Il s’en vend deux milliards par an dans le monde, soit 63 à la seconde. Comment le tee-shirt est-il passé de banal sous-vêtement à pièce noble des défilés ? C’est l’histoire d’un rectangle et de deux carrés… Bien décidés à s’éterniser.

Quelque peu éclipsés par les fluos fous de cet été, nous les avions tout de même repérés. Des tee-shirts blancs. Enfilés sous une robe bain de soleil chez Dior, à col orange chez Céline ou sur une jupe rose chez Jil Sander. Les tee-shirts font leur grand come-back dans le haut de gamme. Et annoncent de ce fait l’éternel retour du minimalisme pour cet hiver, symbolisé par des créateurs comme l’Autrichien Helmut Lang. Une mode dépouillée. Androgyne. Mais pas question de nonchalance. Le but du jeu ? Soigner ses pièces, sans qu’elles aient l’air trop travaillées. Pour en faire des modèles classiques… Mais à la pointe du chic.  » Quand on connaît une période de crise, comme celle vécue depuis 2007, on remarque un réinvestissement dans des basiques sûrs en ce qui concerne le prêt-à-porter de masse et d’un luxe plus discret chez les bien nantis « , analyse Véronique Pouillard, docteur en histoire à l’Université libre de Bruxelles.  » Cela dit, la couleur est très présente cette année. On est donc loin d’une situation dans laquelle les grandes entreprises de mode auraient uniquement réinvesti le luxe et la qualité, renonçant au renouvellement des tendances « , affirme l’experte en évolution de la mode.

Back to the basics, donc, mais en version retouchée, industrie de la mode oblige.  » Il faut encourager le consommateur à renouveler sa garde-robe et, pour le tenter, la nostalgie peut être un moteur « , épingle Véronique Pouillard. Résultat : des pantalons souples élégants, des sacs XXL très pratiques ou encore des tee-shirts remis au goût du jour. C’est la career wear, ou mode pour faire carrière, qui pointe son nez.  » Le tee-shirt est une pièce actuelle, témoin des besoins de la femme dans sa vie active « , souligne la créatrice Sandrina Fasoli. Désagréable et caché sous les vêtements des fermiers du siècle dernier, la pièce a tout de même bien changé.  » Comme pour le reste de la collection, nous choisissons des matières fluides, douces au toucher, des jerseys nobles, avec une touche de cachemire ou de soie. Les formes sont simples, mais avec le détail qui fait la différence ou un dessin personnel imprimé « , explique la styliste belge.

Considéré aujourd’hui par certains comme une pièce maîtresse de la garde-robe, au même titre que le jeans, le tee-shirt  » explose véritablement et passe d’un vêtement fonctionnel à une pièce de mode dans les années 50, grâce à des gens comme James Dean et son tee-shirt totalement blanc dans La Fureur de vivre ( voir ci-contre). Il en fera le symbole de la culture jeune « , précise l’historien de la mode Pascal Monfort, dans le documentaire T-shirt Stories (1). Soixante ans plus tard, il est porté sous une veste de smoking ou au-dessus d’un pantalon moulant ultrachic et  » a le pouvoir de contraster chacune de vos silhouettes, leur apportant une petite touche de rock ou de négligé bien dosée « , assure Carol, une des deux frangines à la base de la griffe belge Filles à papa.  » De la surfeuse à la working girl, suivant les styles, le tee-shirt va à toutes et sera toujours de circonstance, à condition de bien choisir le modèle, l’imprimé, la matière et la taille.  » Le fashion faux pas à éviter ?  » Les tee-shirts imprimés à messages pas très subtils voire vulgaires… Ou ceux diffusés en masse, vus et revus mille fois.  » Et, pour le conseil du jour :  » Il ne faut jamais hésiter à personnaliser ou à customiser son tee.  » C’est dit ! n

(1) T-shirt Stories, réalisé par Dimitri Pailhe et Julien Potart, diffusé

ce 30 juin, à 20 h 45, sur Be 1. Lire la critique du documentaire dans Focus Vif du 24 juin.

PAR CORALIE RAMON

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