Thaïlande Au fil du Mékong
La vallée du Mékong, au nord-est du pays, recèle des trésors d’authenticité. Balade au bord de l’eau pour retrouver le pays du sourire. Dans sa plus simple véracité.
» Sawasdee Ka « , le salut de bienvenue respectueux, mains jointes sous le menton, personne n’en est avare dans la région d’Ubon Ratchathani. Amabilité et enthousiasme sont omniprésents. Le décalage avec Bangkok-la-blasée n’en est que plus frappant. Relativement méconnue, cette grande province du sud de l’Isan, bordée au sud par le Cambodge et à l’est par le Laos, regorge de merveilles naturelles, d’attractions culturelles, de boutiques artisanales et d’autres enchantements. Tel le Wat Pananachat. Un temple bouddhiste, situé en pleine forêt, tenu par des bonzesà occidentaux ! Venus des Pays-Bas, de Finlande, de Pologne et d’Australie, ces derniers luttent pacifiquement pour la préservation du patrimoine naturel et culturel des Thaïs.
Le temple se visite tous les matins, mais le dimanche reste cependant le jour le plus animé, car après la prière commune, un déjeuner buffet y est organisé. N’importe qui, moyennant une (infime) contribution financière peut y participer. Toutes ces activités se déroulent dans un silence harmonieux et respectueux. Ici, la nature est reine. Sur les arbres alentours, des pancartes rappellent d’ailleurs les enseignements bouddhistes : » Rien ne dure toujours » ; » Si tu as le temps de respirer, tu as le temps de méditer « . Nyianeko, visage d’ange aux yeux bleus, vêtu d’une toge orange, était, il y a à peine huit ans, un Californien de 20 ans qui ne pensait qu’à devenir une star du rock. Après avoir lu plusieurs livres sur le bouddhisme, il décide d’intégrer le monastère. Aujourd’hui, il suit, comme les autres, les 267 commandements auxquels est tenu un moine bouddhiste, dont notamment l’absence de richesse, l’interdiction de boire de l’alcool et le renoncement à la sexualité. Malgré la tranquillité impressionnante qu’il dégage, il avoue tout de même que ses amis et le sport lui manquentà Mais » la vie de moine est un sacrifice « . Qui ne semble pas effrayer tout le monde : au moment de quitter les lieux, un jeune homme, au sourire lumineux et au sac à dos bien garni, s’informe pour connaître les conditions d’intégration.
King Mékong
Autre temple, le Phra That Phanom, de style laotien, attire de nombreux fidèles venus de loin. La raison ? Historique : le premier monument aurait été érigé seulement huit ans après la mort de Bouddha, mais en plus, c’est ici, dans le chedi dont la flèche est faite de 16 kilos d’or pur, que reposeraient les cendres de la poitrine du Bienheureux. À l’entrée, les marchands de » bonheur » sont nombreux : libérer oiseaux et poissons, offrir des fleurs de lotus, allumer de l’encens ou coller une feuille d’or sur le temple. Toutes attentions pour gagner des » mérites » vous y seront ainsi proposées. Ici, les amateurs de Wat (temple-monastère) seront comblés. De tous les styles et pour tous les goûts. Le Wat Ban Na Muang, en céramique, a la forme de la barque royale, à l’image de celle qui transporte le roi lors des cérémonies religieuses à Bangkok. Tandis que le Wat Nong Bua est une réplique du célèbre chedi indien Mahabodhi de Bodhgaya, là où Bouddha aurait eu l’Illumination, 2 500 ans plus tôt. Face à lui, un nouveau temple ultramoderne joue la carte bling-bling. Les superstitieux s’amuseront avec la statuette d’éléphant posée face aux bouddhas scintillants : agenouillez-vous au côté de l’éléphant, faites un v£u, essayez ensuite de soulever la statuette par la anse avec votre auriculaire, et ce, sans relever les fesses. Si vous y parvenez, répétez l’opération, votre v£u se réaliseraà
Plus au nord, dans la région de Kong Chiam, le parc national de Pha Taem constitue l’une des plus belles richesses naturelles. Outre les fleurs et oiseaux exotiques à observer, les jolies cascades où se tremper (de juin à novembre) et les étranges roches érodées en forme de champignons, c’est essentiellement la vue panoramique sur le Mékong qui ne laissera aucun visiteur indifférent. L’émotion provoquée est telle – encore plus intense au lever et au coucher du soleil – qu’elle a même séduit le réalisateur Oliver Stone au point de l’incorporer dans son long-métrage Alexandre (2005). À quelques centaines de mètres – en bas du point de vue -, quelques peintures rupestres datant de plus ou moins 4 000 ans décorent le bord de la falaise. On reconnaît çà et là un poisson-chat géant, un éléphant, une tortue, quelques mainsà
Un must incontournable : la » rivière aux deux couleurs « , lieu de confluence du petit ruisseau Mun bleu indigo avec le grand Mékong rouge boueux. Si l’activité peut se révéler décevante (notamment lorsque le barrage est ouvert), le voyage paisible à bord d’un bateau à longue-queue sur le fleuve est lui particulièrement agréable et rassérénant. D’autant plus romantique quand on y ajoute un coucher de soleil.
Laos Vegas ?
Dans la province de Mukdahan, c’est le pont de l’amitié Lao-Thaï qui attire les foules. Grâce à lui, depuis trois ans, le Laos est facilement accessible. Une aubaine pour de nombreux joueurs thaïs qui partent tenter leur chance tous les week-ends dans les casinos voisins, interdits dans leur pays. Une fois dépassées les tristes enseignes lumineuses des jeux de hasard, le visiteur découvrira la beauté pure et sans fard du pays. Les paysages défilent : longues routes vertes désertes, buffles d’eau amaigris, paysans battant le bléà Tout est dans la simplicité.
Détour par Thonglahasinh à Vientiane (www.culturalprofiles.net/laos), une fabrique de coton artisanale. Après vous avoir fait faire un tour dans l’odeur nauséabonde des pots de teinture, on découvre une boutique charmante et de très jolies pièces qui raviront vos proches. Pour la chasse aux cadeaux, direction le marché indochinois, où l’on trouve tout et n’importe quoi dans une ambiance de » grand bazar » : gsm dernier cri, bijoux en argent, tee-shirt dégrifféà C’est ici qu’il faut mettre en £uvre ses talents de négociateur. Les prix peuvent facilement chuter de 30 %.
Dans la rue, les sourires s’illuminent et les images sont imprégnées de tendresse, comme cette grand-mère concentrée sur son métier à tisser entourée de ses petits-enfants rieurs, cette maman qui pèle de jeunes oignons avec sa fille, ou cet artisan concentré sur son bas-relief en teck. Tous sont souriants et heureux de croiser des étrangers. Personne ne parle anglais, mais tout le monde désire partager. La vallée du Mékong offre cette douce sensation des rencontres authentiques. Un cadeau devenu rare et précieux. Kop khun kha (merci).
Reportage : Valentine Van Gestel
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