Monocoque ou catamaran, Grèce ou Corse, avec ou sans skipper, tout ce que vous devez savoir avant de savourer les îles perdues et les criques inaccessibles de la Méditerranée, du pont d’un bateau.

Comme pour la haute montagne, partir sur un bateau suppose de franchir un cap psychologique. Mais, cette fois-ci, c’est bien décidé : vous allez louer un voilier en Corse ou en Grèce cet été. Première (bonne) surprise : nul besoin de permis pour louer un voilier, même si vous choisissez un multicoque de 25 mètres. Mais attention ! il serait suicidaire de partir en mer sans expérience. Savoir hisser une voile, lire une carte marine ou naviguer au GPS ne s’improvise pas. S’il existe des stages d’une semaine qui permettent d’assimiler ces notions de base, le plus simple reste encore de partir avec un ami  » marin « .

L’autre solution consiste à engager un skipper : tout loueur vous en proposera un pour environ 150 euros par jour. Personnage providentiel, le skipper vous dégage de tous les problèmes de navigation, vous initie à la voile si vous le souhaitez et û avantage très précieux û vous indique criques et plages peu fréquentées. Son profil û discret ou boute-en-train, vieux sage ou jeune survolté… û pourra être adapté à votre groupe après discussion avec le loueur. Mais, véritable capitaine du bateau, il a le pouvoir de refuser une sortie pour des raisons de sécurité, notamment liées à la météo.

La grande majorité des sociétés proposent également des  » hôtesses  » qui s’occupent de la cuisine et de l’entretien (environ 100 euros par jour). Dans les deux cas, pensez à leur attribuer une cabine dans vos calculs. A votre montée sur le bateau, si vous le souhaitez, un ravitaillement aura été effectué selon une liste que vous aurez  » cochée  » au préalable sur Internet. Le plein de gazole et en eau est lui aussi assuré.

Autre constante : en Méditerranée, les locations courent du samedi au samedi. Six jours de navigation, c’est court. Si vous choisissez la mer Ionienne ou Corfou, vous pourrez prévoir un circuit entre des îles magiques qui vous évitera de passer aux mêmes endroits à l’aller et au retour.  » De toute façon, on ne voit jamais le même paysage selon les heures, le temps et le sens de navigation « , relativise Emmanuel Allot, dont la société, Moorings, gère 300 voiliers disséminés sur la Grande Bleue. L’autre solution est d’opter, lorsque cela est possible, pour des formules dites  » one-way  » qui permettent de prendre le voilier dans un port et de le laisser dans un autre. On peut ainsi, au départ d’Athènes, découvrir certaines îles isolées des Cyclades jusqu’à Kos, sans avoir à  » sacrifier  » deux jours pour le retour. D’autant que l’usage veut impérativement que l’on dorme au port le vendredi précédant la restitution.

Quel bateau choisir ?

 » Pour des non-initiés, vivre à 8 sur un voilier de 22 mètrés carrés peut s’avérer une expérience extrême « , prévient Lionel Leroy, patron de Corsica 2001. Diviser les coûts û parfois élevés û d’une location en remplissant les cabines est une tentation à laquelle on résiste rarement. Cela suppose des familles unies ou des amitiés indestructibles. Et des envies communes.

Le grand classique de la location est donc un monocoque d’une douzaine de mètres û Dufour, Bavaria, Jeanneau… û comprenant 3 cabines et pouvant accueillir entre 6 et 8 personnes. Mais l’idéal est le catamaran, qui recrée les volumes d’un (petit…) appartement. Très stable, réduisant les risques de mal de mer, doté d’un vaste carré pour les tablées familiales, ses trampolines (grands filets sur lesquels on peut s’allonger au ras de l’eau entre les deux coques) deviennent vite le paradis des enfants. Evidemment, man£uvrer ces larges monstres dans le port demande un peu de doigté…

Mais la gamme est infinie, depuis les caïques turcs ( voir page 50) jusqu’aux joyaux des mers proposés par Camper & Nicholsons, tel l' » Aurora « , un deux-mâts de 50 mètres en bois rare, avec suites, véritable salle à manger et équipage de 10 personnes. Evidemment, il faut pouvoir débourser 140 000 dollars pour une semaine en mer…

Où naviguer ?

L’été, la Méditerranée n’est pas cette mer d’huile paisible que l’on imagine parfois.  » Piégeuse  » est le mot qui revient le plus souvent dans la bouche des marins. Certes, il n’y a pas de marées, ce qui évite déjà des échouages un peu ridicules et laisse plus de latitude pour arriver dans les ports. Néanmoins, en Grèce, on déconseillera les Cyclades au mois d’août, balayées par le meltem, un vent qui souffle violemment entre les îles et empêche même parfois de se baigner. On leur préférera les Sporades du Nord ou Céphalonie, somptueuses elles aussi, qui permettent de courtes étapes et des haltes dans de charmants petits ports. A contrario, la voile en Corse souffre souvent d’une cruelle absence de vent en juillet et août.  » Parfois, le seul qui souffle, c’est le Yamaha « , sourit un loueur ajaccien. Et naviguer au moteur, peut, à la longue, casser la magie de la tramontane battant la grand-voile.

L’idéal est de panacher mouillages dits  » forains  » dans des criques et haltes au port pour le ravitaillement et la découverte du pays. Les Baléares, le sud de la Corse, la côte turque constituent les meilleurs spots pour ce type de plaisirs (voir ci-dessous). On peut y ajouter la Sicile et les îles Ioniennes.  » Arriver le soir sous le Stromboli et observer du pont ce volcan qui projette des geysers de pierres dans la mer, quelle émotion !  » résume un fidèle de la Grande Bleue. Enfin, il y a la Croatie.  » Avec son millier d’îles, c’est un nouvel eldorado qui représente aujourd’hui plus de la moitié des demandes en Méditerranée « , assure Jean-Marc Gerbeau, de Coolsailing. com, un site qui regroupe des centaines de loueurs.

Combien ça coûte ?

La règle est la location  » bare boat  » (bateau nu) et les prix ont tendance à être homogènes sur tout le pourtour méditerranéen : entre 2 500 et 3 500 euros pour un monocoque de 3 ou 4 cabines doubles d’une douzaine de mètres pour une semaine en pleine saison. Les catamarans coûtent sensiblement plus cher (de l’ordre de 30 %). Mais, à ce prix de base, il faut ajouter tous les faux frais : le diesel (entre 100 et 200 euros pour sept jours), les  » anneaux  » (droits de port, qui vont de 10 euros en Grèce à 50 euros en Corse) et û last but not least û les billets d’avions jusqu’à Dubrovnik, Bonifacio ou Athènes.

Pour un bateau confortable, loué à 7 ou 8 amis en pleine saison, on estime donc qu’il faut compter entre 1 000 à 1 200 euros par personne (vol compris) pour une semaine. Hors saison, les prix baissent d’un tiers.

Sachez enfin que tout périple commence et s’achève par un inventaire extrêmement serré du bateau à quai. Une caution, au moins égale au prix d’une semaine de location, est exigée (attention aux quilles abîmées, car un plongeur vérifie systématiquement l’état de la coque lors de l’inventaire). Ensuite, il suffit de larguer les amarres…

Jérôme Dupuis

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