Barbara Witkowska Journaliste

Le jazz, il l’a dans le sang. Il a été l’élève du grand saxophoniste John Ruocco et est le complice de nombreux musiciens. Depuis 2002, il enchaîne concerts et tournées. Aujourd’hui, il sort The End of Certainty, son premier CD en solo.

Son vaste salon-cuisine, en rez-de-jardin d’une jolie demeure à Schaerbeek, regorge de livres et d’objets sympas ramenés de voyages ou glanés dans des brocantes. Une ambiance intello et bobo plutôt que musicale. Le studio, lui, est installé dans la cave, bien insonorisée, réchauffée d’un mur et d’un canapé rouges. Toine Thys ne s’est pas beaucoup fait prier pour nous faire entendre les sons des trois instruments  » avec qui il avance dans la vie  » : un saxophone ténor, pièce de collection de 1948,  » chaleureux et généreux dans sa sonorité « , un sax soprane japonais et une clarinette basse,  » moins virtuose qu’un sax mais unique « . Au centre de la pièce trône un set de batteries des années 50.  » Ici, on peut bosser à quatre, le studio se transforme en local de répétition, nous jouons devant la fenêtre ouverte, les passants sont ravis, les enfants adorent ! « 

On s’installe dans la cuisine devant une théière. Toine nous fait écouter, en primeur, les morceaux de The End of Certainty ( » la fin des certitudes « ), le premier CD à son nom, dans les bacs à partir du 1er octobre prochain.  » J’ai pris le temps pour le réaliser. J’ai voulu que le batteur Joost Van Schaik et l’organiste Arno Krijger, néerlandais tous les deux, m’accompagnent dans ce projet : ils maîtrisent leurs instruments à la perfectionà Je leur ai donné une liberté qu’ils n’ont pas ailleurs.  » Le fil conducteur ?  » Le titre est positif. En se libérant des certitudes, ma vie musicale et privée s’ouvre à l’inconnu et à la surprise, je renonce à des choses considérées comme acquises. Sur le plan musical, je me vois comme un débutant qui apprend chaque jour, avec humilité. Il y a mes compositions, mais nous reprenons aussi quelques grands standards : le public aime bien reconnaître des morceaux pour mieux comprendre les libertés des musiciens et l’art de l’improvisation.  »

Cet homme intrigue. Grand, blond comme les blés, regard bleu ciel,  » on me prend souvent pour un Russe « , alluré comme un jeune cadre dynamique aux manières exquises (jeans nickel, tee-shirt raffiné et veste de couturier), polyglotte (il parle cinq langues) et amateur de thés fins, Toine est un musicien de jazz atypique, tout comme l’est son parcours. Une enfance bruxelloise, entre une mère pianiste semi-professionnelle et un père médecin. À la maison, on écoute et fait de la musique : son frère joue de la contrebasse, sa s£ur de l’accordéon, lui de la clarinette et du saxo. Après les humanités, il bourlingue pendant un an en Amérique latine : Pérou, Bolivie, Argentine, Chili, puis part à Lisbonne étudierà la géographie.  » Je pourrais m’occuper de l’aménagement du territoire ou donner des cours.  » Il choisit finalement de se consacrer à sa vraie vocation. Passe six ans au Conservatoire royal de La Haye et suit des cours particuliers avec John Ruocco, musicien américain qui a formé de nombreux saxophonistes en Europe occidentale.

De retour à Bruxelles en 2002, Toine enchaîne concerts (environ 150 par an) et tournées.  » J’ai une chance inouïe. Ma femme comprend et respecte ma passion à tel point qu’elle est devenue mon agent.  » Une complicité essentielle qui lui laisse le loisir de se concentrer sur son art :  » souffler dans un sax m’est devenu vital. C’est ma manière de méditer qui me permet de me recentrer et de reprendre contact avec le sol, c’est-à-dire avec la réalité.  » Il n’aspire qu’à faire vivre le jazz, musique extraordinaire, aujourd’hui un peu moins médiatisée, qui fédère pourtant toujours une famille ouverte, attentive et chaleureuse. Une aubaine pour celui qui, quand on lui demande quelles sont ses autres passions, répond en premier lieu  » les gens « .

Toine Thys sera en concert les 22 et 23 octobre prochains au Sounds Jazz Club (22 heures), 28, rue de la Tulipe, à 1050 Bruxelles.

www.toinethys.com

Barbara Witkowska

Souffler dans un sax m’est devenu vital. C’est ma manière de méditerà

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