux, enserrent leur nectar dans de somptueux joyaux. Une véritable offensive de charme qui s’inscrit parfaitement dans l’écume de la nouvelle ébullition du luxe annoncée par les spécialistes pour les années à venir. Tournis et griseries garantis.

Christine Laurent

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content