Transmission et partage

Une silhouette de la collection du vainqueur. Entre tailoring et uniformes british. © © Etienne Tordoir/Catwalkpictur

Pour sa 36e édition, le Festival de Hyères a consacré la jeune création mode, l’engagement intime et universel, l’écoresponsabilité bien pensée, le pouvoir des fleurs et l’amour, chanté sur tous les tons.

Sur l’affiche du 36e Festival international de mode, de photographie et d’accessoires de mode, Hyères 2021, on reconnaît parmi les hortensias roses et bleus les visages de Jeune pouce et d’Eddy de Pretto. Si Jean-Pierre Blanc, le fondateur de ce concours prisé, l’a voulu ainsi, c’est sans aucun doute pour porter les combats qui traversent notre époque, les questionnements qui la chamboulent – l’identité, le genre, les racines, les possibilités de concorde. Toutes choses qui imprègnent forcément la mode les doigts dans la prise de ce monde post-pandémique. Durant quatre jours, du 14 au 17 octobre, la Villa Noailles fut donc le coeur battant de ce festival enthousiasmant destiné à soutenir la jeune création portée par une génération émergente. L’émulation y est toujours allègre et puissante à la fois. On n’en doute guère à compulser la liste des lauréats dans la catégorie mode, depuis plus de trente ans, de Viktor & Rolf à Tom Van Der Borght, Christian Wijnants, Felipe Oliveira Baptista, Anthony Vaccarello ou Botter.

Une silhouette de la collection du vainqueur. Entre tailoring et uniformes british.
Une silhouette de la collection du vainqueur. Entre tailoring et uniformes british.© © Etienne Tordoir/Catwalkpictur

Pour cette cuvée qui tenait tant à se réimplanter dans la vie réelle, le Grand Prix du Jury Première Vision couronne le Britannique Ifeanyi Okwuadi et sa collection Homme titrée « Take the Toys from the Boys ». Né à Londres, d’une mère originaire de Sierra Leone et d’un père nigérian, formé à Savile Row et à l’université de Ravensbourne, le jeune homme (27 ans) enracine son vestiaire dans le tailoring et le souvenir engagé du Camp de femmes pour la paix à Greenham Common, qui entendait protester pacifiquement contre l’armement nucléaire et le fit audacieusement de 1981 à 2000. Traduit en vêtements, cela donne un trench-coat inspiré de l’uniforme policier, un sweat-shirt au cou élargi comme si l’on avait tiré brutalement dessus – traces restantes des violences gouvernementales contre les pacifistes -, des foulards noués façon boy-scouts provenant de deadstocks, un mélange de matières british et une attention particulière pour le tailoring. Quand il s’est agi pour lui de venir chercher son trophée, offert par Louise Trotter, directrice artistique de Lacoste et présidente du jury, il a osé trois simples mots en guise de merci: « I love you ».

Un trophée signé Desrues des Métiers d'art de Chanel pour Ifeanyi Okwuadi, Grand Prix du Jury Première Vision à Hyères.
Un trophée signé Desrues des Métiers d’art de Chanel pour Ifeanyi Okwuadi, Grand Prix du Jury Première Vision à Hyères.© © Etienne Tordoir/Catwalkpictur

Il en fut question partout et tout le temps, de ce « love ». En apothéose chez Tom Van Der Borght surtout, le Belge, grand gagnant de l’année dernière, avec son « Time for love », affiché en lettres majuscules sur son couple défilant main dans la main, sous un incroyable chapeau à deux têtes créé en collaboration avec Maison Michel, l’un des métiers d’art de Chanel. Car à Hyères, loin de Paris, sur ce promontoire inspirant, le futur de la mode s’écrit aussi et surtout grâce à la transmission et au partage des savoir-faire. Le seul exemple à suivre.

Un chapeau à deux têtes, créé avec Maison Michel par le Belge Tom Van Der Borght, lauréat 2020, qui défilait en apothéose du festival.
Un chapeau à deux têtes, créé avec Maison Michel par le Belge Tom Van Der Borght, lauréat 2020, qui défilait en apothéose du festival.© © Etienne Tordoir/Catwalkpictur

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