Rien dans les mains, tout dans les poches. La mode nomade nous y invite, autant que le marketing, qui multiplie minigadgets et monodoses.

A pparentes toujours, formant de vrais soufflets parfois, ou bien minuscules – voire carrément inutiles comme au bas d’une jupe – les poches pléthoriques signent l’été 2003, de la salopette Burberry, qui en compte 7, au sac phare de la collection Jil Sander, qui en comporte 26. Cet engouement relève d’une conjonction de tendances présentes depuis plusieurs années. Prenez la mode camouflage et ses pantalons de treillis (été 2001), ajoutez-y la ligne Street Chic lancée par Dior, éditée la même saison (celle qui agrémente de poches amovibles les sacs reporter et les bottines), complétez avec les vêtements inspirés du bleu de travail et des sports d’escalade – deux styles très présents ce printemps – et emballez le tout de la tendance  » nomade  » devenue, en quatre ans, la nouvelle condition du savoir se déplacer sans s’encombrer… Le résultat ? Une allure décontractée et pratique bardée de zips et de rabats.

Tout dans les poches, donc, mais quoi ? Un bon bouquin au format adéquat. Créé en 1953 par Henri Filipacchi, le Livre de poche a révolutionné l’art et la manière de lire. Près de 1 milliard d’ouvrages ont été vendus depuis la naissance de la collection – dont 18 millions en 2002, et le genre a fait des émules : J’ai Lu, Pocket, Folio, Librio (10 ans cette année). La Petite Collection (10,5 centimètres sur 15) des éditions Mille et Une Nuits – 10 ans également – fait paraître des textes à faible pagination (de 64 à 112 pages) à prix modiques (2,50 et 3 euros) et se taille un joli succès :  » Lettre sur le bonheur « , d’Epicure, a séduit 200 000 lecteurs. Pas du tout littéraire, le catalogue Marabout joue, lui, le pratique et le ludique : meilleurs sites Internet dans la collection Mini-Web, conseils dans Maxi-Bloc et même un  » Petit Manuel de l’orgasme  » (collection Mini-Sexe) à glisser dans la poche de la couette.

Dis-moi ce que tu caches dans tes poches, je te dirai qui tu es… Dans celles de son blouson, Junior cale sa nouvelle console GameBoy Advance SP (GBASP) à écran couleur rétro- éclairé. Grâce à sa batterie au lithium rechargeable, la petite championne de Nintendo (150 grammes seulement), compatible avec tous les jeux de la GameBoy Advance (GBA), assure jusqu’à dix-huit heures de jeu en continu sans faiblir. Une autonomie record ! Et dans les poches de son jean, Junior planque l’Espio Xtra, le plus compact des mini-appareils photo numériques. Pas plus gros qu’une boîte d’allumettes (31 grammes), il est doté d’un viseur de la taille d’un ongle et d’un objectif grand comme la pupille ; il ne dispose pas de flash, ni de carte numérique de stockage des photos, ni d’écran de contrôle des clichés. Mais sa mémoire interne peut absorber jusqu’à 200 images de haute résolution, et il est capable de réaliser des clips vidéo d’une trentaine de secondes ainsi que de se transformer en webcam une fois branché au Mac ou au PC.

Une fringale ? Pas de problème, l’agro-alimentaire a tout prévu : barrettes de Crunch,  » synthèse entre le plaisir des tablettes classiques et le format ambulatoire des barres de confiserie « , selon Eric-Marie Boullet, de Nestlé, ou doses d’Actimel (Danone)… Jusqu’où ira-t-on ? On frémit quant on sait que la dinde en barre, pardon, en stick, existe déjà… Ces produits baladeurs  » ne sont plus réservés à la seule consommation extérieure « , fait remarquer Olivier Terlet, du cabinet de veille marketing XTC. A la maison, on fait désormais plusieurs choses à la fois, comme prendre son petit déjeuner en se pomponnant dans la salle de bains ou dîner devant son ordinateur. Ce que l’on appelait jadis le grignotage fait désormais partie du  » nomadisme-cocooning « .

Lequel s’épanouit aussi dans la cosmétique. Nomades et parfumés, les mecs ont désormais leur vaporisateur de poche (Mémoire d’homme, de Nina Ricci ; Zanzibar, de Van Cleef & Arpels ; Kouros, d’Yves Saint Laurent…), version masculine du vapo de sac de madame, tandis que celle-ci remplit ses poches avec un minidéodorant (20 millilitres) et un kit monodoses le Soin soleil d’Anne Sémonin, pour se protéger des rayons nocifs pendant sa pause-déjeuner en terrasse.

Les marketeurs ont tout compris, qui se remplissent les poches avec ces gadgets. Pratiques sans doute… vide-gousset assurément.

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