Plus de cent pieds de haute technologie pour le » Wally B « , un voilier de course aux lignes sobres et efficaces. Superbement aménagé par le studio romain Lazzarini & Pickering, il offre également un bel espace à vivre.
Le rêve n’a pas de prix. Inutile donc de parler d’argent lorsque l’on évoque un voilier aussi luxueux: seuls importent le désir et la passion qui conduisent quelques privilégiés à armer le navire ajusté à leurs désirs les plus fous. Ces bienheureux s’adressent à de rares chantiers, dont jamais les carnets de commande n’ont été aussi remplis. Tel Wally, société établie à Monte-Carlo et fondée en 1991 par un ancien champion doublé d’un homme d’affaires, qui propose des voiliers à l’unité, sur mesure. Ses produits sont de véritables oeuvres d’art, des bolides marins construits en fibre de carbone et titane, les matériaux les plus légers et les plus résistants, des yachts aménagés avec tout le luxe que peuvent exiger des plaisanciers fortunés.
Pour sa part, le commanditaire du » Wally B » avait en horreur les aménagements des navires de grande plaisance. Ce sont généralement des appartements, cloisonnés en suites et salons, habillés de matériaux ostentatoires s’employant à dissimuler soigneusement l’ouvrage dans lequel ils se logent. Lui savait que le » racer » dessiné par l’architecte naval Luca Brenta était une merveille qu’il faudrait laisser apparent. Lui saurait vivre dans un bateau ouvert, en véritable homme de mer.
C’est Luca Brenta qui l’a dirigé vers les architectes d’intérieur Claudio Lazzarini et Carl Pickering, avec lesquels il avait déjà eu l’occasion de travailler. Le premier est italien, formé à Rome, l’autre australien, passé par l’école de Venise. Associés depuis 1985, ils se sont installés dans la Ville éternelle et ont surtout créé des meubles et des magasins, ou aménagé des intérieurs à l’occasion de réhabilitations ou de restructurations, pour le compte de clients privés. Leurs travaux allient toujours élégance et minimalisme, dans une quête de la soustraction et du silence. Ils aiment ce qui bouge et ce qui se transforme, meubles et rideaux, cloisons et panneaux, mais aussi lumière et espace.
Lorsque le propriétaire du » Wally B » s’est adressé à eux, ils lui ont demandé ce qu’il voulait, ce qu’il aimait. Sa réponse? Un loft, la cuisine et les équipements du cuisiniste Bulthaup (matériel allemand en acier aux lignes sobres et épurées). Tout un programme dont Lazzarini et Pickering se sont saisis avec bonheur. Tirant le meilleur parti du volume intérieur de la coque raidie par quelques cloisons, ils ont laissé les perspectives libres en ménageant deux passages de part et d’autre de l’ovale de la salle des machines, au centre du bateau.
Forts de ce dispositif efficace, Lazzarini et Pickering ont appliqué leurs idées de mobilité et de souplesse. Leurs équipements sont de toile, de cuir, de merisier et d’inox, qui jouent avec le contreplaqué marine du plancher et la fibre noire de carbone de la coque. Jamais dissimulée, celle-ci est exploitée dans l’étrangeté de ses formes galbées qui gonflent l’espace intérieur. L’inutile est tout simplement proscrit. Les détails sont soignés à l’image d’un accastillage, pensés et dessinés dans leur seule fonctionnalité. Dans les écrans de commande des lumières et des machines, dans les malles de cuir suspendues, dans les tubes qui courent d’une partie à l’autre du bateau, c’est bien l’esprit de voyage et l’unité de ton qui régnaient dans la marine d’antan, entre aventure et confort, risque et simplicité, que Lazzarini et Pickering ont retrouvés.
Jean-Paul Robert Photos: Matteo Piazza
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici